Chapitre 12 ***

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Je m'accroche à son bras et l'incite à quitter les lieux, sous les brouhahas des curieux et les paroles réconfortantes à notre passage.

Arrivés à ma yourte, mon chien a senti son ami et couine d'impatience derrière la porte, tandis que je tente de l'ouvrir malgré mes tremblements.

La joie de Stark s'éteint quand il perçoit la tension ambiante. Il gémit, faisant les cent pas autour de moi pendant que je referme la porte derrière nous. Je lui demande de regagner son panier. Il obéit, suivi par Glaçon.

Ulrik, silencieux, s'assoit sur la banquette.

Il est sans doute choqué, peut-être même qu'il souffre de ses blessures.

Dans une serviette éponge, j'enroule de la glace trouvée dans le mini frigo pour la poser sur l'épaule d'Ulrik. Des bleus y apparaissent déjà, d'une vive couleur violacée visible sur les rares parcelles de peau non tatouées à cet endroit. Sa pommette gonflée et légèrement entaillée commence à saigner.

Je n'ose pas rompre le silence entre nous, malgré toutes les pensées qui m'assaillent tandis que, debout devant lui, je nettoie le haut de son visage. J'ai rarement été aussi proche de lui. Ma main posée sous sa mâchoire, l'autre tamponne sa joue blessée. Je suis si désolée qu'il se trouve dans cet état. Lui, ne me quitte pas des yeux.

— Je suis tellement désolée Ulrik, soufflé-je. Je sais pas quoi dire.

Son regard me rassure et me console. Je lui souris, je ne peux faire que ça.

— C'est moi qui suis désolé d'avoir mis du temps à intervenir. J'étais avec Glaçon dans l'allée au croisement. Je vous ai vu traverser, et je suis à peu près certain que ce connard m'a regardé en passant ! T'avais pas l'air bien, mais d'un coup t'étais dans ses bras alors j'ai cru que tu...

Il sursaute d'un coup, pris d'une douleur sur sa joue. Le désinfectant est peut être un peu fort.

— En tendant l'oreille, continue-t-il le visage crispé, j'ai compris ce qui se passait.

Pudique, il baisse les yeux, tentant de dissimuler ses larmes et c'est là qu'il remarque mon vêtement déchiré. Lentement, il approche sa main, prêt à s'arrêter au moindre son qui sortirait de ma bouche. Je le laisse faire, en apnée.

Il soulève le tissu du bout des doigts et sursaute, pris de stupeur.

— C'est lui qui t'as fait ça ? s'insurge-t-il.

Je constate la plaie sur mon ventre. Rien d'impressionnant, une éraflure doublée d'une contusion.

— Oui... un peu. Stark m'a griffé en jouant et Tony a n'a fait qu'appuyer sur la plaie, expliqué-je en rabattant mon tee-shirt.

Ulrik se lève d'un coup.

— Viens, je vais t'emmener à l'hôpital et après on ira au commissariat, tu vas voir, on va...

— Ulrik ! l'interpellé-je. Pas maintenant. Pas ce soir. Je vais bien. Il ne s'est rien passé. Il a essayé, t'es arrivé. Fin de l'histoire.

Consciente que la honte ne devrait être que sur Tony, pour le moment, je ne ressens rien de plus que l'envie de protéger d'autres filles qui n'auraient pas la chance d'avoir un Ulrik à leurs côtés. Demain est un autre jour, et je ne compte pas laisser Tony s'en tirer, mais la tournure de cet événement le rend moins traumatisant que je ne le pensais. Et maintenant j'ai seulement besoin de repos.

— T'as eu énormément de chance, souffle-t-il. J'étais là. Il a voulu profiter de l'ascendant qu'il avait sur toi. Je ne suis pas du genre à agir comme ça mais... J'ai pris plaisir à le frapper. C'est la première fois que j'ai eu autant envie de faire du mal à quelqu'un. Quand je pense qu'il aurait pu te ...

Son soulagement et son stress s'échappent dans des bavardages auxquels il ne m'a pas habituée. Je le laisse s'exprimer, accueillant ses mots et tout le bien qu'ils m'apportent, parce que finalement, ils n'expriment qu'une chose : sa bienveillance à l'égard des autres.

Je finis par me saisir de son visage pour l'arrêter et le forcer à ancrer ses yeux aux miens :

— Je vais bien. Grâce à toi. À tous points de vue.

Mes derniers mots me font rougir. Le moment a fait naître chez moi une audace nouvelle. Aura-t-il compris la portée de ce que je viens de lui dire ?

Nos discussions dévient sur des sujets plus légers et c'est tout ce dont j'avais besoin, me laisser emporter par la douceur du moment. Parenthèse calme avant les tumultes du lendemain.

Après LuiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant