Qu'est-ce que tu es censé être au juste ?
Attends,... quoi ?!
Nathan connaissait donc l'origine de ces changements ? Mais comment ?
– Tu fais une crise d'hydrophobie, continua-t-il. Mais il n'y a pas de honte a être phobique, tu peux sortir.
Je fus soulagé. Heureusement, il s'agissait d'un malentendu et mon secret demeurait encore bien protégé. C'était la première fois en quarante huit heures que j'éprouvais une autre émotion que la peur. Je réajustai les manches de mon pull encore dégoulinant, mais je n'avais plus de masque et rien pour couvrir mes mains... J'inspectai alors le vestiaire, rêvant que quelqu'un avait oublié un vêtement. Même une simple pièce de tissu me suffirait amplement pour couvrir mes crochets. Mais à ma grande déception, il n'y avait absolument rien. En même tant, à quoi je m'attendais ? Je choisis de tirer le haut de mon t-shirt sur mon nez, ça devrait faire l'affaire. Et, pour mes mains, je les enfonçait simplement dans mes poches.
J'ouvris la porte en faisant bien attention à ce que Nathan ne remarque pas ma mutation, et en essayant de prendre un air gêné dans le but d'illustrer au mieux l'excuse que j'allais lui sortir. Fou d'inquiétude, il me sauta au cou.
– Que s'est-il passé ? demanda-t-il en relâchant son emprise. Pourquoi est-ce que tu ne me répondais pas ?!
– Je pense que j'étais trop honteux d'avoir gâché la fin du concert... Je suis vraiment désolé.
Non. C'était toujours hors de question de lui révéler quoi que ce soit me concernant.
– C'est pas grave, lâcha Nathan, même si je pouvais entendre la peine résonner dans ses paroles. L'important, c'est que je t'ai retrouvé et que tu vas bien. On ferait mieux de rentrer.
J'approuvai l'idée d'un mouvement de tête. En effet, il valait mieux rentrer. Je ne voulais pas rester ici encore une seconde de plus.
Nous sortîmes du bâtiment et retrouvâmes la voiture, garée bien sagement à une dizaine de mètres de l'entrée. Mais un problème se posait : je ne pouvais pas prendre le volant sans mettre mes mains à l'air libre...
– Est-ce que tu as encore tes gants ? demandai-je à Nathan avant qu'il n'ouvre la portière.
– Oui, bien sûr, dit-il (Il les sortit de la poche de son pantalon et me les tendit) Tiens.
J'enfilai les gants – une chance que Nathan ne pouvait pas accepter l'idée de s'en séparer, et montai dans le véhicule. Pendant tout le trajet, je guettai le moindre changement, la moindre mutation qui pourrait m'arriver. Mais il ne se produisit absolument rien. J'étais presque déçu...
Au bout de quelques minutes, le voyant indiquant le manque d'essence se mit à clignoter. Je m'arrêtai à la station la plus proche car, même si nous étions à seulement une dizaine de minutes de chez nous, je ne voulais pas prendre le risque de tomber en panne et de me retrouver coincé dans la voiture, en plus avec Nathan... Ce dernier sortit et commença à faire le plein. Ce qui me paraissait surprenant, c'était son silence. Aucune question. Aucune réflexion ni commentaire sur le pourquoi du comment je voulais ses gants, par exemple, alors qu'il faisait chaud pour la première fois en six mois. Je profitai de son absence pour aérer mes crochets confinés dans ce qui avait remplacé mon masque, et jetai un œil aux rétroviseurs, à qui un bon coup de chiffon ne ferait pas de mal. Mais, dans le reflet de l'un de ces derniers, je vis mes cheveux prendre une teinte gris pâle et blanchir à vue d'œil. Je m'étais psychologiquement préparé à une nouvelle mutation, mais je n'arrivais pas à chasser cette phrase qui commença à tourner en boule dans ma tête ; « Ce n'est que le début, ce n'est pas fini. » ; « Ce n'est que le début, ce n'est pas fini. » ; « Ce n'est que le début... »