Chapitre 16 **

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Plus les jours avancent, plus je sors de ma torpeur et plus je profite des plaisirs de la vie.

Nos discussions à cœur ouvert et nos instants partagés créent ce lien profond entre nous, en six semaines c'est une véritable intimité émotionnelle qui s'est installée. Cette proximité, ce plaisir d'être ensemble se transforme en besoin de se voir et d'être l'un contre l'autre.

J'ai conscience que quoi qu'il en dise, la patience d'Ulrik aura ses limites. Lui aussi a besoin d'amour et d'une personne qui le comble. J'ai tellement peur de ne pas être à sa hauteur.

Ces pensées m'obsèdent aujourd'hui.

Sans doute parce que j'emballe une partie de ma vie dans des cartons et que cela me stresse.

Non, je ne déménage pas encore. L'appartement que j'avais en vue m'est passé sous le nez, mais cela ne m'empêche pas d'emballer les affaires de Fabien, comme prévu.

Marina ne devrait pas tarder, Ulrik doit passer nous prendre, et Majid est en retard pour récupérer les affaires de Fabien, ça fait beaucoup pour une seule Amélia. La superbe organisation de mon samedi tombe à l'eau et je me noie dans un verre d'eau cet après-midi.

Tandis que je scotche le carton avec précaution, Stark aboie pour accompagner l'interphone qui retentit. Majid, enfin.

Réalisant que je suis loin d'être prête, j'entrouvre ma porte et cours mettre une jupe. Alors que je finis de me pomponner devant le miroir du dressing, j'entends Stark sautiller dans l'entrée.

— Je suis dans la chambre, rentre ! hélé-je.

Mon corps tressaute et se tend quand, à travers le miroir, je comprends que ça n'est pas Majid mais Ulrik qui vient d'arriver. Bêtement figée, je n'ose pas me retourner alors qu'il a déjà perçu mon reflet à l'air désemparé. Gentleman, il s'apprête à rebrousser chemin, mais je l'arrête pour le serrer contre moi et le rassurer.

La vérité c'est que le voir dans ce décor me parait bien plus normal que je me l'étais imaginé.

Sa main sécurisante dans la mienne, j'ose lui faire une visite des lieux. Une douce chaleur inonde tout mon être quand je réalise combien je me sens à l'aise avec lui.

C'est finalement avec quarante minutes de retard que Majid arrive enfin pour récupérer son carton. Dans la rue avec lui, à discuter pendant qu'il l'attache à l'arrière de sa moto, je perçois les coups d'œil curieux qu'il lance de temps à autre sur Ulrik, ou sa main posée sur ma hanche. Que peut-il bien penser ? À priori rien de mal, si j'en juge par son sourire tendre.

Majid me remercie, et je le regarde s'en aller, les précieuses affaires de Fabien avec.

La journée se poursuit comme prévu, par une séance de cinéma avec ma sœur et mon mec. Mon mec. Quelle drôle de sonorité, non ? Je n'apprécie pas du tout ce mot, pourtant j'adore sa signification.

Lovée dans ses bras, le navet diffusé grand écran devient un chef-d'œuvre, bien trop court à mon goût.

— Mouais pas mal, mais c'est bien parce que cet acteur est le troisième homme de ma vie ! commente Marina en sortie de la séance. Et toi ? Tes impressions Amélia ?

— Heu ...

— Ouais, ok c'était très moyen, mais tout n'était pas à jeter. Quelle est la scène que tu as préféré par exemple ?

Ma scène préférée de tout le film ? Celle où Ulrik prit possession de mes lèvres ; cette délicieuse intrusion de sa langue séduisant la mienne pour un baiser ardent. Ce feu d'artifice à l'intérieur de moi. Sa main inquisitrice, s'aventurant toujours plus loin. Le film ? Aucun souvenir.

Devant le cinéma, il parle et rit avec ma sœur comme s'ils s'étaient toujours connus.

À l'époque, Marina avait les mêmes comportements avec... Alors je suis tout à fait capable de lire en elle : elle l'apprécie, mieux, elle le valide. M'en rendre compte réchauffe mon cœur.

Avant de nous séparer, nous prenons un verre sur la terrasse assez calme d'un bar branché du centre ville. Malgré la forte animation de cette rue piétonne, il est facile de bavarder et de s'entendre.

— Huit saisons à teaser sur des méchants et on s'en débarrasse en un épisode !

— Nan mais si y'avait que ça ! Par exemple, tu t'es pas demandé pourquoi les Dothrakis le massacrent pas, s'il a tué leur chef ?

Je n'ose pas mettre mon grain de sel, d'autant plus que ça serait pour leur avouer que je n'ai jamais regardé un seul épisode de leur série.

Marina et Ulrik sont en plein débat. Décevante pour l'un, incohérente pour l'autre. Leurs avis semblent plutôt converger, voici donc pourquoi le ton de leur conversation semble si passionné. Il y a toujours cette seconde qu'il prend pour diriger son regard dans le mien et j'adore ça. Le léger sourire que je lui déclenche à chaque fois me rend fière autant que son attention sur moi.

Pendant quelques minutes, je suis témoin de ce spectacle merveilleux : l'entente parfaite de ma sœur et de l'homme que j'aime.

Le bar est plein ce soir, mais Ulrik ne se décourage pas et fend la foule pour nous chercher une autre tournée. Un tendre bisou avant d'y aller, et ma peau frissonne.

— Je le savais dès que je l'ai vu, que vous finiriez par vous trouver ! balance-t-elle, malicieuse.

Pour toute réponse, je glousse et le chaud me monte aux joues. C'est incontrôlable.

— Quel bonheur de te voir comme ça. Votre relation te fait du bien, ajoute-t-elle, s'assurant de ne pas être entendue.

— Oui. C'est vrai. Je peux être moi avec lui. On se comprend tellement. Je ne m'étais pas sentie aussi heureuse depuis des mois.

Prononcer ces pensées à voix haute me fait un bien fou. Oui c'est vrai, j'ai trouvé ma place, une seconde fois dans ma vie.

Ulrik m'a montré la voie, et l'emprunte avec moi jour après jour. Sa gentillesse, sa bienveillance et sa patience sont arrivés au bout de ma réticence. Presque toutes mes barrières ont cédé devant lui. 

Après LuiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant