Chapitre 7

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08.12.2023


Et les deux semaines qui ont suivi se sont passées ainsi. J'ai accompagné papa à l'hôpital trois fois par semaine afin qu'il subisse les tests nécessaires pour savoir si son cœur et son corps supporteront l'opération. Pendant deux semaines, je me suis assise dans le fauteuil de cette chambre d'hôpital, armée de ma tablette et j'ai écrit. Pendant deux semaines, j'ai appris à connaître un peu plus le personnel hospitalier auprès duquel papa semble tellement à son aise.

Et, au bout d'une semaine, j'ai laissé ma tablette et mon stylet sur la petite table près de moi pour discuter avec eux. Au bout d'une semaine, j'ai commencé à répondre à docteur mufle et ses questions plutôt envahissantes. Au bout d'une semaine, j'ai commencé à découvrir un homme différent de l'étiquette que je lui avais associé le premier soir où l'on a discuté ensemble. Au bout d'une semaine, je me suis dit que si papa l'appréciait et qu'il était le meilleur ami de Willy, je me devais bien de fournir un effort, aussi infime soit-il.

— Je t'imaginais beaucoup plus jeune., me lâche docteur mufle en s'approchant de moi, déposant un café macchiato près de moi sur la petite table, comme c'est le cas depuis une semaine et demie.

— On me le dit souvent., rétorqué-je en rigolant. Moi, j'imaginais tous les chirurgiens vieux et aigris. Oh, mais pardon ! C'est le cas.

Il rigole, sirotant son café avant de tourner la tête vers mon père qui est s'est endormi depuis plusieurs minutes, les derniers résultats de ses tests prenant du temps à arriver.

— Au fait. C'est pour toi, petit ange.

Je grogne à l'entente de ce surnom que je lui ai pourtant demander d'arrêter d'utiliser plusieurs dizaines de fois. Alors je ne prends pas la peine de relever la tête vers lui et la pose dans ma paume, posant à mon tour mon regard sur mon père. Une enveloppe kraft apparaît soudain dans mon champ de vision. Elle est trop épaisse pour être remplie de papiers et trop fine pour contenir une boîte remplie d'explosifs. Je l'attrape avec méfiance et l'ouvre en l'éloignant de mon visage, provoquant les rires du médecin debout à mes côtés.

— Avec toi, je préfère rester méfiante.

À l'intérieur, je découvre un petit recueil de poème français qui me faisait de l'œil depuis un moment déjà.

— Willy m'a conseillé de t'offrir un petit cadeau. Histoire de me rattraper, puisque, selon lui, tu as la rancune tenace.

Je lève la tête vers lui en riant, un sourire immense étirant mes lèvres.

— Merci, docteur mufle.

— Tu ne peux pas te permettre de grogner à l'entente du surnom que je te donne si tu continues à utiliser le mien, tu sais.

Je lève les yeux au ciel et ne perds pas une seconde pour me plonger dans la lecture de ce petit bijou que je me retenais d'acheter avant d'avoir fini ceux qui m'attendent à la maison. Si c'est un cadeau, ma PAL ne pourra pas m'en vouloir.

À côté de moi, je l'entends lâcher un petit rire moqueur avant qu'il ne soit hélé depuis le couloir. Il s'excuse avant de prendre congé alors que mes yeux vont et viennent sur les vers des poèmes, savourant chaque mot qui crient les sentiments d'un cœur amoureux. C'est magnifique.

— Greg. Nous en avons fini pour aujourd'hui., chantonne le médecin de papa en revenant dans la chambre.

Papa émet un grognement digne d'un homme des cavernes et se retourne dans son lit d'hôpital. Lindsay, qui travaille en tant que femme de ménage chez mes parents, m'a confié, il y a quelques jours, que papa dormait plutôt mal ces derniers temps. Il lui arrive d'aller marcher dans les jardins jusqu'à pas d'heure ou de s'asseoir dans le canapé du salon, allumant quelques fois son ordinateur, feuilletant d'autres fois les albums photos de famille qui sont présents en quantité dans une vitrine scellée. Il ne regagne alors sa chambre que vers six heures du matin, à l'heure où le jardinier arrive sur la propriété. Ça m'inquiète. D'autant plus qu'il n'en n'a pas parlé une seule fois à son médecin.

By Lilibeth LockwoodOù les histoires vivent. Découvrez maintenant