Chapitre 33

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Je peste intérieurement quand je percute enfin. L'alcool ralenti sérieusement les capacités de mon cerveau. 

Sachka contemple avec nonchalance les personnes assises en face de lui. Au bout d'un moment, il se détourne et reporte son attention vers le bureau. Il ouvre un tiroir et en sort une espèce de cube relié à un câble spiralé.

Tout en ignorant la caméra, il ouvre le petit boitier et dévoile un bouton rouge. Un sourire cruel apparaît sur ses lèvres quand il appuie dessus. Contractée, je m'attends à ce que le cercle de personnes explose ou quelque chose du même registre. Mais rien ne se produit.

Six secondes plus tard, une violente secousse ébranle le sol sous mes pieds. Dans un réflexe de survie, je me harponne à la chaise mais Thibaud en tombe et nous fait rouler jusqu'à l'autre extrémité du conteneur. Ses mains s'agrippent au tapis qui s'embobine autour de nous et nous maintient prisonniers. Une brutale oscillation fait voler des armes à travers la pièce, nous éjectant dans la direction opposée. Le conteneur penche tout à coup et nous dégringolons en arrière. Le tapis se déploie au rythme de nos roulades et lorsque nous percutons durement le fond du conteneur, il dévale la pente et s'écrase sur nous. Je me redresse sur mes coudes et vois le canapé qui glisse comme sur des roulette dans notre direction. Le souffle bloqué par les cabrioles, j'attrape Thibaud par son tee-shirt et le relève avec force. La dangereuse inclinaison du sol fait de garder l'équilibre un travail de titan.

- Tu es prêt ? Demandais-je à Thibaud en désignant le redoutable sofa d'un mouvement du menton.

Il hoche la tête et nous courons en direction du canapé qui n'a de cesse de prendre de la vitesse à mesure qu'il se rapproche. Mon cœur bat à tout rompre. Si le canapé traverse la couche de Kevlar, il fera un trou béat dans le conteneur, et d'après mon estimation nous sommes déjà à plus de 20 mètres du sol. Ce qui veut dire que si nous n'arrivons pas à passer par-dessus, nous irons nous écraser sur le goudron du port, aplatit par un canapé.

Ma main qu'il tient serrée dans la sienne devient moite. L'espace entre le canapé et nous se réduit beaucoup trop rapidement à mon goût.

60 centimètres...

Mes jambes me propulsent toujours plus vite .

40 centimètres...

Tout mon corps se contracte, se préparant à bondir.

30 centimètres...

Nous sommes dangereusement près. Avec tous les exploits que j'ai accompli, les situations complexes dans lesquelles j'ai été, les gens que j'ai assassiné –qui au passage n'étaient pas de doux agneaux- je risque de mourir écrasée par un canapé.

J'aurais souhaité une mort plus... digne ?

20 centimètres.

J'inspire et me retiens de regarder Thibaud. Plus qu'un tout petit pas à faire ...

Je bande mes muscles et pousse sur mes cuisses de toutes mes forces. Je bondis et ferme les yeux. Pourvu que j'y arrive, pourvu que je ne périsse pas écrasée par un sofa.

En suspension dans les airs, j'ai l'impression que le temps ralenti. Tant mieux, au moins si je me loupe mes derniers instants paraîtront plus longs et j'aurais l'impression de mourir plus vieille. J'aurai gagné un peu de temps, enfin... Il m'aura semblé en avoir plus.

Et puis tout à coup, mon pied butte contre le sol. Le choc sur mon talon remonte dans toute ma jambe et le temps reprend une vitesse normale. 

Je m'autorise à regarder Thibaud dans ma fraction de seconde de soulagement.  Il l'a bien entendu sauté aisément. Sans s'accorder de répit, il cavale jusqu'à la porte de la salle de bain et s'y accroche. Ravie de mon exploit, je le suis avec allégresse .

Il agrippe la poignée puis se retourne et me tend sa main. Je me contorsionne pour l'attraper mais une nouvelle perturbation fait que le conteneur penche subitement et la pente se fait d'autant plus raide.  Je patine un instant dans le vide puis mes pieds s'entortillent dans un bout de tapis coincé sous le canapé. Le bout de ses doigts frôle les miens et je pars en arrière, tirée par le tapis, lui-même tiré par le canapé. Je me débats férocement et gigote pour m'en débarrasser mais je ne fais qu'empirer la chose. Mes chevilles sont prisonnières. Je cherche désespérément quelque chose à quoi m'accrocher mais ne trouve rien. Mes ongles se plantent de leur propre volonté dans le sol. Ils ne sont d'aucune utilité, ils rayent juste le parquet que j'ai mis une plombe à poser quand j'ai aménagé le conteneur. Le moment fatal arrive, le canapé percute le mur dans un bruit sourd. Je ferme fort les yeux, étouffe un petit cri et attends. Mon sang bat dans mes oreilles, comme si j'avais une horloge de gare dans le cerveau, pourtant j'ai l'impression que mon cœur s'est arrêté. Comme s'il était devenu timide et se cachait.

Pourtant, rien ne se produit, le Kevlar a tenu bon. Je rouvre les yeux craintivement et regarde Thibaud qui me fixe en tremblant. J'inspire. Un petit déclic se fait entendre, comme une serrure qui s'ouvre. Mes yeux s'arrondissent et ma bouche prononce un Non silencieux. La porte du conteneur s'ouvre lentement et un courant d'air chaud me dresse les cheveux sur la tête. Je n'ose pas bouger, le canapé est renversé sur un accoudoir et je suis assise ou plutôt échouée sur l'autre. L'espace de vide ne cesse de grandir avec une nonchalance exaspérante. Le canapé va tomber dans l'embrasure et moi avec.



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Et voila !! Un peu d'action!! Ça me manquait dis-donc ! Bon vous en pensez quoi ? Ça vous plait ?

Kisses <3

Radicalement VôtreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant