8. Erin

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Ce qu'il y a de dérangeant avec mes souvenirs, c'est qu'ils sont liés au même poison : La mort.

Juin, 2023

Devant l'immense clôture noire métallique, je ravale un haut-le-cœur. Cette maison ressemble aux parfaites habitations des films d'horreurs élitistes. Les riches jouent à des jeux de sang et de sexe, se servant de pauvres et naïfs innocents pour satisfaire leur soif de dominance et de surpuissance. Deux fois, j'ai servi de passeuse pour cette baraque. Deux fois, j'ai voulu y foutre le feu. Je reviens à la réalité quand Isaac Ducon pas Peters s'avance vers la large grille. Mes yeux roulent, je l'attrape par la nuque et enfonce mon pied dans la pliure de son genou pour l'obliger à s'écraser au sol. Il grogne, j'étouffe mon rire. Il ressemble vraiment à une petite victime depuis qu'il est entrée dans la planque. Il n'en est pas une. Il est très loin d'en être une. Je me reconcentre sur l'objectif initiale et relâche sa nuque.

— La maison est sécurisée par deux caméras de chaque côté. La clôture a un champ électrique actif depuis minuit et détecte tous les mouvements à moins d'un mètre. En haut de l'arbre, il y a une arme prête à nous buter si tu passes cette ligne invisible au sol. En faisant le tour, il y a un angle mort. Nous avons une minute et vingt-six secondes pour enjamber la clôture. Huit baies vitrées au rez-de-chaussée, tout autant à l'étage. Celle qui donne sur la cuisine sera ouverte. Tu entres le premier et tu ouvres la porte arrière donnant sur le cellier. La clé se trouve sous le troisième pot à gauche de l'évier. Il est jaune avec des fleurs bleues.

Ses billes grises me dévisagent. Je sais qu'il sait. Il connaît ma malédiction. Je suppose, cependant que ne m'ayant jamais vu à l'œuvre jusqu'à cet instant, il est surpris. Je hausse les épaules et d'un signe du menton lui ordonne de me suivre dans l'angle mort. L'un après l'autre nous enjambons la clôture et il s'infiltre à l'intérieur. Quelques secondes plus tard, la porte s'entrouvre. Je m'empresse de désactiver l'alarme et me tourne vers lui.

— À l'étage, à gauche, deuxième porte, murmuré-je. La sixième marche des escaliers craque. Tu l'évites.

Il acquiesce quelques peu abasourdi par les informations que je lui fournis. Nous entamons notre avancée quand je l'arrête.

— Pas touche à la rambarde, elle a un capteur de chaleur.

J'ai toujours été fascinée par la maison des Cooper et des Rivers, principales maisons dans lesquelles j'ai été passeuse. Elles sont équipées de technologies ultra sophistiquées. Je suppose que c'est le minimum nécessaire quand on abrite un trafic entier de ventes sexuelles et humaines. Isaac s'exécute comme un bon petit soldat et grimpe en sautant la sixième marche. Lorsqu'il ouvre la porte du bureau, il hausse un sourcil, presque satisfait de voir que ma mémoire n'est pas infaillible.

Imbécile, pensé-je sans lui cracher au visage. Je bouscule son épaule et entre. D'un mouvement de la tête, je l'incite à me rejoindre. Je m'approche de la bibliothèque, penche la tête sur le côté une seconde puis compte les livres. Je tire sur le septième de la troisième étagère et un petit clic se fait entendre. Mes lèvres s'incurvent furtivement. Lorsque nous pénétrons dans le « vrai » bureau, je tends mon bras contre le ventre d'Isaac. J'analyse la pièce et repère quelques points sensibles.

— Je ne connais pas assez bien cette pièce. Les détecteurs de mouvements doivent être partout.

Un détail dénote avec le reste de la pièce, j'ajoute :

— Ne t'approche pas de la cheminée.

Il acquiesce d'un hochement de tête, je le délaisse pour contourner le bureau. Sans toucher au moindre objet, j'enfonce la clé dans l'ordinateur et tape des codes d'hacking que Lucy m'a donné. Ma spécialité est mnésique, je ne comprends rien au langage informatique, j'ai des bases, certes mais pas suffisamment pour comprendre ce qu'il se passe quand plusieurs fenêtres noires s'ouvrent et que des lignes de codes jaillissent sur l'ensemble de l'écran. Le pourcentage augmente lentement. L'impatience me tord les entrailles, j'ignore si nous avons déjà été repérés et le risque de ne pas terminer le téléchargement est grand. Isaac s'approche, la curiosité teintée sur son visage. Absorbé par l'écran, il presse sa main sur le bureau. Je fronce les sourcils lorsque j'entends un léger bruit presque imperceptible.

The Perfect Prototype 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant