Les cachots n'avaient jamais été l'endroit préféré d'Aeryn, et pourtant, elle avait passé un temps considérable enfermée entre leurs murs froids et humides. Les ténèbres semblaient engloutir le temps lui-même, effaçant toute notion des heures qui passaient. Était-ce le jour ou la nuit à l'extérieur ? Cela importait peu, car pour Aeryn, tout se fondait en un seul et même moment interminable.
Les courants d'air glaciaux qui s'infiltraient à travers les fissures des murs n'avaient fait qu'aggraver les fièvres et les maladies qu'elle avait contractées à répétition. Elle se souvenait de la manière dont son corps tremblait parfois, pas seulement à cause du froid, mais aussi à cause de la fatigue et de la solitude. À chaque nouvelle détention, elle se demandait combien de temps encore elle tiendrait, combien de fois encore son esprit et son corps pourraient endurer cet enfer.
Alors, elle attendait, sans savoir précisément quoi. Était-ce la venue d'un geôlier avec un repas insipide, la promesse d'une libération temporaire pour être interrogée, ou simplement l'espoir d'un éclair de lumière filtrant à travers une fente dans les murs ? Elle ne pouvait le dire.
Ses mains se déplaçaient lentement pour toucher sa plaie au front, où le sang séché formait une croûte. La douleur à l'emplacement du coquard s'apaisait peu à peu, mais la sensation d'engourdissement et de gêne persistait, comme un rappel constant de sa captivité. Les cachots semblaient engloutir chaque instant dans un présent éternel de solitude et de désespoir.
Elle se remémorait son arrivée à Alpheim, a cette sensation de tristesse qui lui avait enserré le cœur à la vue des routes pavées vides et à ses poumons se vidant d'air à l'approche des portes du manoir. Des hommes et des femmes l'avaient attendu sur chaque côté des portes, un air excité, presque fou sur le visage. Leurs yeux écarlates avaient brillé d'une lueur nouvelle. A cet instant, ils étaient insignifiants pour elle, seul l'homme qui l'attendait à l'intérieur avait fait battre son cœur au point de lui couper le souffle.
Les murs en pierre des cachots suintaient l'humidité, créant une atmosphère oppressante. L'obscurité était telle qu'on aurait dit qu'elle avait une existence propre, dévorant chaque lueur d'espoir. Aeryn pouvait sentir le froid transpercer sa chair, pénétrer dans ses os, la glaçant jusqu'au plus profond de son être. La puanteur rance de l'endroit s'insinuait dans ses narines, un mélange de moisissure, de désespoir et de désinfectant barbare.
En se remémorant son arrivée, elle ressentait tout. La présence de son père au centre du salon. Son dos bien droit. Son regard qu'elle avait rencontré quand il s'était retourné. Son sourire qui lui avait donné des frissons. Ces paroles qu'elles n'avaient écoutées qu'à moitié tant ses oreilles bourdonnaient. Et les coups qu'elles sentaient venir et qu'elle avait acceptés, sans vraiment savoir pourquoi.
Alors qu'elle restait allongée sur le semblant de lit humide, les mains et pieds attachés par des chaînes, Aeryn gardait sa lucidité malgré les tourments physiques et émotionnels. On lui avait toujours dit que la force résidait dans la résistance, dans la persévérance face à l'adversité. Elle se répétait ces paroles avec une telle intensité que cela semblait être la seule chose la maintenant en vie.
Au milieu de cette obscurité, Aeryn se sentait à la fois vulnérable et résolue. Les chaînes de la captivité et la menace d'une douleur inconnue pesaient sur elle, mais elle se raccrochait à la minuscule et inespérée lueur d'espoir qui brillait en elle.
Lloyd, Rosalia, Raphaello, Ferreus, ils étaient son ancre, son inspiration à survivre
Elle se demandait fiévreusement ce qu'ils vivaient en ce moment. Si Lloyd pensait à elle, s'il s'amusait bien, s'il profitait convenablement de sa famille. Elle pouvait entendre son rire quand elle fermait les yeux, ces remarques étranges, et sa façon d'éternuer bien à lui. La façon qu'avait Rosalia de se retenir à ces blagues par respect, le regard circonspect du chevalier face à certaines de ces actions, ou voir ses sourcils froncés par des pics qu'il n'avait pas compris.

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ARANEA - Les Aventuriers
FantasíaAmalor, autrefois terre de magie et de lumière, glisse peu à peu dans l'obscurité. La grande cité de Ferreus, capitale du royaume, a perdu son pouvoir protecteur, privant ses habitants de la magie qui les soutenait et les protégeait. Tandis que le m...