Les phares de police projettent une lueur inquiétante dans la rue qui s'obscurcit à mesure que le temps passe. J'ai appelé les secours aussitôt après avoir vu le corps.
Tandis que les policiers m'interrogent, je n'arrive toujours pas à assimiler ce qui vient d'arriver. En état de choc, je réponds à leurs questions par des monosyllabes.
Mme Ivery est morte, celle qui a veillé sur moi durant la dernière année. Quelqu'un l'a assassinée brutalement. Maintenant, je n'ai plus que Catalina. Je baisse les yeux et serre les poings. La réalité peut-être si cruelle parfois!
—Qui pourrait faire une chose pareille? dis-je dans un souffle, plus à moi-même qu'aux policiers.
L'arme du crime n'était pas sur les lieux, le coupable a dû s'enfuir avec.
—Nous allons trouver le salaud qui a fait ça, ne t'inquiètes pas, me rassure un des policiers. Maintenant, viens, nous allons te ramener chez toi.
J'embarque dans la voiture de police et lui dit mon adresse, de façon mécanique. Le trajet semble durer quelques secondes à peine, je me sens comme dans un rêve. Arrivés au manoir, le policier m'accompagne jusqu'à la porte, pour parler à mon père.
—Sacré maison..., siffle-t-il tandis que j'appuie sur la sonnette.
C'est ma sœur qui vient ouvrir, sa bouche ornée de rouge à lèvre s'ouvre en apercevant le policier.
—Papaaaaaaa! crie-t-elle. Je pense qu'Iris s'est fait arrêtée par la police!
Je ne l'entends même pas, encore trop sonnée. Mes pensées sont hantées par les images du corps inerte de Mme Ivery.
Quelques secondes plus tard, mon père passe le seuil de la porte, l'inquiétude se lisant sur son visage. Moi seule réalise que ce n'est qu'un masque. Comme à l'habitude, il est vêtu d'un veston noir chic et ses cheveux sombres sont soigneusement peignés. Bien que certaines personnes puissent percevoir cela comme de l'élégance, d'autres plus averties savent que ce n'est qu'une autre de ses techniques pour intimider.
—Iris! Que se passe-t-il? interroge-t-il sur un ton faussement alarmé.
—Bonjour, monsieur Brown. Ne vous inquiétez pas, votre fille n'a rien fait de mal, dit le policier. Permettez-moi d'ajouter que je suis un grand fan de ce que vous faites pour notre ville.
Il pousse un rire nerveux, semblant déstabilisé par l'aura de pouvoir se dégageant de son interlocuteur.
—Votre fille a été témoin d'une scène quelque peu sanglante, elle a été la première à découvrir le cadavre de la libraire Ivery. Nous l'avons interrogée, mais il se pourrait qu'elle ait à témoigner en cour, quoique c'est peu probable. Nous investiguons activement pour trouver le coupable, nous vous demandons de ne pas parler du crime avant que les médias ne le fassent. De toute façon, cela ne devrait pas tarder.
—Oui, je comprends. Quelle horreur, Iris, tu n'as vraiment pas de chance.
Il pose une main sur mon épaule et je ne peux m'empêcher de frissonner.
—En effet, c'est une scène assez inhabituelle dans notre ville plutôt calme. N'hésitez pas à m'appeler au commissariat si vous avez des questions supplémentaires, j'ai laissé mon nom et mes coordonnées sur ce papier.
—Merci, c'est très apprécié.
—Pas de problème, passez une bonne soirée!
Une fois la voiture de police disparue au loin, mon père reprend ses manières habituelles.
—Je t'avais dit de ne pas aller à la librairie, reproche-t-il avec sévérité.
—Et comment est-ce que tu voulais que je sache qu'il y aurait un meurtre, hein?
Avec rage, je me détourne et me réfugie à l'intérieur du manoir.
—Tout de même, si tu m'avais écouté, tu n'aurais pas eu à voir ça, réplique Erel en entrant à son tour.
—Laisse-moi!
Ma sœur, friande de drame, nous rejoint aussitôt.
—Qu'est-ce qu'il y a? demande-t-elle sournoisement.
—Rien qui te concerne, je grogne.
—Tu vas aller en prison?
—Non!
—Ah bon, dit-elle, une pointe de déception perceptible dans sa voix.
—Iris a simplement vu quelque chose qu'elle n'aurait pas dû voir... Si elle m'avait obéi pour une fois dans sa vie, explique mon père, narquois.
—Toujours à jouer les rebelles..., soupire ma soeur.
Ça y est, c'est la goutte qui fait déborder le vase. Je tourne la tête dans sa direction et la regarde droit dans les yeux.
—Pourquoi tu ne nous parlerais pas de ton examen de math aujourd'hui? Tu sais, celui où tu as copié sur ton voisin de gauche, Luc. Oh! Encore mieux, raconte-moi comment tu as renversé le seau d'eau du concierge simplement pour le faire chier. Et comment tu l'as regardé tout ramasser en riant, je débite à toute vitesse, lisant en elle comme un livre ouvert.
—Qui t'as dit tout ça!? s'exclame-t-elle, hébétée.
—Mélissa..., soupire mon père.
Tandis que ma sœur tente vainement de se justifier, je profite de ce moment pour m'éclipser discrètement dans ma chambre.
Une fois seule, je me laisse tomber sur mon lit, épuisée autant physiquement que mentalement. Chaque fois que j'utilise trop mon "don" dans une journée, cela me fatigue terriblement.
Avant même que je ne m'en aperçoive, je m'endors sur cette dernière pensée :
Mon ancienne famille aurait été là pour moi. Ici, je suis seule.
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La vérité qui détruit
Science FictionIris est une adolescente possédant un pouvoir très spéciale, qu'elle porte comme un fardeau. Plusieurs l'envient d'être la fille de l'homme le plus riche de la ville, mais personne ne soupçonne la cruauté de ce dernier. Lorsqu'un meurtre survient, I...