Chapitre 19

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Entendre de la bouche d'un homme qu'un autre homme est sexy est un phénomène... Étrange.
- Tu es bi ? Lui demandais-je d'un ton amusé.
Il lève les yeux au ciel avant d'enfiler son casque.
- Tu vois ce que je voulais dire.
- Que tu trouves Sachka sexy...
- Que Sachka est un bel homme...
- Jeune homme, l'interrompais-je.
- Si tu veux, mamie, le fait est qu'il est flatteur d'être comparé à lui,  physiquement.
- Mouais, dis-je peu convaincue en enfilant mon casque.
Je pousse Thibaud avec ma jambe pour pouvoir enfourcher ma moto et démarre dès qu'il enserre mon buste de ses bras.
La roue arrière dérape un peu sur le goudron chaud mais se remet vite d'aplomb quand j'accélère.  Nous longeons de longues rangées de conteneurs avant d'enfin sortir de ce terminal.
En prenant le périphérique, je monte à 130 km/h. Thibaud est de plus en plus crispé dans mon dos et ça m'amuse. Ça me distrait de mes vrais problèmes.
- Qu'est... fait ?
La connexion entre les deux casques se fait mal et je n'ai pas compris ce qu'il vient de dire. Je ralentis un peu et lâche le guidon d'une main pour tapoter mon casque.
- Reprend ton guidon ! M'ordonne Thibaud, une note de panique dans la voix.
- Ça va, ça va ... Que disais-tu ?
- Qu'est ce qu'on fait ?
- Il faut trouver une maquilleuse qui puisse nous faire des masques et nous déguiser.
-Chouette, déguiser en quoi ?
Je lève les yeux au ciel avant de me reconcentrer sur la route.
- Juste nous passer des vêtements différents des nôtres.
- Oh dommage. On serait beau en Bonnie et Clyde. Mais où va-t-on trouver une maquilleuse qui nous prenne sur le champ ?
Je ne réponds pas à sa question.
J'en connait une qui pourrait ...

Ça fait cinq ans que tu ne l'as pas vu. Tu ne vas pas débarquer chez elle quand tu as besoin d'un service, me sermonne ma conscience en faisant apparition.
Nous sommes un peu à court de temps pour le "socialement correct", tu ne trouves pas ?
Tu n'as pas pris de nouvelles depuis une demi-décennie, tu crois vraiment que ça va lui faire plaisir que tu débarques à l'improviste ?
C'est presque ma grande soeur.
Une grande soeur avec qui tu ne partages rien d'autre que 3 années de vie commune.
Je lui dois beaucoup de choses, je ne serais pas ici sans elle.
Franchement, entre prostituée et tueuse à gage, je ne sais pas ce qui est le mieux ... Se moque-t-elle.
Je n'étais pas une prostituée ! Protestais-je avec virulence. J'étais call girl.
Big différence, plaisante-t-elle.

Sans que j'y fasse vraiment attention, nous arrivons dans le quartier où se trouve le petit salon de Tyna. Je me gare à 50 mètres et descends de moto.
- Reste là, j'ordonne à Thibaud. Et n'enlève pas ton casque.
Il hoche la tête tandis que je m'éloigne après avoir enfilé un large chapeau à rayures. Je marche en direction du petit local à la façade défraîchie. Les couleurs, les femmes assises sur leur porche et la décrépitude des lieux me renvoient quelques années auparavant. Je vois à la façon dont elles me toisent qu'elles se demandent ce qu'une jeune femme comme moi peu bien fabriquer ici. Je connais ce regard, parce que je l'ai moi même eu. En quelques minutes, je me retrouve devant la petite porte qui tombe en morceaux. Après une légère hésitation, j'appuie sur la sonnette.
Je l'entends qui résonne à l'intérieur mais ne perçois pas de mouvement au travers des rideaux. De longues secondes s'écoulent et je finis par me demander si ça n'était pas une erreur. Le doute s'installe en moi, me donnant une forte envie de faire marche arrière. J'ai souhaite tout à coup partir en courant.
Je te l'avais dit, se vante ma conscience.
Je tourne le dos au magasin et m'apprête à m'enfuir quand le grelot de la porte s'active et quelqu'un appelle :
- Pocahontas ?

Radicalement VôtreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant