The Perfect Prototype 1

17. Erin

Donne-moi ton nom je te dirais comment tu mourras.

Juin 2023, trois heures plus tôt,

Je gare la moto une rue plus loin de notre appartement avec Lucy. J'entre et suis accueillie par mes deux têtes rayonnantes préférées qui m'arrachent cependant une grimace faussement dégoûtée devant la vision de leurs langues entremêlées. Ils ont été créés avec des hormones de lapin, même mon appétit sexuel pourtant conséquent n'est pas aussi important que le leur. J'ouvre le réfrigérateur et m'attrape une bière que je décapsule à l'aide de mon briquet. Lucy pointe mon annulaire et mon majeur bandés, un sourcil arqué alors que je m'installe sur le canapé.

—    Le mur a gagné, avoué-je en portant le goulot à mes lèvres.

—    Un autre adversaire plus atteignable serait bien, murmure-t-elle.

—    C'est pour ça que je suis là, Isaac pas Peters ?

Une lueur étrange traverse ses grands iris bleus, ma tête se penche sur le côté et mes paupières se plissent de suspicion. Elle adresse une œillade furtive à l'attention de Ryan qui ouvre son ordinateur sans un mot.

—    Comme on t'as dit au téléphone ce matin, Sara a été agressée par ce James Felton qu'Isaac a tué lorsqu'il avait seize ans, me rappelle Ryan.

—    Il n'y a aucun acte de mariage entre eux, poursuit Lucy. Sara Peters, fille unique de Martha et Thomas Peters a grandi à San Francisco. Ses parents ont déménagé en Australie en deux mille quinze quelques jours après les vingt-et-un an de leur fille. Sara n'est pas partie avec eux, néanmoins, Isaac et elle ont disparus des radars quelques semaines après le départ des parents de Sara.

—    Comment sait-on alors qu'il a bien fait l'armée ?

Un silence plane dans les airs, j'avale une nouvelle gorgée de ma bière tandis que le teint déjà laiteux de ma meilleure amie devient pâle. Ryan parvient encore à garder une contenance, toutefois, ses doigts tapotent d'impatience la table basse et son cœur palpite contre sa cage thoracique avec une telle force que je pourrais le sentir frapper dans ma propre poitrine. Je patiente, même si ce n'est pas ma qualité première, que mes amis se décident à lâcher l'information. Les minutes s'allongent, le contenu de ma bière se vide, aucun d'entre eux ne cèdent. Je m'agace mais ne les brusque pas. L'analyste relié à notre section aurait sûrement déjà la tête écrasée contre son clavier, une arme sur la tempe pour que je lui tire les vers du nez. Lucy, elle, tente de me préserver, et elle n'est ni mercenaire ni analyste pour l'Agency, c'est mon amie la plus fidèle qui aide à calmer la tempête folle sous mon crâne. C'est celle qui me permet de mener à bien ma vengeance. Elle attend que je me libère de l'Agency et de ce monde avec presque plus d'impatience que moi. Cette liberté j'en ai rêvé, pendant des années. Avec la mort de Jonas et tout ce qui s'est produit, peut-être que je n'en n'éprouve plus autant le besoin. Dixon a raison, j'ai haï cette vie, avant de l'épouser sans plus aucune condition. Je n'ai plus que ça. Je n'existe et ne vis plus qu'à travers ça. Je n'essaye pas de faire dans la tragédie, je ne suis pas non plus fataliste. Mais, si on regarde de plus près, qu'ai-je d'autre que cette vie ? À seize ans j'ai été forcée de vivre comme mon frère et Dixon. J'ai grandi pendant dix ans dans ce monde fait de flingues, de sang, de choix politiques plus que discutables et d'hommes aussi pourris à l'intérieur qu'à l'extérieur. J'ai été entraîné pour négocier, manipuler et tuer. À cette pensée et l'espace d'une seconde, mes doigts effleurent mon poignet. J'ai tué. J'ai goûté au sang sous sa forme la plus pure. Alors, aujourd'hui si on me retirait mon arme et qu'on m'ouvrait les portes de la liberté, que me resterait-il ? Je n'ai pas fait d'études ordinaires et je doute qu'inscrire ancienne mercenaire complètement folle sur un curriculum aide à trouver un travail. Je n'ai pas de réelles passions, du moins, je n'ai jamais pris le temps de le découvrir. Finalement, je crois, qu'après toutes ces années au service de l'Agency, la liberté m'effraie.