Chapitre 109

153 31 5
                                    

J'arrive enfin à l'hôpital, je soupire en voyant qu'il y a toujours des journalistes qui campent ici, attendant la sortie de Jessica. Ils ne risquent pas de la voir à sa sortie, elle passera par un passage protégé, discret. Je quitte la voiture et entre dans l'établissement, direction l'aile royale. Je salue quelques personnes en passant mais je suis presque à courir.

Quand j'arrive devant les portes de l'aile réservé à la famille royale, je vois déjà qu'il y a plus de sécurité, ils sont presque à me demander une pièce d'identité, que je n'ai pas. Je passe quand même, je me dirige jusqu'à mon ancienne chambre, Jessica y a déjà été installé. Elle est devant la fenêtre, je vois qu'elle a profité de la piscine à ses cheveux. J'avais l'habitude de m'en occuper après un moment à nager ou faire de l'apnée, le chlore n'est jamais bon, j'ai appris à le savoir.

Je toque à la porte, Jessica soupire se tourne vers moi, elle a la même tête qu'hier quand je suis venu la voir.

-Salut Jessica. Comment tu te sens ?

-Perdue. C'est toi qui m'a fait venir dans cette chambre ?

-Effectivement. Ta mère pense que tu es en danger, je devais agir.

-Evidemment, c'est ma mère...

Je sens un ton que je connais pas chez elle, ça m'étonne.

-Jess, mon cœur, qu'est-ce qu'il se passe ?

-Rien. Juste, j'aimerais enfin rentrer chez moi. J'en ai marre d'être à l'hôpital, encore plus dans cette chambre.

Waouh, alors là, c'est vraiment la première fois que je la vois comme ça. Pas juste en colère, mais aussi dégoûtée.

-Cette chambre est la plus sécurisée de l'hôpital. Je t'y ai mise parce que quelqu'un essaie de te monter contre moi.

-Je le sentais que tu allais me dire ça. La preuve qu'il n'a pas tord.

-Pas tord sur quoi ?

-Le fait que tu veuilles diriger ma vie ! Gabriel, si j'ai oublié deux ans de ma vie, ce n'est pas pour rien !

-Tu as eu un accident ! Ton cerveau a malheureusement été touché. Jess, je ne veux pas diriger ta vie dès lors que je suis prêt à renoncer au trône pour toi ! Il y a plus d'un an maintenant, j'ai laissé la porte ouverte pour te suivre ! C'est ça diriger ta vie ? Jessica, je t'ai toujours laissé le choix !

-Je ne te crois pas, sinon je t'aurais toujours en mémoire !

-Mais...

-Laisse-moi tranquille ! Je ne veux plus te voir !

Je la regarde, ses yeux sont coléreux, c'est la première fois que je la vois comme ça.

-Jessica, mais qu'est-ce qu'on t'a dit sur moi ? je demande le plus calmement possible.

-Rien ! Gabriel, laisse-moi.

-J'ai besoin de savoir pourquoi tu es comme ça. Parle moi, s'il te plaît !

Elle soupire une nouvelle fois, regarde par la fenêtre puis lâche un rire mauvais.

-Putain, il avait bien raison.

-Qui a raison ?

-Quelqu'un qui m'a dit que tu veux tout diriger dans ma vie, même ici. Il a vraiment raison. Tu ne veux pas me lâcher alors que je te demande sciemment de me laisser tranquille.

-Mais je ne veux pas diriger ta vie. Qui a raconté cette connerie ?!

-Une personne qui visiblement n'aime pas comment tu me manipules.

-Je ne te manipule pas Jessica ! Je ne t'ai jamais forcé à coucher avec moi, jamais forcé à tomber amoureuse, jamais forcé à revenir après notre rupture, jamais forcé à devenir une personnalité public, jamais forcé à m'épouser ! Je t'ai toujours laissé libre de tes choix, de ta vie !

-Alors je peux faire ça sans que tu ne me cries dessus ?

Elle retire le collier et me l'envoie en pleine figure, mon cœur s'arrête.

-Jess...

-Si tu ne me diriges pas, si tu me laisses libre, alors je suis censée pouvoir te rendre ta bague l'esprit tranquille. Non ?

-Tu le peux, mais pas comme ça. Pas avec ta mémoire défaillante. Tu ne dois pas prendre de décision de ce genre...

-Tu vois, tu veux me diriger !

-Pas du tout. Tu ne peux pas prendre cette décision de me rendre la bague, de rompre nos fiançailles alors que tu ne sais plus qui je suis et qui tu es aujourd'hui.

-Pour l'amour de Dieu Gabriel, laisse-moi !

Je vois bien qu'elle ne va pas changer d'avis, je décide de ne pas me battre plus que ça, pas pour le moment. Je hoche la tête, referme le collier et le garde en main en me dirigeant vers la porte. Je me tourne quand je suis devant celle-ci, Jessica a toujours ce regard de haine que je n'ai jamais vue.

-Jessica, je t'aime, sincèrement. J'espère que tu retrouveras rapidement ta mémoire.

Je n'attends pas de réponse, je quitte la chambre en fermant la porte, je l'entends pousser un cri de frustration. Je me dirige vers la salle d'attente et prends place sur un des sièges pour regarder la bague. Le connard qui a fait ça va clairement le payer. Je suis en train de perdre la femme que j'aime parce que quelqu'un lui retourne l'esprit, et je déteste être aussi impuissant face à tout ça. Je ne me sentais pas comme ça quand elle était dans le coma, combien même j'avais terriblement de la perdre.

Je dois avouer que je ne comprends pas ce changement aussi drastique. Il y a encore trois jours, nous discutions de tout et n'importe quoi, on regardait les photos, je sentais qu'on se rapprochait de nouveau, et là, plus rien. C'est même pas un retour à ce que nous étions il y a deux ans, c'est quelque chose de nouveau entre nous et ça me terrifie. Nos retrouvailles sont entre ses mains, et surtout dans son esprit. Je ne vais pas insister, pas dans les jours à venir, elle doit se reposer, j'espère juste que sa mère réussira à savoir ce qu'il se passe concrètement avec elle. Et j'espère aussi que je trouverais le responsable de tout ça, que je le massacre une bonne fois pour toute. Les antiroyalistes et les indépendantistes n'ont jamais cherché à me tuer ou faire du mal à Jessica, malgré ce que nous représentons, je sais que je n'ai jamais été menacé d'attaque, que ce soit il y a trente ans, vingt-deux ans lors de ma prise de fonction ou encore quand j'ai commencé ma relation officielle avec Jessica.

Mon instinct me hurle que la personne responsable est au palais et cette personne réussit à entrer ici sans problème.

Du mouvement face à moi me sort un peu de mes pensées, je ne suis pas étonné de voir Mary, elle vient voir sa fille tous les jours. Elle s'approche de moi, soupirant.

-Quelque chose s'est mal passé ?

Je lui montre le collier et la bague, elle comprends rapidement la situation, elle vient s'asseoir à côté de moi et pose une main sur mon dos.

-Je suis désolée.

-Vous n'avez pas à l'être. Quelqu'un lui fait du mal psychologiquement, je sais que ce n'est pas vous.

-Visiblement la personne est en train de gagner pour qu'elle vous rende la bague.

-Malheureusement. Ce connard est vraiment très fort.

-On le retrouvera et on lui fera payer.

-Je pensais que vous me détestiez.

-J'ai été trop loin, mais parce que j'ai peur pour ma fille. Quand vous aurez des enfants, vous comprendrez.

-Si Jessica me revient. Vous savez qu'elle est la seule à avoir eu mon cœur.

-Je sais.

Mary caresse mon dos, puis se redresse. Nous restons dans le silence, je ne sais pas pourquoi je me force à rester ici alors que j'ai la bague de fiançailles entre les mains... Je ne veux pas perdre la guerre, mais je viens de perdre une bataille importante contre un inconnu.

King of my heartOù les histoires vivent. Découvrez maintenant