32 : Mon grand-père bien aimé

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   Le violon a toujours été important dans sa vie, surtout après que Marc son meilleur ami soit parti à l'autre bout du pays. Après ça, elle ne parlait plus avec aucun jeune de son âge et ne sortait plus que pour ses cours de violon. Oui, à chaque fois qu'elle se sentait triste, en colère ou bien perdue, cet instrument l'a d'une certaine manière toujours aidée. Les airs de musique qu'elle est capable de jouer avec, qu'il soit doux et apaisant ou bien endiablé et provoquant, l'

   Et encore plus aujourd'hui, dans ses moments durs de sa vie où elle est toujours à ça de tomber dans une dépression et une envie de tout abandonner. Chaque jour, Emeraude doit trouver une nouvelle raison de se lever, chaque jour l'adolescente doit se dire qu'elle ne peut pas tomber, qu'elle n'a pas le droit à l'échec et sa passion pour cet instrument à cordes favorise sa joie de vivre, mais qui peut basculer à tout moment. L'adolescente sait que ça ne tient qu'à un fil et que ce fil est fragile. 

   Ce fut dans ses pensées peu joyeuses que la jeune adolescente entendit Milly entrer dans la salle verte. Emeraude s'arrêta de jouer sachant très bien qu'elle ne viendrait pas avec de bonnes nouvelles. Cela se vit très vite sur son visage assez expressif. Pour endosser l'énervement ou la tristesse que serait cette annonce, Emeraude décida de s'asseoir.

  Milly, elle préféra rester debout.

-  Je sens que je ne vais pas aimer ce que vous allez me dire.

-  Le roi...

-  Quoi, le roi ? demanda-t-elle un peu inquiète

-  Il est malade, très malade, dit-elle tristement en s'asseyant à côté d'Emeraude.

-  Qu'est-ce que vous voulez dire par très malade ? Vous voulez dire mourant ?

-  Je veux dire qu'il vous attend dans ses appartements.

                                                                                                                     *

   L'adolescente n'était encore jamais entrée dans la chambre du roi, comme lui ne l'était jamais entré dans la sienne. Mais ce qu'elle savait, c'était que c'était sa futur chambre pour bientôt et même pour très bientôt si sa santé empirait.

   Au premier étage au fond du couloir, devant un grand miroir ornementé, il s'y trouvait cette chambre royale. Emeraude savait que cela serait différent, mais jamais elle n'aurait imaginé aussi différent.

   En plein milieu de la pièce se trouvait une grande boîte en verre où était couchée le roi, il y avaient d'énormes fenêtres couvertes par des rideaux rouges, les murs bruns étaient tapissés de peinture 3D de plusieurs shujaa différents et le sol brun couvert d'un grand tapis rouge.

   Et il n'existait pas d'autres meubles. Cette grande pièce était assez vide. Malgré le fait qu'il y avait deux miroirs. Un petit miroir qui devait sûrement donner à la salle de bain et un autre grand miroir qui était accessible après quelques marches d'escalier.

   Mais c'était réellement la grande boîte en verre dans laquelle son grand-père était couché qui la choquait le plus.

"Qu'est-ce que c'est ça" pensa-t-elle.

   Ici, dans cette pièce ni Milly ni aucun garde n'était accepté. Elle était réservée uniquement au roi et potentielle au membre de sa famille à qui il donnait l'autorisation d'y entrer. De ce fait, Emeraude ne savait pas trop comment l'aborder.

-  Approchez ma chère, dit-il soudainement d'une vieille et fragile voix.

   La violoniste s'approcha doucement du roi.

-  Comme vous pouvez le constater, ma santé me fait défaut, car je me fais vieux. Les gens diront par gentillesse que je suis malade, mais il faut se mettre à l'évidence que j'ai 378 ans et que je ne suis pas éternel, dit-il très lentement et faiblement.

-  Si vous avez réussi à vivre pendant toutes ses années, c'est que vous tiendrez encore pleins d'autres, rassura Emeraude qui se rapprocha encore plus de lui.

-  J'ai tout perdu. Mes parents, mes frères et sœurs, oncles et tantes, cousins et cousines, nièces et neuveux, femme et enfants. Je pense que j'ai fait mon temps, dit-il en toussotant.

-  Non. Il vous reste encore moi.

-  Si je pars, il ne vous restera personne...plus personne pour vous parler de votre grand-mère ou bien même de mes enfants. Oh mes doux enfants. Ils sont tous partis, fit remarquer le roi fragile.

   Emeraude s'assied sur le sol à côté de la boîte en verre afin d'observer son grand-père qui fermait les yeux en imaginant tout son passé.

-  Racontez-moi, alors. Qu'est-ce qui s'est passé lors de la crise ?

-  Le peuple était près à faire une révolution à cause de ma fille aînée. Elle allait devenir reine, mais elle a choisi de tous nous trahir. Cela a créé une crise, une telle crise qu'il a fallu se battre pour rétablir la paix, mais cela a engendré des conséquences graves et irréversibles. Mes 22 enfants y ont perdu la vie dans cette bataille. Et heureusement que j'y ai gagné une petite-fille. Qu'est-ce que le royaume serait sans vous ? dit-il en versant une larme sur sa joue

  L'adolescente comprit alors que l'instant devenait grave, car si même ce vieil homme pourtant insensible versait une larme devant elle, c'était qu'en fin pour une fois il se décidait à se comporter comme un vrai grand-père devant elle.

-  J'ai 21 oncles et tantes qui sont morts pendant la crise, mais comment ? Et ma grand-mère alors ?

- Mira n'avait que 240 ans. Elle était si jeune, mais d'une santé si fragile et lorsqu'elle a appris pour vous, que votre mère allait donner naissance à une créature hybride. Même moi j'ai cru que je n'allais pas survivre. Le jour d'après, Mira n'a plus jamais ouvert les yeux. Lorsque la reine est morte, la princesse héritière aurait dû monter sur le trône, mais...et...tout ça a fini par créer une guerre civile et puis...tous mes enfants un par un...pour finir par...cette traîtresse...et je me suis retrouvé seul, dit-il toujours d'une fragile, voir triste.

  Emeraude ne savait pas s'il faisait exprès d'émettre peu d'informations sans les reliés ensembles où s'il était réellement à la fin. Et tout ça lui faisait peur. Que ferait-elle sans lui et surtout qu'est-ce qu'elle ressentirait si demain sonnait sa fin ?

-  Il y a tellement de mauvaises choses que j'ai faites et que vous devriez faire lorsque vous prendrez ma place. Je pense que c'est le travail le plus dur qu'un monarque ait à faire envers son enfant, déclara le roi toujours faiblement.

-  Quoi ? Qu'est-ce que vous voulez dire ?

-  Laissez sa place.

   Le cœur d'Emeraude s'arrêta presque sachant ce qu'il essayait de lui dire. Elle n'avait pas la force de l'accepter la maintenant.

-  Je ne...

-  Je sais que vous ne voulez pas que je parte simplement parce que, comme votre mère, vous n'avez pas envie de devenir reine.

-  Je n'ai pas envie de me retrouver sans famille. Je ne veux pas que vous partiez, déclara Emeraude en versant une larme.

   Son grand-père rigola difficilement à cette simple révélation, mais qui avait pris du temps à l'adolescente à se l'avouer. Oui c'était sa seule famille et non elle ne voulait pas qu'il parte.

  Le roi se retourna afin de voir sa petite-fille dans les yeux.

-  Je ne suis pas sur mon lit de mort, ma chère enfant. Il me reste tant de choses à vous apprendre, alors ne gaspillez pas vos larmes pour rien. On ne pleure pas un monarque, on se réjouit pour le suivant. 

Le jour où tout a changéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant