Chapitre 31

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Le vent soufflait plus fort à mesure que nous avancions, et les plaines qui s'étendaient devant nous se faisaient de plus en plus hostiles. Les premières montagnes pointaient à l'horizon, sombres et menaçantes, comme si elles nous observaient. Chaque pas de nos montureq résonnait sur le sol pierreux, et le silence se faisait de plus en plus lourd.

Emirya chevauchait toujours en tête, inflexible. Son allure et sa posture dégageaient une force froide, mais je savais que quelque chose bouillonnait sous cette façade. La mention de Lucas et de cette ancienne promesse l'avait affectée plus qu'elle ne le montrait. De temps en temps, son regard se perdait dans le lointain, comme si elle cherchait à fuir ses propres pensées. Pourtant, elle ne disait rien, et sa distance restait une barrière presque infranchissable.

Je sentais encore la présence de Lysara à mes côtés, son parfum envoûtant venant effleurer mes sens à chaque mouvement de sa monture. Elle n'avait rien dit depuis que Cain m'avait mis en garde, mais son silence était tout aussi parlant. Il y avait une sorte de jeu subtil qui s'installait entre nous, une tension délicieuse mais dangereuse que je ne pouvais ignorer. Elle jetait parfois un regard dans ma direction, son sourire énigmatique effleurant ses lèvres, comme si elle savait exactement l'effet qu'elle avait sur moi.

Au bout de quelques heures, nous nous arrêtâmes près d'une petite source pour abreuver les chevaux. L'endroit était à peine visible depuis la route principale, dissimulé par des rochers et une végétation clairsemée. Emirya descendit de cheval sans un mot, se dirigeant directement vers un point d'observation plus en hauteur, tandis qu'Azura et Cain s'occupaient des bêtes. Je profitai de ce moment pour m'approcher de Lysara, qui s'était assise sur un rocher non loin de moi.

— Comment trouves-tu ce voyage jusqu'à présent ? lui demandai-je, brisant le silence avec une tentative de légèreté.

Lysara tourna la tête vers moi, son regard doré brillant sous la faible lumière du jour. Elle haussa légèrement les épaules, son sourire se faisant plus amusé.

— Plutôt... intéressant, murmura-t-elle. Bien que je n'aie pas encore eu l'occasion de réellement démontrer mes compétences.

Elle fit glisser ses doigts sur le bouc avec une élégance naturelle, avant de reporter son attention sur moi.

— Mais je dois avouer, ce n'est pas la mission qui retient le plus mon attention pour le moment.

Son regard insistant me fit frémir malgré moi. Il y avait quelque chose de désarmant chez elle, une manière de transformer chaque interaction en un moment chargé de sous-entendus. Je me redressai légèrement, tentant de masquer mon trouble.

— Vraiment ? Et qu'est-ce qui capte ton attention, alors ?

Elle ne répondit pas tout de suite, se contentant de me fixer, un sourire jouant toujours sur ses lèvres. Finalement, elle se leva, se rapprochant suffisamment pour que je puisse sentir la chaleur de son corps malgré la froideur ambiante.

— Je pense que tu le sais déjà, dit-elle d'une voix basse, presque murmurée. Il y a toujours plus à découvrir... quand on sait où regarder.

Son ton était à la fois léger et profond, et l'insinuation était impossible à manquer. Une partie de moi était tentée de jouer ce jeu, de voir jusqu'où cela pourrait mener. Mais une autre partie, plus rationnelle, savait que ce n'était ni le lieu ni le moment. La mission, les tensions avec Emirya, tout cela pesait sur mes épaules, et je ne pouvais me permettre de me laisser distraire.

— Tu as un don pour rendre les choses compliquées, Lysara, rétorquai-je finalement, un sourire en coin.

Elle rit doucement, un son léger qui résonna dans l'air froid.

— Ou peut-être que ce sont les choses elles-mêmes qui sont déjà compliquées, et que tu refuses simplement de le voir.

Avant que je ne puisse répondre, Emirya réapparut, ses pas résonnant contre les pierres alors qu'elle descendait du point d'observation. Son regard balaya la scène devant elle, s'arrêtant brièvement sur Lysara et moi. Il n'y avait pas de jalousie dans ses yeux, seulement cette froideur distante qui semblait devenir sa nouvelle façon d'interagir avec moi.

— Nous devrions repartir, dit-elle simplement, d'une voix neutre. Le passage dans les montagnes sera difficile à la nuit tombée.

Je hochai la tête en silence, sentant une vague de frustration me traverser. Ce n'était pas seulement la distance qu'elle mettait entre nous, mais aussi l'incapacité de percer cette carapace qu'elle avait érigée. Pourtant, je savais qu'il y avait quelque chose sous cette façade, quelque chose qu'elle ne voulait pas montrer.

Lysara, toujours aussi insouciante, monta sur sa monture avec une grâce nonchalante, tandis qu'Emirya reprenait la tête du groupe, sans un regard en arrière. L'atmosphère était de plus en plus lourde, et je sentais que les jours à venir allaient être remplis de tensions à la fois politiques et... personnelles.

Le silence pesant des montagnes nous enveloppait à mesure que nous avancions, et la lumière faiblissante du jour créait des ombres inquiétantes sur les parois rocheuses. Emirya chevauchait en tête, une silhouette immobile, presque irréelle dans cette nature sauvage. Ses cheveux sombres, tirés en arrière, flottaient légèrement avec le vent glacial, et son manteau de voyage battait contre les flancs de son cheval, renforçant l'aura impénétrable qu'elle dégageait.

Alors que la pente se faisait plus raide, Azura et Cain nous rejoignirent, leurs chevaux trottinant à l'arrière du groupe. La conversation entre eux était à peine audible, une simple rumeur portée par le vent. Cain me jeta un regard appuyé avant de reporter son attention sur la route devant nous, comme s'il était fatigué d'essayer de me conseiller.

Emirya, toujours en tête, s'arrêta soudain, levant une main pour nous signaler de ralentir. Nous approchions d'un col, et la vue qui s'offrait à nous était à couper le souffle. Les montagnes s'étendaient à perte de vue, leurs sommets enneigés se fondant dans les nuages. Une vallée s'ouvrait devant nous, sombre et profonde, comme un gouffre menaçant.

— Nous devrions établir le camp ici, annonça-t-elle d'une voix claire, sans se retourner. La nuit tombera bientôt, et traverser ce col dans l'obscurité serait suicidaire.

Je sentis le groupe se tendre, chacun échangeant des regards furtifs. Azura hocha la tête, approuvant silencieusement la décision d'Emirya.

Tandis que tout le monde s'activait, je pris un instant pour m'isoler un peu, observant la vallée avec une intensité distraite. Le froid s'infiltrait dans mes vêtements, mais je ne bougeais pas, perdu dans mes pensées.

Le peuple de l'air : La Princesse OubliéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant