Chap 15

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          Je n'ai pas fermé l'oeil de la nuit. Mon cerveau tournait en boucle : aller au cours d'anglais ? Ne pas aller au cours d'anglais ?

          Je n'ai pas vraiment fait de choix. Tout ce que je sais, c'est que si je décide de ne pas aller à ce cours, il est fort probable que je décide de ne pas aller au suivant non plus, et ainsi de suite.

          Je dois avoir de bonnes notes. Je dois avoir de bonnes appréciations. Je veux avoir la chance d'entamer des études anglophones et devenir traductrice.

          Dans la vie, des obstacles, il y en aura plein. C'est pas une petite rousse super sexy avec qui l'alchimie sexuelle est parfaite qui va m'en empêcher.

          Ce matin, Simon me rejoins dans le bus, le sourire aux lèvres.

          - Astrid déjeune avec nous ce midi. N'oublie pas.

          - Comment pourrais-je oublier ? réponds-je l'air désespéré.

          - Je sais que tu ne l'apprécies pas Kiara, mais fais un effort pour moi s'il-te-plait.
Tu n'imagines pas tous les efforts que j'ai fait avec les vieux mecs que tu t'es tapés, me lance-t-il.

          Je ne réagis pas à sa remarque. Je suis plutôt la route des yeux de manière pensive.

          - Toi, tu ne te mets pas en colère alors que je te taquine, c'est qu'il y a quelque chose qui ne va pas, devine Simon.

          - Je ne me sens vraiment pas d'aller en anglais. Cette gonzesse me tape sur les nerfs, m'exclamé-je.

          - Elle t'énerves, mais elle te fait mouiller, réplique Simon.

          Il n'a pas tord. Mais je n'ai pas demandé à subir le supplice du silence. Moi, qui me sentais prise en considération dès le premier jour, je me retrouve à être ignorée par ma propre professeur.

          Je monte les escaliers. Je redoute déjà de voir sa petite bouille de diable. Elle est là. Comme chaque vendredi. À la porte, pour accueillir les élèves. C'est le meilleur moment de la semaine, mais aussi le plus angoissant. Le genre de moment qui me donne aussi bien des papillons, que la boule au ventre.

          - Hello, dis-je.

          - Hi, répond-elle brièvement.

Notre échange n'a jamais été aussi froid. Je pense être la dernière personne qui est arrivée car elle ferme la porte immédiatement après mon passage. Elle se place devant le table au et s'adresse à nous :

- Bonjour à tous, avant que l'on ne commence le cours je voulais vous féliciter. Vous avez tous rendu votre travail en temps et en heure, bravo.

Nos petits différents ne l'empêchent pas de rester très professionnelle. Sa voix est tellement douce et son attitude est très maternelle. Ce sont des qualités que j'apprécie chez elle. Je ne veux pas que cette attitude change à mon égard.

Durant le cours, on recopie quelques phrases qui sont écrites au tableau, toujours sur le thème de la science. C'est marrant, c'est comme si on faisait une autre matière, mais en anglais. Il faut bien suivre pour comprendre chaque mot et chaque idée, mais je vois Marguerite, une élève de ma classe, pianoter sur son téléphone.

Pourtant, cette école est stricte sur les téléphones : aucun téléphone en classe, sinon nos parents doivent le récupérer au secrétariat le soir. Je pense ne pas être la seule à l'avoir vue.

- Mademoiselle Duchêne, vous connaissez le règlement. Donnez moi votre téléphone et passez me voir à la fin du cours, s'exclame Madame Johnson.

Je suis sûre qu'elle a déjà vu des tas de gens utiliser leur téléphone en cours et elle n'a jamais rien dit. Pourquoi gronde-t-elle Marguerite seulement aujourd'hui alors ? Peut-être qu'elle veut me remplacer et qu'elle cherche un nouveau joujou à fesser.

On a couché ensemble. Cela lui a suffit. Elle m'a dégagée pour se taper quelqu'un d'autre. Et elle fera sûrement la même chose avec Marguerite une fois qu'elle l'aura eu dans son lit.

La sonnerie retentit. Je n'ai pas le temps de me réjouir du dix-neuf que j'ai reçu grâce à mon devoir sur les robots. Je me faufile vers la sortie en lançant à Agathe :

- Je te rejoins en histoire Aggi, je dois faire un truc pendant la pause.

          - Oh non Kia, t'abuses. Tu vas me laisser seule au milieu de Simon et Astrid, n'as-tu donc aucune pitié ? dit-elle l'air dépité.

          Je lui adresse un léger sourire compatissant au fur et à mesure qu'elle s'éloigne de moi, tandis que je demeure près de la porte. La porte de la salle est fermée. Je suis à l'extérieur, mais je tends l'oreille.

          Il faut dire qu'on les entend quand même parler. Je me demande sincèrement si quelqu'un ne nous a pas entendues le jour où elle m'a flanquée trois fessées. Je perçois subtilement la voix de Marguerite :

         - Je suis désolée de m'en être servi. Je cherchais la signification de certains mots sur mon téléphone. Le thème que l'on aborde en classe est riche en vocabulaire.

          - Je peux comprendre que vous soyez vite perdue Marguerite. Mais il ne faut pas hésiter à poser des questions lorsque vous avez du mal à suivre, dit-elle d'une voix réconfortante. Tenez. Je vous rends votre téléphone, mais en contrepartie vous devez me promettre de chercher ce soir, chez vous, la signification des mots que vous ne comprenez pas.

          - Promis, Madame Johnson.

          La porte s'ouvre. Je n'avais pas remarqué qu'elle discutaient si proche de l'entrée. Je pensais qu'elle étaient plutôt près du bureau.

          Marguerite s'en va en remarquant à peine ma présence. Ce qui n'est pas le cas de ma professeur d'anglais qui me fixe, ayant encore la poignée en main.

          - Vous m'espionnez Mademoiselle Marinato ?

          - Je voulais simplement m'assurer que vous ne fessiez pas d'autres élèves, réponds-je.

          - Rassurez-vous Miss Marinato, je ne réserve ce genre de traitement qu'à mes pires élèves.

          - Étant donné que vous m'ayez mis un dix-neuf, je ne pense pas en faire partie, répliqué-je.

          - C'est vrai que vous aviez eu beaucoup d'inspiration sur ce sujet.

          - Pas tant que ça. Comme dirait Thomas Edison : « Genius is one percent inspiration and ninety-nine percent perspiration? », lui dis-je, en citant mot pour mot sa biographie instagram.

           - Je vois qu'en plus de m'espionner au lycée, vous me stalkez sur les réseaux sociaux, s'étonne-t-elle tout en essayant de cacher sa surprise.

          - Oui je vous espionne. Et alors ? Allez-y, sanctionnez-moi, réclamé-je en espérant qu'elle fera déraper cette punition.

          - Vous voulez vraiment que je vous punisse ? me demande-t-elle.

          Je regarde de chaque côté du couloir pour m'assurer que personne ne nous regarde, puis j'acquiesce discrètement.

          - Très bien. Alors, recopiez-moi vingt fois la citation de Thomas Edison pour vendredi prochain.

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