Derrière l'objectif

CHAPITRE 50 - Est ce qu'on parle de la même chose ?

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I  DIMANCHE 19 MAI 2024  I

— DIMANCHE 16H50 —

💿 Fitzpleasure - Alt J 💿

Le soleil italien commence à descendre lentement derrière les collines d'Imola, projetant une lumière dorée sur la piste encore vibrante.

J'ai le regard vissé à l'écran de mon appareil, installé dans un recoin du garage McLaren, mais la vérité, c'est que je ne filme plus grand-chose.

Mes mains tremblent trop. Mon cœur bat à une vitesse folle, et chaque tour qui s'écoule me donne l'impression de contenir ma respiration un peu plus longtemps.

Il ne reste que quelques minutes, quelques tours, et Lando est là, juste là, en deuxième position, mais l'écart avec Max se réduit dangereusement.

Il pousse.

Il donne tout.

Et moi, je suis littéralement au bord de l'implosion.

La radio dans le garage grésille d'échanges techniques, les ingénieurs parlent vite, concentrés, presque tendus. Le visage de Zak est fermé, celui d'Andrea très calme en apparence, mais je les connais assez pour voir les micro-expressions trahir leur tension. Moi, je suis plantée là, les bras croisés contre ma poitrine, comme si ça pouvait empêcher mon cœur de s'échapper.

Je zoome sur l'écran de chrono. Trois tours. Je m'accroupis sans même m'en rendre compte, mon regard oscillant entre les chiffres et le panneau

*Sector 2 - purple*

Mon estomac se tord. 

*Il est plus rapide. Il est plus rapide dans ce tour.*

J'oublie le bruit autour de moi, j'oublie la foule en délire, j'oublie même que je dois travailler.

Lando passe à l'entame du dernier tour. Le mur des stands lève les bras, l'encourage, et moi, je me redresse d'un coup, les mains sur la bouche.

Je retiens mon souffle tout au long du tour. Les virages s'enchaînent, le ralenti n'existe plus.

Il est littéralement à quelques secondes de Max. 

C'est tendu, c'est serré, c'est presque cruel. Et pourtant, je n'ai jamais été aussi fière.

Puis le drapeau à damiers se lève. Max passe la ligne, suivi de près par Lando.

Deuxième.

Il a tout donné. *Il n'a rien lâché*. Je sens la pression redescendre d'un coup, mes jambes tremblent un peu. Lando reste silencieux à la radio.

Je me détourne un peu de la foule qui commence à crier, les mécaniciens qui se tapent dans les mains.

Je le regarde quelques secondes plus tard apparaître à l'écran, en train de retirer son casque sous les applaudissements.

Son visage est rouge, fatigué, tendu. Il transpire encore la concentration et l'effort, mais son regard... son regard dit tout.

Ce n'est pas de la joie que j'y lis.

Pas aujourd'hui.

Ses mâchoires sont crispées, ses yeux fuyants, sombres, et ses gestes brusques trahissent une colère rentrée.