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Le lendemain matin – Bogotá – 06h22

Le ciel est gris, bas, tendu. Comme l'air qui règne dans les étages supérieurs du manoir d'Alvaro.

Laïa est déjà debout. En legging noir, sweat ample, cheveux attachés à la va-vite. Elle est penchée sur un tableau tactile lumineux affichant une cartographie financière. Chaque filiale des Acevedo est représentée comme une pièce d'échiquier.

Marco entre sans bruit, une tasse de café dans la main.

Marco: Deux autres sociétés-écrans tombées cette nuit. Et une banque partenaire panaméenne a gelé tous leurs transferts. Ils s'étouffent.

Laïa sourit doucement, sans lever les yeux.

Laïa: Parfait. On va les étrangler par le portefeuille. Qu'ils sentent ce que c'est de crever sans une balle.

Marco siffle, admiratif.

Marco: C'est presque cruel.

Laïa: C'est le but.

De son côté, Alvaro est déjà dans les rues. Il a conduit une embuscade à l'aube. Trois véhicules calcinés, six corps identifiés comme capos intermédiaires Acevedo. Une opération chirurgicale. Viscérale.

Mais cette fois, ça ne se passe pas exactement comme prévu.

Un tir venu d'une fenêtre. Une balle effleure son flanc, puis s'enfonce à demi dans sa chair. Il serre les dents. Se relève. Tue.

Mais il saigne.

23h47 – Manoir Alcaraz – Chambre de Laïa

Elle entend le bruit de pas précipités dans le couloir. La porte s'ouvre.

C'est lui.

Il titube, le tee-shirt noir maculé de sang. Un filet coule de son flanc. Elle se fige. Son monde s'arrête. Puis elle court.

Laïa: Alvaro !

Elle le soutient. Le fait asseoir. Sa voix tremble. Elle crie pour qu'on apporte de quoi désinfecter. Mais ses mains tremblent déjà contre lui.

Laïa: Pourquoi t'as pas appelé ? Pourquoi tu m'as pas prévenue ?

Il sourit. Faiblement.

Alvaro: Tu m'aurais interdit d'y aller.

Laïa: T'as failli... putain t'as failli crever.

Les larmes montent. Elle nettoie la plaie, fébrile. Il gémit doucement. Elle sursaute.

Laïa: Je suis là... je suis là, Alvaro. T'as pas le droit de me laisser.

Il pose sa main sur sa joue, sa peau brûlante.

Alvaro: Je t'ai promis de revenir. Chaque soir même si c'est à moitié vivant

Laïa: Alors tiens-la. Ta promesse. Parce que sinon je me fous du monde, je fais exploser ce qu'il reste des Acevedo, je rase cette ville, je—

Elle s'effondre contre lui. Il la serre, malgré la douleur.

Alvaro: T'as pas besoin de raser quoi que ce soit, mi sombra. T'es déjà en train de les détruire. Moi je ne fais que finir le travail.

Bogotá – Chambre d'Alvaro – 00h41

La plaie est bandée. Le drap blanc taché. Alvaro est allongé, torse nu, sa respiration lourde mais régulière. Laïa est blottie contre lui, nichée dans le creux de son bras, sa main posée doucement sur son abdomen, là où elle a posé les compresses. Le silence est presque religieux.

Les cendres du diable Où les histoires vivent. Découvrez maintenant