Chapitre 7

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Inès avait l'air sûre d'elle alors que personnellement je ne pensais pas que son « plan » marcherait. Je lui indiquai alors les noms de mes soi-disant amis et puis nous attendîmes cinq minutes, quinze minutes, une heure, deux heures ... Rien. En plusieurs heures, nous n'avions toujours pas eu de réponses. Elle avait l'air gênée.

- Appelle ta mère tu dors chez moi, m'annonça-t-elle, tout en lançant son mug finit depuis 1h30 dans une poubelle, personnellement je l'avais bu uniquement pour lui faire plaisir étant donné que chaque gorgée me donnait une envie de vomir.

- Avec plaisir, ça va me faire du bien de ne pas voir ma mère ! fis-je.

Ma mère étant la plus grosse laxiste au monde c'est limite il n'y avait pas besoin de lui demander. Inès glissa son ordinateur portable dans sa sacoche noire puis la plaça sous son bras. Elle me fit-signe de la suivre avec un grand sourire. Je pensai qu'elle appellerait un taxi pour rentre chez elle mais à mon grand étonnement elle continua d'avancer, je la suivis donc sans broncher. On s'arrêta rapidement, son quartier étant réellement proche du parc.

- Par contre je te préviens que j'ai un petit frère et une petite sœur, ils sont jumeaux mais tu n'as pas à t'en faire, ils sont vraiment très calmes, ils sont tellement silencieux qu'on dirait ces gosses flippants dans les films d'horreur, je te jure !

Le mot « petit frère » me donnait un goût amer dans la bouche.

- Calmes ?! On échange ? Personnellement, mon demi-frère est une ordure, ça fait longtemps que je rêve de l'étouffer pendant son sommeil !

- Tu dois juste pas le comprendre ! Je suis sûre que si tu lui parlais et lui expliquais la situation il se calmerait, sourit-elle.

Elle ouvrit la porte de chez elle et je n'entendis aucun bruit. J'aperçus alors deux petites têtes blondes entrain de dessiner calmement dans le salon. Inès ne m'avait pas menti, on entendait les mouches voler. Ce silence ne m'était pas habituel et m'angoissait. Il y avait une femme qui lisait un magazine juste derrière les enfants, elle avait une tenue plutôt formelle aux teintes sobres et portait un tablier blanc impeccable.

- Kristina ? Je suis rentrée !

- Votre journée s'est bien déroulée ? Je vais préparer le repas.

- Oui, ça peut aller, prévois une assiette en plus, j'ai invité une amie !

Qui était cette femme ? Je me posais la question depuis que j'avais franchi le seuil de la porte. Je murmurai à l'oreille d'Inès

- C'est qui ? Ta voisine ?

- Non c'est ma domestique, j'aime pas trop ce mot parce que elle fait comme partie de ma famille ! Je ne me rappelle même plus quand elle est arrivée, je la connais depuis que je très petite, elle s'est toujours occupée de moi. Étant donné que mes parents travaillent beaucoup et que je ne peux pas assurer la sortie d'école de mes frères et sœurs, faire le ménage etc... Kristina s'en occupe !

- New York est incroyable... fis-je des étoiles dans les yeux. Au fait, ils font quoi tes parents ?

- Ils ont un cabinet d'avocat dans le centre, assez parlé de moi, on doit retourner sur l'ordinateur !

- Ella, Julian ! Au bain, maintenant, s'écria la nourrice

Aussitôt dit, aussitôt fait, les deux têtes bouclés passèrent furtivement devant moi en disant timidement « Bonjour » puis, tandis que l'un se rendit dans sa chambre, l'autre se rendit dans la salle de bain. Pour ma part, je suivais Inès jusqu'à sa chambre. Je découvris une pièce plutôt grande, aux murs taupes, recouverts de cadres familiaux. Un énorme lit trônait au fond de la salle, telle une enfant j'avais envie de m'allonger dessus, de me fourrer sous les couvertures apparemment épaisses puis de dormir profondément, calée en position fœtale et bien au chaud. La chambre était rectangulaire, sur le mur à ma droite s'étendait sur sa longueur un placard touchant le plafond. Je présumais que c'était son dressing. Il y avait un amas de peluches sur l'avant du lit, toutes plus mignonnes les unes que les autres. Inès me guida sur son lit puis ouvrit délicatement son ordinateur portable. Elle se connecta ensuite sur les réseaux sociaux.

Le temps d'attendre un signe de vie du côté de Paris, nous commençâmes à parler de tout et de rien mais au bout de quelques minutes, un petit sifflement se fit entendre : Claire avait accepté l'invitation de Inès ! Tout fonctionnait comme sur des roulettes ! C'est alors qu'Inès commença à tchater avec Claire.

- Salut !

- Coucou, ça va ?

- Ouai et toi ? Je m'appelle Inès.

- Moi c'est Claire et là je suis avec une amie, Emma, on fait un Facetime ?

- Ok ! Conclut-elle.

D'un coup son téléphone vibra, la moitié était cachée par sa couverture mais je pus apercevoir un cœur à coté du nom. Elle le saisit si rapidement que je n'eus pas le temps de lire le nom. Elle était devenue toute blanche.

- C'est qui ? T'as un copain ? Fis-je avec un sourire malicieux.

- Non c'est ma grand-mère, mentit-elle.

Je n'insistai pas pour ne pas la gêner encore plus.

- Elles appellent ! Cache toi !

- Oui c'est bon, je me glissai alors sous la couette.

Je n'en revenais toujours pas. Inès avait vu juste, Claire et Emma était tellement prévisible.

- Wah ! Tu habites où ? C'est ta chambre ?

- J'habite à New York et oui c'est ma chambre.

- New York ? La chance ! Si on se connaît bien un jour on aura qu'à faire un échange: j'habite à Paris moi !

- Tu penses pas que y a plus simple ? Je suis sûre que tu connais quelqu'un de là-bas !

Elle me donna un coup de coude.

J'apparus alors le regard dur et vit que Claire devenait rouge écarlate. Emma arriva avec des canettes de coca et sursauta.

- Claire ! Éteint !

- J'arrive pas !

- Qu'est-ce que tu nous veux toi ? Tu nous as pas déjà fait assez de mal ?! Casse toi! me lança froidement Emma.

- Non, j'ai rien fait ! Vous m'avez snobée dès que je suis partie ! C'est à toi de t'expliquer Emma, c'est toi qui m'a envoyé ça ? je montrai alors la photo de Claire et Hugo. Tu crois que ça c'est pas me faire du mal ? Je vous ai quittés il y a une semaine à peine et tout se passait bien !

- Ça ne s'est jamais bien passé ! Avec Claire on n'en pouvait plus de toi, de ton couple parfait avec Hugo, de ta vie parfaite, de tes notes parfaites ! On ne souhaite qu'une chose ; que tu ne nous parle plus jamais, on voudra jamais de toi et de ta gueule ! Tout chez toi m'exaspère, tu représentes tout ce que je déteste chez une personne, tu as cet air supérieur détestable et tu pares aux gens comme une princesse parle à sa bonne. Tu veux t'intégrer dans ta nouvelle vie alors un conseil : change d'attitude, je ne vois même pas comment cette Inès peut t'apprécier !

- Emma... j'avais les larmes aux yeux. On se connaît depuis notre naissance ! On a toujours été ensemble...

- Justement j'en avais marre d'être ton ombre que ce soit « Sarah et Emma » et pas « Emma et Sarah », alors maintenant si tu veux que peut être un jour ça s'arrange raccroche !

- Non, je veux entendre la version de Claire...

Je la suppliai mais je n'eus pas de réponse. Inès raccrocha, sentant que continuer ne servirait à rien. J'étais effondrée, Inès me prit dans ses bras tandis que je hurlai et tombai en sanglots. Tant de pensées malsaines retenue en ma meilleure amie pendant si longtemps me rendait folle. Chaque parole un temps soit peu positive qu'elle m'ait dite depuis mon enfance n'était que mensonge ? Une semaine avait suffi à me rendre dingue. Une petite boule se formait dans mon ventre. La colère provoquée par cette confrontation me créa une douleur incessante au niveau des sinus, j'avais l'impression que mon sang bouillonnait en moi. Tout un panaché d'émotions émanaient de mon être. Je me sentais atrocement triste mais à la fois horriblement en colère, je me sentais plus que jamais seule et en même temps une nostalgie de mon ancienne vie d'ignorance dans laquelle Emma et Claire me cachait leur ressenti par des flatteries. Je me sentais stupide, stupide d'avoir pu être aveugle à ce point, stupide de n'avoir rien vu venir. J'étais censée être sa meilleure amie.


Feelings - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant