Chapitre 8

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LUBNA






Deux semaines avant mon dix-huitième anniversaire, je trépigne d'impatience. Atteindre cet âge me procure l'illusion de la liberté, la possibilité de fuir sans destination précise et de m'installer où bon me semble. Mais à cause du roi, tous mes rêves s'envolent.

Une boule d'oppression se forme dans ma gorge, menaçant de faire déborder mes larmes. À ma place, une autre personne tenterait peut-être de s'intégrer, de trouver du réconfort dans l'immensité de ce château. Il est vrai qu'ils me traitent bien, que je ne manque de rien, qu'ils me respectent et ne m'obligent ni à porter des fardeaux ni à me contenter de nourriture avariée ou de portions minuscules. Pourtant, malgré ces attentions, je ne choisis pas d'être ici.

Mon cœur s'emballe lorsque j'entends la porte de la chambre de Rayan s'ouvrir brusquement. Je me lève de mon lit en sursaut, les mains tremblantes, et je me mets à arpenter la pièce en attendant son entrée. Mais il ne franchit jamais le seuil de ma porte. Il n'y est d'ailleurs jamais entré, gardant ses distances dans ce domaine, tout en me suivant toujours dans l'ombre.

Lorsqu'il m'a montré ma chambre pour la première fois, j'ai souhaité qu'il m'en attribue une autre, plus éloignée de la sienne, ne serait-ce qu'à cause de la porte qui les relie. Il m'a alors promis de n'y pénétrer qu'à ma demande, ce qui m'a quelque peu rassurée, car je n'envisage jamais de le solliciter en ce sens.

Je m'approche de la porte et y colle mon oreille, tentant de saisir des bribes de sa conversation avec une autre personne. Mais les mots parviennent à mes oreilles de manière décousue et ma tête heurte violemment le bois lorsque des coups insistants résonnent à ma porte. Je m'en écarte vivement pour l'ouvrir.

— Mademoiselle Malhas, n'oubliez pas la répétition du mariage à seize heures, me rappelle Madame Aniston. Je hoche rapidement la tête en la fixant, retenant mon souffle tandis que la porte de la chambre de Rayan s'ouvre à nouveau. Sir Abraham fait sa sortie le premier, incline légèrement la tête en ma direction avant de s'éloigner. Rayan le suit, marchant droit vers moi. Je racle ma gorge et tente de refermer la porte avant qu'il ne l'atteigne.

— Je serai dans le salon à seize heures, parviens-je à articuler.

Elle s'incline gracieusement dans ma direction puis vers Rayan, nous laissant en tête-à-tête. Bien que plusieurs gardes sont postés près du couloir, il me fixe avec un regard intrigué lorsqu'il s'arrête devant moi, les mains croisées dans le dos. J'essaie de ne pas scruter sa tenue, mais c'est en vain. Mes yeux parcourent son costume trois pièces bleu marine, qui met d'autant plus en valeur ses cheveux impeccables et ses yeux perçants.

— J'ai entendu un bruit. Tout va bien ?

— Je serais bien mieux chez moi, mais vous me retenez prisonnière ici.

— Tu préférerais être chez toi ? Ta tante n'est pas de ton avis.

Ses paroles me font tressaillir.

— Elle m'a envoyé une lettre pour me remercier de t'avoir choisie, car tu mérites de vivre comme une reine, et non dans une cabane miteuse.

Un soupir d'agacement s'échappe de mes lèvres face à son commentaire sur ma maison. Il a raison, c'est une cabane miteuse, mais je suis la seule à pouvoir la qualifier ainsi, pas lui.

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