Chapitre 17 - Lhortie (Partie 2)

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Les bourrasques s'engouffraient à travers les hublots brisés

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Les bourrasques s'engouffraient à travers les hublots brisés. Elles portaient dans leur sillage les piaillements des créatures achevées à la baïonnette, la danse aérienne des hélices dont les pales réduisaient calmement leur allure, mais, surtout, le râle lugubre des poutres agonisantes, pétries des tensions qui tiraillaient le ballon. La nacelle se déformait de concert avec la toile ventripotente et boursouflée, millimètre par millimètre, dans de sourdes vibrations, des grincements incongrus qui s'insinuaient jusque dans les tripes des Cols Rouges.

Il leur avait fallu beaucoup de courage et d'imagination pour soutenir la défense et pour se répartir efficacement aux quatre coins du Présage, encore abasourdis par l'action stupide de leurs camarades. Tirer sur un délégué, quel qu'il soit, ou soulever une révolte conduisait irrémédiablement à une exécution publique. Lhortie avait dû réagir dans l'urgence. Ainsi, comme un sacrifice, elle avait assigné Hourdis et Pinçon en première ligne, sur la passerelle de proue. Elle leur laissait encore la possibilité de mourir dans l'honneur. S'ils survivaient, on les enverrait au trou en attendant la cour martiale. Quant à Alphonse et Strax, impliqués eux aussi, le Lieutenant les avait rapidement innocentés. Désormais, ces deux-là surveillaient le Renonciateur perdu entre la vie et la mort, accompagnés du docteur Luther.

Dans la pièce à côté – les réserves –, Lhortie avait bataillé comme jamais, épaulée par Hubert et Mirador. À eux trois, ils avaient basculé la large porte de ravitaillement qui parcourait le mur en un balcon improvisé, une ouverture sur le vide. Depuis cet espace pris en tenaille entre les cuisines et les cellules, ils avaient enchaîné les salves tout en supportant les aléas tempétueux qui déviaient leurs balles et qui risquaient à tout moment de les envoyer par-dessus bord. Même Mirador, réputé pour sa maladresse à jouer du canon, avait eu son heure de gloire en alignant, au dernier moment, un volatile en plein vol.

À l'horizon, les oiseaux battaient à présent en retraite.

« On les a eus ces chiens ! » s'égaya Hubert.

Sa voix se perdait dans les rafales qui fouettaient son visage. Lhortie recula d'un pas. Cheveux au vent, doigts crispés sur sa crosse, elle s'appuya contre les robustes étagères des réserves et s'affaira à recharger mécaniquement son pistolet.

« Est-ce qu'on ne devrait pas... » s'essaya Mirador.

Un bruit sourd lui arracha une grimace.

« ...abandonner le Présage 101 ?

— Regardez-moi bien ! » rugit le lieutenant.

En prise avec les courants, sa crinière brune se déployait, tentaculaire.

« L'abandon n'est pas une option !

— Sauf votre respect, chef, vous nous entraînez avec vous dans... »

Hubert l'interrompit d'une tape dans le dos.

« Le Petit voudrait pas calancher... vous comprenez !

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