Chapitre 16

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Nous suivîmes le majordome en silence à travers les couloirs sombres et oppressants du château d'Amor. Chaque pas résonnait dans le vide, amplifié par les murs de pierre froide et les dalles de marbre glacé sous nos pieds. La lumière vacillante des torches accrochées aux murs jetait des ombres menaçantes, semblant se mouvoir et nous épier à chaque tournant. L'air était si lourd qu'il devenait difficile de respirer. Mon frère Cain marchait à mes côtés, ses mâchoires serrées, mais je pouvais sentir sa tension, la même qui me nouait les tripes. C'était comme si les murs eux-mêmes respiraient la peur et le danger.

Devant nous, Emirya avançait d'un pas calme, presque trop détendu pour la situation, mais je la connaissais assez bien pour reconnaître son masque. Elle n'avait rien dit depuis notre rencontre avec Amor, et son silence ne faisait qu'ajouter à l'oppression. Chaque recoin du château semblait cacher des regards avides, des présences invisibles prêtes à bondir. Même elle, avec toute sa confiance et sa force, devait ressentir la menace qui planait sur nous.

Nous arrivâmes enfin devant une immense porte en bois sculpté, ornée de gravures représentant des créatures mythiques et des scènes de batailles sanglantes. Le majordome s'arrêta devant, inclinant la tête avec une révérence rigide avant d'ouvrir la porte avec un grincement sinistre.

— Voici vos appartements, dit-il d'une voix dénuée d'émotion. Le roi vous fait savoir que la réception débutera dans deux heures. Vous trouverez tout ce qu'il vous faut pour vous préparer à l'intérieur. Si vous avez besoin de quelque chose, tirez la corde près de la cheminée, et un serviteur viendra immédiatement.

Il ne nous laissa pas le temps de répondre et disparut dans l'obscurité du couloir, ses pas s'effaçant rapidement dans le silence pesant.

Nous entrâmes dans la pièce. À ma grande surprise, l'intérieur contrastait radicalement avec l'austérité du reste du château. Les murs étaient drapés de riches tentures de velours rouge, et des chandeliers en or massif diffusaient une lumière chaude et tamisée, adoucissant un peu l'atmosphère. Un feu crépitait dans la cheminée, dégageant une chaleur réconfortante, mais elle ne suffisait pas à dissiper la froideur qui régnait dans mes veines.

Je jetai un coup d'œil à Emirya, qui restait debout au centre de la pièce, toujours silencieuse, ses yeux sombres fixant un point invisible. L'inquiétude me gagnait. Elle semblait toujours impassible, mais je savais que derrière ce masque de sérénité se cachaient des pensées bien plus tumultueuses.

— Tu penses vraiment qu'on peut lui faire confiance ? murmurai-je, incapable de supporter le silence plus longtemps.

Elle tourna légèrement la tête vers moi, son regard perçant, chargé de détermination mais aussi d'une froide incertitude.

— Non, répondit-elle d'une voix sèche. Mais je n'ai pas d'autre choix. Si nous voulons renverser Angel, il me faut son armée. Et s'allier à Amor, aussi dangereux soit-il, est notre meilleure option pour l'instant.

Cain, qui s'était jusqu'ici contenté d'observer en silence, se racla la gorge avant de prendre la parole.

— C'est un prédateur, Emirya, dit-il d'une voix basse et grave. Il te voit comme une proie. Il attend le moment opportun pour frapper.

— Je le sais, répliqua-t-elle, son regard se durcissant. Mais je ne suis pas une proie facile. Amor sait que me trahir signifierait perdre ce qu'il a à gagner. Et je ne suis pas venue ici les mains vides.

— Et s'il décide que tu n'es plus utile ? insistai-je, incapable de taire mon inquiétude.

— Alors il regrettera de m'avoir sous-estimée, trancha-t-elle sèchement, son regard se plantant dans le mien avec une intensité qui me fit frissonner.

Le peuple de l'air : La Princesse OubliéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant