Salon du rez-de-chaussée.
Laïa est là, assise dans la pénombre, une tasse entre les mains. Les yeux cernés, la gorge nouée. Ivan entre sans bruit, s'installe en face d'elle, sans un mot au début.
Elle brise le silence, la voix basse :
Laïa: Je suis désolée, Ivan...
Il relève les yeux vers elle, surpris de l'entendre dire ça.
Laïa: Désolée d'avoir foutu tout ça en l'air. D'avoir brisé votre famille. D'avoir été... ce catalyseur. Alvaro m'a repoussée tellement de fois, au début. C'était moi. C'est moi qui n'ai pas lâché.
Elle serre un peu plus sa tasse, comme pour y puiser de la force.
Laïa: Je sais pas s'il m'en voudra un jour. S'il me tiendra responsable de tout ce qui arrive. Mais j'ai peur maintenant, Ivan. J'ai peur qu'il abandonne. Qu'il se laisse submerger. Ou pire... qu'il pense qu'il doit se sacrifier pour réparer tout ça.
Un silence plane. Ivan s'appuie en arrière, son regard toujours aussi calme, mais chargé de gravité.
Ivan: Tu sais ce que j'ai vu chez lui ce soir ?
Il marque une pause.
Ivan: Un homme au bord du gouffre, ouais. Mais pas un homme qui abandonne. Alvaro, c'est pas le genre à fuir. C'est pas dans son sang.
Laïa baisse les yeux, incapable de répondre.
Ivan se penche légèrement vers elle.
Ivan: Il est fou de toi, Laïa. C'est clair, limpide. Il est pas tombé amoureux. Il est tombé tout court. Il a chuté. Et t'es la seule chose qui le tient encore debout.
Elle lève lentement les yeux, croise le regard sincère d'Ivan.
Ivan: Alors ne le laisse pas couler. T'as été assez forte pour l'aimer, pour le supporter, pour l'affronter. Maintenant, sois celle qui lui rappelle qu'il a le droit d'être autre chose qu'un monstre.
Laïa avale difficilement sa salive, la gorge serrée.
Laïa: Et s'il me repousse encore ?
Ivan esquisse un sourire discret.
Ivan: Fais ce que t'as toujours su faire. Reviens. Rentre en lui, comme un poison qu'il veut mais ne peut pas guérir. C'est déjà trop tard pour lui.
Laïa ne dit rien. Mais ses yeux brillent.
Et au fond d'elle, elle sait qu'il a raison.
Nuit tombée. Maison plongée dans un silence tendu.
Alvaro est assis sur le bord du lit dans leur chambre, torse nu, le dos penché en avant, les mains jointes, tremblantes. Il a l'air absent, comme déconnecté, l'ombre d'un homme encore en guerre — cette fois, contre lui-même.
La porte s'ouvre lentement. Laïa entre. Pieds nus.
Elle ne dit rien d'abord. Elle referme doucement la porte derrière elle, puis s'approche.
Il ne lève pas la tête, comme s'il avait peur de ce qu'il pourrait lire dans ses yeux.
Elle s'agenouille devant lui, pose lentement ses mains sur les siennes.
Laïa: Tu saignes encore.
Il tente un sourire las, amer.
Alvaro: C'est rien.
Elle fronce légèrement les sourcils, secoue la tête. D'un geste doux, elle effleure sa mâchoire. Il ferme les yeux, presque soulagé de sentir qu'elle est là.
Laïa: Regarde-moi, Alvaro.
Il hésite. Puis obéit.
Ses yeux sont fatigués, ravagés. Il a l'air d'un roi trop longtemps resté sur le champ de bataille.
Laïa se penche vers lui, colle son front contre le sien.
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Les cendres du diable
Short StoryPlonge dans un monde où l'ombre et le feu se confondent, où Laïa, brillante avocate au cœur brisé, devient la muse tragique d'un chef de cartel impitoyable. Entre les gratte‑ciel de New York et les ruelles enivrantes de Bogotá, leur passion se nourr...
