Chapitre 18

254 17 0
                                    

Je tombe lourdement sur mon lit en soupirant. Cette soirée était une mauvaise idée, je n'aurai pas dû y aller. La souffrance et la peine que j'ai vu dans son regard m'ont déchiré le cœur. C'était moi la cause de ça. Je vais vers mon miroir, je retire ma perruque et m'observe. Comment j'ai pu faire du mal à des gens que j'aime ? Je tombe sur le sol. Je n'ai pas le droit de pleurer, de regretter, je suis la seule et unique responsable. Je ferme les yeux et repense à ce moment là où j'ai tout gâché.

Six ans plus tôt...

— Ah vous êtes réveillée, je vais informer votre famille.

Comment ça réveiller ? Je ne suis pas morte ? J'ai mal partout, j'ai le cœur qui bat si vite. Je gémis. Une autre vie se présente à moi, j'ai envie de la saisir et aller de l'avant. Malgré ma voix rouée je crie le nom du médecin.

— Ne leur dites rien. Je vous donnerai ce que vous voulez mais faites-leur croire que je n'ai pas survécu.
— Mais...
— Je vous en prie ! Je ne veux pas y retourner.

Il fronce les sourcils puis il finit par accepter et il sort. Je pleure, j'ai mal, mal de faire de la peine à Anna, à mon bébé, à Ivan mais je le dois, je veux être égoïste. Le médecin revient.

— C'était vraiment triste de voir leurs souffrances mademoiselle, je ne comprends pas forcément votre choix mais je ne vais pas vous jugez non plus. Ils veulent voir le corps, je leur ai dit qu'il était impossible pour des raisons d'enquêtes sur votre suicide mais qu'il pouvait vous voir à travers la vitre. On va vous changer de chambre, j'ai une patiente qui vient de décéder, vous allez juste faire échange.

Je secoue simplement la tête.

Ça fait maintenant six ans que c'est arrivé mais je n'ai pas oublié. Chaque jour est une souffrance. Je suis retournée en Irlande pour voir ma mère, elle n'habitait plus dans notre appartement depuis ma disparition soudaine. Je suis une lâche, je ne me préoccupe pas de ce que les autres peuvent ressentir, je m'enfuie quand j'ai un problème au lieu de l'affronter. Comment une mère peut abandonner son propre enfant ? Mon cœur ne supporte plus son absence, j'ai plusieurs fois essayé de revenir sur ma décision mais c'était si dur. J'avais honte de moi. Et plus je repoussais plus les années passaient. Six ans. Je croyais vivre en paix, avoir la vie que je méritais mais j'étais seule et misérable. J'ai commencé à devenir folle, j'ai été suivi par une psychologue. Et aujourd'hui je me sens mieux qu'avant mais incomplète. Anna me manquait, mon bébé aussi et surtout Ivan me manquait gravement. J'ai donc décidé de les suivre, de savoir tout sur eux. Ivan était dans un sale état, il buvait à chaque fois que je le suivais. Sa situation m'inquiétait, je ne voulais pas qu'il sombre comme moi. J'ai alors décidé de le voir à ce dîner. Il est passé par plusieurs phase d'émotions, sa peine et confusion me compressaient le cœur. J'avais tellement envie de le prendre dans mes bras et le consoler en m'excusant pour ce que je lui ai fait mais je ne pouvais pas. J'avais peur. J'ai assez duré dans le mensonge, je vais me montrer. Je sais qu'ils ne me pardonneront jamais mais je veux qu'ils cessent de pleurer pour moi. C'est l'anniversaire d'Anna demain et toutes ces années ils avaient installé un rituel familial, ils dînaient tous dans un restaurant. Je m'endors avec cette boule au ventre. Tant pis, je vais y aller.

Le lendemain, j'attends avec tellement d'impatience impatience cette soirée que je tourne en rond dans mon appart. J'ai en parlé avec ma psy et elle a validé mon choix mais elle m'a averti des conséquences que je vais créer, des cœurs que je vais briser, des rejets... ce n'est pas grave, je ne suis pas la victime dans cette histoire. À 19 heures, je commence à m'apprêter, je porte mon jeans, un haut blanc. Je ne me maquille pas. Je souffle et prend mon sac. Je reste dans ma voiture devant le restaurant. Anna éclate de rire et Youri embrasse sa joue. Ivan se contente d'un sourire. Angelina est devenue une belle jeune femme maintenant, elle est fiancée. Victoria et Andreï sont aussi présents, Victoria tient Dimitri qui s'est endormi contre elle. Le stress commence à monter, j'ai peur de démolir de nouveau cette famille, ils ont l'air si heureux. J'essaie de garder mon calme. Je dois le faire. Je prends une grande inspiration et descends de la voiture. J'entre dans le restaurant qui est pourtant réservé pour eux. Un serveur s'approche vers moi.

— Je suis désolé madame mais le restaurant est réservé.

Je me décale de lui et tire le cou. Il n'est pas question que je me retourne.

— Veuillez sortir s'il vous plait.

Je le repousse, il insiste. Je hurle donc le seul nom qui me passe par la tête.

— Ivan !!!!!!!

Un cri puissant mais rempli de peine, de pardon, de désespoir. La salle devient subitement silencieuse. Je me décale du serveur. Les yeux de tout le monde sont braqués sur moi. Anna se tient la bouche en jurant.

— Putain de bordel !!
— Si c'est vous qui avez organisé cette mascarade, elle n'est pas drôle.

Ivan lance cette phrase à sa famille. Son père jure que ce n'est pas lui. Anna se lève. Ses yeux sont toujours dans les miens et ses larmes coulent sur ses joues.

— Erin ?

Ivan retourne encore la tête vers moi. Je sens qu'il se retient d'exploser de colère. J'avance encore, l'un des gardes me retient.

— Dites-moi que je rêve ! Mais c'est elle. Merde c'est Erin.
— Pardon...

Je craque quand Anna sanglote. Ivan se lève brusquement.

— Bon ça suffit ! Sortez là d'ici tout de suite !

Il avance vers ses gardes sans me regarder. Je panique, ils ne me croient pas surtout lui. En même temps il a raison. Je réussis à m'échapper des gardes et attrape la veste d'Ivan.

— Je sais que tu as encore la lettre que je t'ai laissé.

Son corps se fige.

— Comment s'est possible... ? Erin ? Mais...

Il sait très bien de quoi je parle, nous sommes que deux à avoir connaissance de cette lettre. Ivan explose de colère.

— Comment tu as pu me faire ça ?! Nous faire ça ?! Six ans Erin, six putains d'années !
— Pardon.

C'est tout ce que je peux dire. J'essuie mes larmes. Il retire violement mes mains de sa veste.

— Pardon ?! Es ce que tu te fous de moi ?! Tu ne sais pas à quel point j'en ai bavé de ta supposée disparition. Qu'est-ce que tu veux à présent de l'argent ?

— Non, je veux...
— Va-t'en d'ici !

Il s'approche de moi. Son regard est tellement noir que j'ai peur qu'il me frappe, je recule.

— Ne t'approches plus jamais de moi, ni de mon fils, ni de ma famille, je ne veux plus te voir. Je considère que tu es morte comme tu l'as toujours été !

Je tombe à ses genoux, j'attrape ses jambes en le suppliant mais il me soulève brusquement. Ivan me conduit dehors, il traverse la rue et me jette au sol. Je me fais mal au coude mais je ne dis rien.

— Ne reviens plus sinon je vais te mettre une balle dans la tête salope !

En colère, il me tourne le dos, je crie son nom. Soudain une voiture surgit de nulle part et le renverse. Je m'arrête choquée. Je crie de toutes mes forces. Non ! Ce n'était pas comme ça que cette révélation devait se terminer. J'aurai préféré que cette voiture me renverse moi. Je cours et prends sa tête contre moi.

— Ivan !

On me sépare de lui. J'essaie de me débattre, je suis rapidement jetée dans une voiture.

THE REAL BITCH I Où les histoires vivent. Découvrez maintenant