4 SAISONS A BLOCK-RIVER

Chapitre 9

PORTRAIT FAMILIAL

Aprés avoir fini de prendre le petit déjeuner avec ses parents, Lev Galloway, comme à son habitude se rendit à son bureau. Il était confortablement installé dans son fauteuil, la cravate desserrée et les jambes détendues, il pouvait savourer ces quelques minutes de quiétude et d'isolement sans personne pour le déranger.

Lev était un homme pressé avec de nombreuses exigences envers les autres et surtout lui-même. De 8h à 22h, il vivait en vase clos dans cet espace feutré dont peu de personnes pouvaient franchir le seuil. Il avait peu de temps à consacrer aux autres. A bien y réfléchir, les autres ne l'intéressaient pas.

Sa famille appartenait à un clan fermé, conservateur et profondément républicain. Ils étaient catholiques pratiquants, peu expansifs en chaleur humaine et les gestes d'amour et de réconfort n'avaient pas leur place au sein de leur famille. Les émotions n'avaient aucun effet sur eux, seul Sven se distinguait par son empathie et sa bienveillance naturelles.

Les yeux bleus marine de Lev étaient à la fois méprisants et condescendants, son regard se posait sur vous sans complaisance. Avec désinvolture, il posa ses prunelles couleur océan sur le portrait de famille qui trônait sur son bureau, sur l'insistance de sa mère. En le regargant, il tenta vainement d'étirer ses lèvres dans un sourire, mais il ne parvenait pas à montrer la moindre marque d'affection envers ses parents ni le moindre intérêt.

Il restait crispé devant cette photo qui donnait l'image d'un foyer heureux alors que tout n'était que faux-semblant. Ce cadre idyllique qui cachait de sombres secrets inavouables fragilisant sa famille de l'intérieur.

Pour sa mère, la glaciale Anthéa Galloway, rien ne comptait plus que l'apparence. Elle était une femme autoritaire, égoïste et insensible. Elle menait son petit monde d'une main de fer sans empathie, ni état d'âme un véritable despote. D'ailleurs, elle ne tolérait aucune contradiction ni conflit pourtant elle aimait son fils mais...mal.

Quant à Lev, il se détestait de lui ressemblait, c'était une véritable torture pour lui de n'avoir que des émotions négatives. Mais peut-on échapper à ses gênes lorsque la noirceur de votre famille vous engloutie, pensa-t-il tristement.

Puis l'esprit de Lev fit une pause sur image en pensant à la figure paternelle de son père. Magnus Galloway avait l'apparence d'un homme avenant, sociable et amusant mais en fait, il était surtout méprisable et calculateur. En y repensant s'il devait qualifier le caractère de son géniteur, il dirait que c'est un vrai "connard".

En brossant le portrait peu reluisant de ses parents, un souvenir lui revint en mémoire, alors qu'il avait quinze ans lors d'un enième dîner familial, il cassa une carafe à décanter en cristal de baccarat, hors de prix, et contre toute attente, son père se leva, ramassa un morceau de verre du précieux objet, il lui demanda d'ouvrir sa paume et sans aucune indulgence, il lui taillada la main. L'entaille fut si profonde qu'on lui fit plusieurs points de suture. Lev avait failli mourir car celui-ci possède un sang extrèmement rare, le Rh-Null, il ne possède aucun antigêne et il a un sytème immunitaire très faible, il est donc impératif qu'il reçoive du sang d'un même donneur que lui rapidement. Heureusement pour lui, sa mère a eu la présence d'esprit de lui extraire deux poches de son propre sang pour les urgences vitales.

A partir de ce jour-là, son père ne l'avait plus jamais maltraité comprenant que la moindre blessure sur son fils pouvait lui être fatale. Et le père Galloway tenait beaucoup trop à son héritier.

Il chassa de son esprit, ses vieux souvenirs tout en passant une main vigoureuse dans sa tignasse blonde presque blanche, il pensait que la couleur si particulière de ses cheveux venait sans doute de ses antigênes inexistants. Tout était froid et polaire dans son apparence. Et même si son physique atypique inspirait le respect voire la crainte, parfois, il ressentait le besoin désespéré d'être enlacé par sa mère, d'être félicité par son père mais toutes ces marques d'affection n'ont jamais eu lieu, à présent qu'il était devenu un homme amer, ce n'était plus qu'un détail pour lui.