Chapitre 9

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Elena

Mes yeux se posent sur l'homme qui me fait face, et je le reconnais instantanément. Même si notre dernière rencontre s'est déroulée dans l'obscurité, je sais que je n'oublierai jamais l'intensité de ce regard. Ses yeux bleus, froids comme la glace, me transpercent et me figent sur place. Dans une tentative désespérée de me protéger, je serre la serviette de bain avec tant de force que mes phalanges me font mal. Mon geste attire son attention sur l'ensemble de mon corps, et c'est comme s'il prenait soudain conscience de ma vulnérabilité. Sa barbe, taillée avec précision, accentue la tension de sa mâchoire qui se contracte ostensiblement. Une vague de panique m'envahit, mêlée à une détermination farouche de ne pas montrer ma peur. L'atmosphère devient étouffante. Chaque seconde s'étire par l'intensité de son regard et la douleur croissante de mes doigts crispés autour de la serviette.

— Je me repeterai pas, qu'est ce que tu fous là, putain ?! s'agace t-il

Je suis tétanisée. Sa voix rauque et sa prestance me troublent, il m'angoisse.

— Euh...

— T'as oublié comment on aligne deux mots ?

Je pique un fard.

— Je ne sav... Je n'ai pas décidé de venir ici, reprends-je d'une voix se voulant plus assurée.

— En tout cas, t'as décidé de prendre ta douche dans MA salle de bain et d'utiliser MA serviette.

Je pense que je ne peux pas virer plus au rouge. Je jette un rapide coup d'œil à la serviette qui entoure mon corps, gênée.

— Je suis désolée... on m'a dit de prendre une douche.

— J'en ai rien à foutre de ce qu'on t'a dit !

Il fait demi tour, ses pas lourds font vibrer le plancher de la chambre.

— Qui est le putain de connard qui l'a foutu dans MA piaule ? s'écrit-il

L'écho de sa voix résonne contre les murs, amplifiant chaque mot. Il s'est positionné dans le couloir pour mieux vociférer, et sa colère envahit l'espace. Le son rebondit sur les parois dans une cacophonie qui me paralyse. À travers ce tumulte, des rires étouffés me parviennent, renforçant mon sentiment d'humiliation et de peur.

Je ne sais pas ce qui me déstabilise le plus. Avoir été surprise en petite tenue dans la salle de bain d'un inconnu, ou la manière dédaigneuse dont il s'adresse et parle de moi.

Prenant mon courage à deux mains, je décide de sortir de la petite salle de bain. Mon regard se porte sur la chambre, je n'ai à aucun moment songé qu'elle pouvait être occupée. Tout est si neutre, aucun objet personnel, aucune photo, rien ne traîne. La différence de température me donne des frissons. Je surprends le grand tatoué en train de me reluquer, son regard glissant sur moi avec une intensité troublante. Ses poings sont serrés, les articulations blanchies par la tension, comme si ma simple présence dans son champ de vision le mettait hors de lui. Je sens une vague de malaise m'envahir, chaque muscle de mon corps se raidissant sous l'effet de son hostilité palpable. Cette confrontation silencieuse me laisse à la fois vulnérable et révoltée, une boule d'angoisse se forme dans mon estomac.

Des pas précipités se font entendre. Le charmant Waren fait son entrée, tout penaud. D'un même mouvement, nous nous tournons vers la porte de la chambre. Je m'octroie le luxe de vraiment regarder le nouveau venu. Jusque là, j'étais tellement focalisée sur ce qu'il se passait autour de moi que je n'ai pas pris le temps de détailler qui était avec moi.

La différence de gabarit entre les deux hommes est nette. Celui qui semble être le chef de leur bande de fous, arbore un physique athlétique et imposant. Sa stature est grande et ses bras musclés sont ornés de tatouages qui s'étendent sous son t-shirt moulant, suggérant un corps sculpté comme dans la pierre. À ses côtés, le dénommé Waren, bien que plus petit, affiche un corps musclé mais fin. Sa peau mate contraste joliment avec son marcel beige qui révèle quelques tatouages épars sur ses épaules. Cette juxtaposition de force brute et de finesse attire mon regard. Il éveille une curiosité presque admirative pour ces deux hommes aux apparences si distinctes. Dans d'autres circonstances leur simple vue serait un plaisir pour les yeux, mais pour le moment, ils m'inspirent uniquement de la crainte et de l'appréhension. Je me sens vulnérable dans ma petite serviette, sans avoir pu me changer.

Black Shadow : l'écho des secretsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant