Chapitre 11 : Adagio

2 0 0
                                    

Cette semaine a été si longue que je ne pensais pas voir vendredi arriver. Nous sommes tous à la table de la cuisine pendant qu'Evana joue dans le salon, Alvia manque à l'appel. Elle n'a pas encore fini le travail et je ne sais même pas si elle est toujours d'accord pour venir. Nous nous sommes ignorés toute la semaine, aucun contact, presque aucune parole. La voir partir avec lui m'a semblé tout naturel mais quand je l'ai vue arriver avec lui le lendemain matin la réalité m'a frappé en plein visage.

J'ai continué à la ramenée chez elle tout les soirs, sans un bruit, nous faisions le trajet en restant chacun de notre côté. Fini les questions à tout bout de champs. Fini le moulin à parole à ma droite. J'ai été déçu qu'elle n'essaie pas de savoir ce qu'il se passait dans ma tête. Je ne devrais pas ressentir de tel émotions vis-à-vis d'elle. Je ne veux pas me rapprocher d'elle. Elle a quelqu'un dans sa vie qui semble très bien. Elle avait l'air heureuse en arrivant ce matin-là. Si elle veut foutre la merde dans son couple, ce sera sans moi. J'espère me convaincre de rester loin d'elle, même si je sais que je n'y arriverai sûrement pas. Quelque chose m'attire irrémédiablement vers elle.

-  Adagio, tu nous écoutes ? me demande Massime

Mon cerveau s'était complètement déconnecté de la réalité.

-  Oui, désolé, j'étais dans mes pensées.

- Tu ne vas pas la chercher ? m'interpelle Eliaz.

-  Elle ne viendra pas.

Il est plus que l'heure pour moi d'aller la chercher, mais je n'arrive pas à m'y résoudre. Je n'ai pas envie qu'elle vienne, mais en même temps je ne peux pas faire de mal à ma fille qui l'attend de pied ferme depuis des heures.

- Tu as encore tout fait foirer, Adagio ? m'accuse Eliaz. 

- Elle a surtout un copain.  Je ne peux pas faire foirer quelque chose qui n'arrivera pas.

Mon téléphone vibre sur la table.

Alvia.

Les garçons me font signe de mettre le haut-parleur, je m'exécute et attend qu'elle parle.

-  Tu vas te bouger à venir me chercher. Il fait super froid. râle-t-elle, plus désagréable que jamais.

- J'arrive, ne bouge pas.

Je raccroche et regarde les garçons, un sourire plein de sous-entendu étire leurs lèvres. Je ne voulais pas qu'elle vienne, et me voilà à dire au revoir à ma fille et à enfiler mes chaussures en quatrième vitesse. Il m'a fallu une seule phrase de sa part pour me réveiller et me faire démarrer plus vite que mon ombre.

Qu'est ce qui cloche chez moi ? 

J'arrive rapidement devant la boutique, elle m'attend les bras croisés en dessous de sa poitrine. Elle remarque la voiture et court pour venir s'installer sur le siège passager. Ses mains frotte activement ses bras dans l'espoir de ce réchauffer un peu.

-  Mets le chauffage à fond. Tu allais me laisser mourir de froid.

-  Je ne pensais pas que tu voulais toujours venir. marmone-je dans mes dents.

- Tu as décidé de me faire la tête, je l'ai bien compris, mais ta fille n'a rien avoir avec ça. Ne te fais pas d'illusions, je viens pour elle, pas pour toi. 

-  Je n'en doutais pas, tu sais.

- Maintenant continue de m'ignorer. Tu le fais très bien. 

Je me tais et nous ramène à la maison. Elle est fâchée, très fâchée même. Je ne compte pas lui reparler alors tant mieux, ce sera plus facile pour moi si elle continue ainsi. Mes yeux vont instinctivement vers la droite. Elle a les cheveux détachés, un tailleur de couleur blanc aujourd'hui. Elle ne porte pratiquement que des tailleurs deux pièces.

Elle est belle, trop belle pour être vraie.

Même avec son visage tiré par la fatigue, une beauté naturel habille ses traits délicat.

Je n'ai même pas le temps d'ouvrir la porte de l'appartement qu'Alvia me passe sous le nez pour entrer. Elle est déjà dans le salon avec Evana en train de jouer à la Barbie quand je m'installe à la table avec les garçons. Ma tête posée dans mes mains, j'attend que l'un d'eux prenne la parole.

-  Vous vous êtes embrouillés ? me demande Massime

- Je ne lui ai pas parlé de la semaine. Elle est fâchée.

- Donc tu as encore tout fait foirer. J'avais raison. s'acclame Eliaz, si fort que je lui fais signe de descendre d'un ton avec ma main.

- Elle a un copain, Eliaz. Ce n'est pas raisonnable de me rapprocher d'elle.

- Si elle est ici et pas avec son copain, c'est qu'il y a une raison, tu sais. essaye de me rassurer Massime.

Si tout se passait bien avec lui, elle ne serait pas ici, c'est vrai, mais d'un autre côté elle aurait rompu avec lui. Elle a un fort caractère, je ne doute pas qu'elle soit capable de rompre avec lui au moindre écart. Je ne sais pas depuis combien de temps elle est avec, mais peu importe, c'est le comportement qu'elle a aujourd'hui qui compte. Elle ne rompt pas avec lui malgré le fait qu'elle préfère passer du temps ici. En la voyant regarder plusieurs fois dans ma direction, je comprend qu'elle n'est peut-être pas là uniquement pour Evana.

- Tu dois te lâcher, Adagio. me conseil Eliaz.

- A quel prix ? 

—   Celui d'un peu de bonheur ? Ce n'est pas parce que un jour elle peut partir et te laisser que tu n'as pas le droit de profiter quand elle est là. essaie de me rassure Massime.

- Je ne veux plus souffrir et je ne ferais jamais ça à Evana.

- Pour une fois je vais dire un truc intelligent, alors écoute moi ! Elle est super fâchée contre toi, pourtant elle est venue pour jouer à la Barbie avec ta fille après une longue journée de travail. Ouvre les yeux, elle ne fera pas de mal à Evana. me réprimande Eliaz avec un sérieux qui ne lui ressemble pas.

Il a raison, dans le fond je sais qu'elle est trop gentille pour faire du mal à Evana mais cette situation pourrait toucher ma fille. Je ne veux pas lui faire vivre mes problèmes d'adulte. Elle n'a pas besoin de ça en plus dans sa vie. Les problèmes d'Alvia semble beaucoup plus importants que les miens. Je ne connais rien son histoire mais je le vois dans ses yeux. Être ici ressemble à une bouffée d'oxygène pour elle. Mais malgré ça, je ne peux pas me permettre de laisser ses problèmes retomber sur ma fille, elle ne peut pas continuer à s'immiscer dans notre vie comme elle le fait, tant qu'elle n'a pas tout mit à plat de son côté.

La sonnette de l'entrée me coupe dans ma réflexion, notre commande est arrivée. Alvia prend Evana dans ses bras et se dirige vers l'évier de la cuisine. Elle l'aide à se laver les mains avant de laver les siennes.

Les deux filles viennent s'installer à leurs places. Eliaz revient rapidement avec la commande, c'est lui qui régal cette semaine.

- La prochaine fois, c'est moi qui paye. nous impose Alvia.

- Avec plaisir, on fera la plus grosse commande que tu n'as jamais vue. lui répond Eliaz. 

La prochaine fois ? Malgré mon comportement, elle compte revenir ici ? Ça me touche qu'elle pense à ma fille avant notre situation et ça en dit beaucoup sur sa façon d'être. Comment je vais réussir à éloigner cette femme de ma vie ?

Je devrais peut-être écouter les garçons et lui laisser une chance ?

Je suis en train de devenir complètement maso. Cette situation va forcément me faire souffrir et avoir un impact sur ma fille, je ne peux pas faire ça. Pourtant, plus je la regarde et plus je me demande comment je vais faire pour garder cette bombe prête à exploser loin de moi. Ce bonheur n'est qu'éphémère, nos problèmes nous rattraperons bien vite et tout s'écroulera autour de nous.


Libère moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant