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Je suis trop restée enfermé à la maison depuis quelques temps, Tante Anna n'a pas arrêté de me sermonner. Alors j'ai décidé de sortir aujourd'hui, mais pour faire un jogging. C'est la seule bonne raison pour sortir que j'ai pu trouvé, et sincèrement, ce n'est pas faute d'avoir essayé. Il n'est que 7h du matin lorsque je me lève et traverse ma chambre, dont le sol est jonché de papiers de toute taille et de toute forme, tous noircis de croquis et de dessins, pour ensuite me diriger vers la chambre voisinant la mienne. Je regarde dans la chambre de Tante Anna, elle est étalée sur son grand lit ses épaisses couvertures à moitié tombé par terre, ses cheveux d'un blond sauvage et tout ébouriffés lui cache le visage mais je peux voir qu'elle dors profondément.
« Qu'est ce que j'aimerai pouvoir dormir aussi sereinement moi aussi, rien qu'une fois. » me dis-je, légèrement jalouse.
Je pousse un long soupir et décide de retourner dans ma chambre, tout en faisant attention de ne pas faire de bruit.
J'enfile mon bas de sport , lorsqu'on sonne à la porte. Je jette un coup d'oeil à la montre à mon poignet pour vérifier qu'il est bien 7h, et effectivement, il est 7h. Alors qui est-ce à cette heure-ci? Le soleil ne s'est même pas encore complètement levé qu'on est déjà dérangé, je rêve.
Je décide, à contre-coeur , d'aller voir qui est la personne assez tordue pour venir sonner chez quelqu'un si tôt le matin.
Et évidemment, il fallait que j'ouvre sans regarder par le judas. « Helena! » s'écrie Irina avant de me sauter au cou.
Je suis tellement sous le choc, que je ne parviens ni à bouger, ni même à articuler un seul mot. Mais qu'est-ce qu'elle fait là enfin!?« J'allais faire un jogging et je me suis dis que ce serait sympas qu'on y aille ensemble entre fille tu vois. Et puis on pourra parler, cela fait bien longtemps que tu n'es pas venue en cours! Je voulais te joindre mais je n'avais pas ton numéro, je me suis inquiétée! » s'exclame-t-elle tout en me serrant un peu plus fort, m'empêchant presque de respirer.
Je la repousse, mon cerveau ayant enfin accepté de sortir de sa transe, voyant que nous sommes trop collée l'une a l'autre. S'il devait se reproduire ce qu'il s'est passé au café j'aurai du mal à m'en sortir cette fois ci.En réalité cet élan d'affection me met assez mal à l'aise. Je me suis efforcée de ne pas sortir et de ne plus retourner en cours pour l'éviter, et elle elle vient sonner chez moi plus d'un mois plus tard, comme si de rien n'était, et me propose de faire un jogging. Soit c'est moi qui ai perdu toute normalité à force de rester enfermée , soit cette fille a vraiment un comportement sortit tout droit d'un autre univers.
« Irina ! Attends la. Pause !»
Irina arrête de gesticuler un instant et je pose une main sur ma poitrine tout en fermant les yeux, pour inspirer un grand coup avant de planter mes yeux émeraude dans les siens ,toujours aussi bleus que depuis la dernière fois que je les ai vu.
« Je peux savoir qui t'a donné mon adresse déjà ? » dis-je, le ton plus froid que je ne l'avais prévu.Elle s'arrête de sourire bêtement une seconde, pour me répondre, le plus sérieusement du monde.
« Je l'ai trouvé sur ton dossier, à l'école!»
Alors là. Je rêve ? Dites moi que je rêve!« P-Pardon !? » je bégaye, trop choqué par ce qu'elle vient de dire.
« Mais je voulais voir si tu allais bien, tu ne m'as donné ni de numéro, ni d'adresse, ni même ton nom! Alors ne t'énerve pas comme ça, je n'avais pas d'autre choix. » se défend-elle, une expression de chien battu collée au visage.
En même temps, elle a pas tord. Mais elle n'a pas besoins de s'inquiéter pour moi, ce n'est pas comme si nous étions des amies de longue date!
Mais, prise dans un élan de compassion envers cette fille qui s'est inquiétée pour moi alors que nous nous connaissons à peine, je décide de lui laisser une chance, mais seulement pour cette fois. Nous allons courir ensemble, et après ça, on ne se verra plus, je ne sortirai plus et lui demanderai de ne plus venir chez moi.
Ce n'est certes pas des plus amical, mais je ne peux pas risquer de lui infliger la même chose qu'à Clarisse. Elle a provoqué le réveil de cette chose qui sommeille en moi ,lorsqu'elle m'a touché ce jour-là au café, tout comme Clarisse il y a des années auparavant et c'est quelque chose que je ne peux pas permettre. Cette chose doit rester dans un coin, et ne plus jamais s'extérioriser, j'en ai payé le prix par le passé et si cela devait se reproduire je crois bien que je ne m'en sortirai pas. Je finirai sûrement par...
« Tu m'en veux? » Irina me coupe dans mes pensées, et je lui en suis reconnaissante.La tournure que prenais mes investigations intérieures n'étaient pas des plus joyeuses... Je lève la main droite, en montrant mon index et Irina la regarde, intriguée.
« Ok pour le jogging, mais rien qu'une fois alors. » dis-je en souriant.
Elle me regarde, et se prépare à riposter mais s'abstient et affiche un sourire des plus mignons qui soit malgré qu'il soit résigné. Je prend cela pour un oui et l'invite à entrer, puis je me précipite dans les escaliers de bois, en faisant tout de même attention de ne pas faire trop de bruit car Tante Anna est toujours en train de dormir. J'attrape mon haut et mon gilet, enfile mes chaussures de Running et m'attache mes longs cheveux en une queue de cheval haute puis les laisse chuter sur mes épaules.
Je descend et me dirige vers la cuisine tout en jetant un regard vers Irina qui se balade dans le salon, tout en examinant les nombreuses photos de moi et Tante Anna sur le buffet positionné contre le mur près de la baie vitrée donnant sur le jardin.
Je suis en train de remplir une petite gourde d'eau lorsque la voix d'Irina m'interpelle.
« Tu avais l'air plus joyeuse lorsque tu étais petite tu le sais ? » J'esquisse un sourire.
C'est vrai que mon enfance a été plus joyeuse que mes années de lycée. Depuis l'accident, je n'ai plus pris le temps de m'approcher des autres et ai décidé de m'enfermer dans mon propre univers. Ceci ne m'a pas empêché de paraitre heureuse, de constamment afficher un sourire face aux autres. Il est plus facile de cacher la douleur derrière un sourire, que de réussir à l'accepter pour pouvoir en parler ,dit-on.
J'accroche la gourde à une lanière autour de ma cuisse gauche et attrape mon téléphone sur la table de la cuisine pour le glisser dans une poche sur mon bras droit , après avoir mis en marche l'application chronomètre.« Bon tu viens ? » dis-je en m'appuyant à la chambranle de la porte reliant la cuisine au salon.
Irina ressemble à une véritable déesse, ses cheveux blonds tirent presque vers le blanc et sont attachés soigneusement en une belle queue de cheval, découvrant son visage fin et sa peau parfaitement lisse, légèrement bronzé, qui contraste avec ses yeux bleus presque translucides. Son corps élancés, frôle la perfection même et je ne peux m'empêcher de me comparer à elle intérieurement. J'ai encore cette impression d'être un vieux chiffon à côté d'un tissus de soie, c'est assez démoralisant.
« Je crois que nous avons la même corpulence, tu es même un peu plus fine que moi. » me lance-t-elle en souriant . Et c'est à cet instant que je remarque qu'elle m'observe elle aussi.« Tu rigoles? , je m'exclame , tu es juste parfaite et moi... et bien je suis moi. »
Elle ris doucement, et s'approche un peu plus de l'autre bout de la pièce.
« Tu as cette fâcheuse manie de te voir comme une moins que rien, c'est assez triste, tu sais? » déclare-telle tout en continuant d'avancer, réduisant rapidement la distance qui nous sépare.
Je ressens encore cette chaleur, la même qu'il y a des années, et qu'il y a un mois, naître du bout de mes orteils provoquant des picotements sur ma peau et menacer de se propager dans tout mon corps. Je reprend alors mes esprits et recule rapidement mais faillis tomber à la renverse. Irina s'avance pour m'attraper par le bras dans une tentative de m'empêcher de tomber ,mais j'esquive sa main de peu et attrape une des chaises de la cuisine pour me maintenir.
Je reste agrippée à la chaise de bois cirée blanc un instant, puis me relève pour lui faire face.« On y va ? » dis-je, le sourire au lèvre.
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Terre D'Eden
FantasyLa vie est comparable à un train, qui file à toute vitesse. On peut se lever et marcher à contre-sens, mais cela n'enlèvera rien au fait que le train continue d'avancer. Et puis parfois, lorsque le train s'arrête à une station, certaines personnes e...