Chapitre 38 : Effraction

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- Ça fait une heure qu'on cherche, Elena ! Cria discrètement Emy, au bord de la crise de nerfs.

- Tu veux qu'on s'en aille peut-être ?! S'exclama Elena sur le même ton, tout en chuchotant.

Beaucoup de membres du gang passaient dans les couloirs, non loin de nous. Emy, visiblement impatiente, commençait à s'agiter, ce qui agaçait Elena.

Les membres des Black Ravens étaient tous habillés de la même manière, leurs tenues sombres renforçant leur allure menaçante. En montant un autre étage du bâtiment, tout en restant discrètes, nous entendîmes des bruits non loin de nous. La douleur de ma plaie s'intensifiait à cause des marches que nous venions de monter.

En arrivant encore à l'étage du dessus, il n'y avait plus personne. Une seule pièce était allumée. Elena s'approcha discrètement pour voir ce qui se passait à l'intérieur. En jetant un coup d'œil à travers la porte entrouverte, elle découvrit Lenny, assis à son bureau, la tête dans les mains.

La brune prononça "il est la" sans faire entendre sa voix. Elle baissa la tête vers son téléphone, quand je sentis le mien vibrer dans ma poche.

De Elena
> Il faut qu'on le fasse sortir de son bureau.

De Raphaëlle
> Ok, mais comment on fait ?

De Elena
> On va trouver un truc. Il faudra faire du bruit ailleurs pour qu'il pense que quelqu'un est présent.
Ou alors, on lui jette Emy sur la gueule, il s'endormira vite.

Son message m'arracha un rire, que je dissimulai discrètement.

De Raphaëlle
> J'pense qu'on va s'abstenir pour la deuxième option. Je peux l'occuper si tu veux.

La brune leva la tête de son téléphone et me regarda un instant avant de tapoter à nouveau sur son écran.

De Elena
> Tu t'en sens capable ?

J'éteignis mon téléphone et leva la tête vers Elena, qui fit de même. J'acquiesçai, et elle hocha la tête à son tour.
Je m'avançai doucement dans le couloir à gauche du bureau de Lenny, essayant de ne pas me faire repérer. En arrivant au bout, je tournais cette fois à droite, faisant en sorte d'être assez loin de Lenny, mais assez proche pour qu'il entendre le bruit.
Dans ce bout de couloir, il y avait un grand tableau, un plan de l'étage du bâtiment, comme à tous les autres étages que nous avions traversé.
Je pris alors le cadre entre mes mains, et le jeta à terre. Le verre se brisa contre le sol. Rapidement, je retournai dans le couloir où étaient Elena et Emy, avant que Lenny ne sorte du bureau.
Ce dernier sortit quelques instants plus tard de son bureau, s'avançant vers le couloir ou le cadre était "tombé". Je le suivis discrètement, et Elena me lança une bouteille de chloroforme pour endormir Lenny.
Le roux était désormais dos à moi. J'en profitai pour m'avancer et imbiber un bout de tissu du liquide, et colla ce dernier sur le visage de Lenny. Il se débattit violemment, avant que tous ses muscles ne lâchent dans mes bras. Étant un peu loin des filles, je ne pris pas le risque de crier leurs noms. Je pris mon téléphone et appela Emy.

- C'est bon, déclarai-je discrètement, il est endormi. Venez m'aider.

Je raccrochai rapidement, et Emy et Elena me rejoignirent. Emy porta Lenny, aidée par la brune. Pendant ce temps, je leur servait d'éclaireuse, évitant ainsi que l'on se fasse repérer.
Nous arrivâmes rapidement à la voiture. Les filles installèrent Lenny dans le coffre, et tout le monde reprit sa place dans le véhicule.
Elena me sourit, et je lui rendis gentiment son geste. La brune s'approcha soudain de moi, et déposa un baiser sur ma joue.
- Bien joué, chérie.

Emy pouffa a l'avant de la voiture, pendant que mon coeur manquait d'exploser dans ma poitrine.
Et tu oses dire que tu ne l'aimes pas, hein.
Je suis pas habituée à ce genre de contacts, ferme la.

La main de la brune glissa dans la mienne, ce qui me fit déglutir. Mais à quoi elle joue ?
Elle posa ensuite sa tête sur mon épaule, son souffle chaud caressant mon cou. Je vais faire un infarctus.
Emy, qui nous regardait dans le rétroviseur, écarquilla les yeux en voyant Elena posée contre moi, sa main dans la mienne.

- Ne fais pas un seul commentaire, ou je te scotche la bouche en arrivant, siffla Elena en fermant les yeux.

- C'est nouveau, ce genre de contacts, Smith ? Gloussa la rousse.

- Ta gueule, cracha sèchement Elena en se redressant.
Je soupirai, tentant d'apaiser les battements de mon cœur. Elena, pendant ce temps, tourna la tête vers la vitre, admirant les lumières de la ville danser dans la nuit.
Sors moi que tu regrettes, et je te fais avaler ta main, bouffonne.

Je mis du temps à comprendre l'effraction que je venais de commettre dans un gang ennemi, et commençai a remettre mon geste en question.
J'enchaînais les missions à droite à gauche, sans arrêt, et sans savoir quelle était la raison principale de mon enlèvement et de ma venue dans ce gang.
Ce n'est sûrement pas parce que Lévis voulait m'introduire dans son gang. Non. Ça n'est pas la véritable raison. Même si je me sentais moins seule qu'au début de mon "séjour" chez les Bloods, un tas de questions s'emmêlaient dans ma tête. Est-ce que j'ai un lien avec ce monde depuis longtemps ?
Ton père y est mêlé, couillonne.
Mon père. Pourquoi ne m'appelait-il pas ? Avait-il peur pour moi ? Savait-il ou je me trouvais ? Pourquoi m'a-t-il caché une telle chose ? Pourquoi ne m'a-t-il pas parlé du monde auquel je suis confrontée, indirectement, depuis toujours ?
Pour me protéger.
Te protéger, oui, ça doit être ça...ta naïveté finira par te tuer.
Je secouai la tête, me refusant cette pensée. Je ne suis pas naïve. Je ne connais simplement pas le monde dans lequel je suis tombée.
Non. Je ne suis pas tombée, comme par hasard, dans ce monde. C'est impossible. Je ne me sentais jamais à ma place, à part aujourd'hui, entourée de criminels, qui ont pourtant l'air purs. Mon père ne m'a jamais parlé de cette facette de la vie, de cette facette de mon monde.
Ce monde.
Je n'y connaissais rien, et pourtant, tout le monde semblait me connaître.
Me connaître plus que je ne me connais moi-même.
Il me fallait des réponses. Je ne peux plus attendre.
Et si je n'en ai pas de mon père, j'en aurai de quelqu'un d'autre.
Je veux des réponses.

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