Chapitre 24

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Devon

Une fois de plus, je ne sais pas ce qui me prend de lui demander ça. Mon cœur a raté un battement lorsqu'elle m'a intimé d'arrêter de tirer sur ma clope comme un forcené. La dernière personne à avoir eu ce genre d'intérêt pour moi m'a quitté il y a bien longtemps. La nostalgie des années passées est sur le point de m'envahir, je me ressaisis in extremis avant de plonger trop profondément dans mes souvenirs.

Son avis m'importe peu. Mais se pourrait-il qu'elle se soucie un tantinet de moi ?

Que de contradictions!

D'aussi loin que je me souvienne, inhaler la fumée m'a toujours apporté un certain apaisement. Dès mes quinze ans, c'est devenu un réflexe : respirer, fumer, manger, baiser. Ce dernier point me ferait d'ailleurs vraiment du bien.

Mes yeux suivent le mouvement de ses cheveux qui s'envolent sous la légère brise de fin de soirée. Les notes d'agrumes de son savon, que j'apprécie tant, me parviennent alors que j'essaie de maintenir une distance de sécurité. Il m'en faudrait peu pour succomber une nouvelle fois à l'appel de ses lèvres.

Je la regarde avec malice. Ce que je lui impose n'est pas anodin. Elle tient la vie d'un homme entre ses mains. Pour autant suis-je vraiment capable de le laisser impuni ? Il a osé toucher à la fille du Pres', puis à Elena. Y repenser fait remonter ma tension. Ses yeux oscillent entre les miens puis ma bouche. Sa langue passe doucement sur sa lèvre inférieure. Je sens le désir qui l'anime, mais elle garde toujours le silence. Ce baiser, elle doit me le donner, je ne le lui prendrai pas. J'ai besoin de savoir qu'elle en a autant envie que moi. J'avance tout de même vers elle, réduisant l'écart qui nous sépare.

— Alors, Trésor ?

— Ne m'appelle pas de cette manière.

— Ne change pas de sujet.

— Ne m'assène pas d'ordres.

Je m'esclaffe devant sa répartie. Elle garde son sang-froid et botte en touche à chacune de mes tentatives. Vaincu, je remets une distance entre nous et commence à repartir vers la porte arrière. Nous sommes suffisamment restés à découvert.

Alors que je passe à côté d'elle en la frôlant délibérément, elle retient mon avant-bras.

— Ne fais pas ça. Je.. OK. C'est OK, un baiser.

Lui faisant face, mes yeux remontent le long de sa main, puis de son bras pour rencontrer ses prunelles vertes qui brillent dans la nuit.

— Trésor, lorsque tu m'imploreras de t'embrasser, ça sera parce que tu en auras envie. Tu me supplieras. Oublie ce type.

Hébétée, elle me regarde, surprise par mon changement d'attitude. J'aurais pu profiter d'elle. Je l'aurais fait avec n'importe quelle nana. Mais plus le temps passe et plus je me rends compte que je ne la considère pas comme n'importe quelle fille. C'est plus fort que moi. Et bordel ce que ça me fait chier.

Nous rentrons dans le bar et je m'assure de refermer la porte de derrière à clé en doublant la sécurité d'un cadenas. Hors de question que quelqu'un puisse entrer par ici, ou qu'Elena puisse se faire la malle maintenant qu'elle connaît cette nouvelle issue de secours.

Ne prenant pas la peine de la raccompagner jusqu'au bar, je m'empresse de monter m'enfermer dans ma piaule. Frustré, et terriblement tendu, ce n'est pas ce soir que je vais arriver à évacuer la pression. Sortant mon téléphone de la poche arrière de mon jean, je commence à écrire à Kent un message pour une nouvelle mission. C'est inconcevable de laisser cette bande de connards s'en tirer. Ils vont tous trinquer, ça leur apprendra a s'imaginer qu'ils peuvent agir en tout impunité sur notre territoire.

Black Shadow : l'écho des secretsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant