Chapitre 35

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Quand j'entame ma tremblante ascension, quelque chose se pose sur mon épaule. Effrayée, je fais un brusque mouvement et mes mains inondées de sueur glissent de la poignée à laquelle je suis cramponnée. Je bascule en arrière. Les bras battant le vide, avec le fol espoir de voir des ailes me pousser. Terrifiée, je peux deviner mes pupilles se dilater et engloutir le marron de me yeux. Une je-ne-sais-quoi s'agrippe tout à coup à mon poignet. L'arrêt de ma chute est instantané, trop d'ailleurs. Le coup sec endolorit mon épaule. 

Maintenant fermement mon avant-bras, je distingue une fine main blanche dont les veines apparaissent sous la peau. Un nuage passe sans s'arrêter devant la Lune et un faisceau allume le visage crispé de Thibaud. Il pousse un grognement et me rapproche de sa jambe a laquelle je me cramponne désespérément. Il plie le genou et me hisse devant lui, me parant tel une carapace contre le vent chaud. Les larmes menacent de refaire surface.

- Eh ! M'interpelle-t-il doucement. Ça va aller.

Le front posé sur l'acier, je ris amèrement.

- C'est pas comme si nous étions suspendus à une porte à plus de 40 mètres du sol...

Il pose son menton au sommet de ma tête.

- Inspire, m'ordonne-t-il.

Mâchoire et lèvres serrées, j'obéis à contrecœur.

- Il faut qu'on bouge, dis-je, la voix brisée. Ses grands bras sont posés de part et d'autre de moi. Je me sens minuscule avec lui dans mon dos.

Sans mot dire, il lâche une des poignées et se décolle de moi. Un courant d'air chaud soulève hardiment mes cheveux et je déglutis.

- Je ... Je ne sais pas si je peux le faire, lui annonçais-je, les paupières closes.

- Pff, sottises.

Il m'attrape par le menton et me regarde dans les yeux.

- On se fait ça vite fait, bien fait.

J'inspire une nouvelle fois et acquiesce d'un imperceptible mouvement de tête. Sans aucune anxiété apparente, Thibaud commence à se mouvoir lestement. Je le suis avec précaution, me déplaçant à la vitesse d'une tortue arthritique. Focalisée sur mes mouvements, j'ignore tout ce qui m'entoure. Vide comprit. Puis je relève la tête et m'aperçois que je suis seule. Le temps s'arrête un instant.

- Thibaud ! Appelais-je, horrifiée. 

Je lutte pour rester sereine. Mais les conditions ne sont pas idéales. Il aurait sûrement poussé un cri s'il était tombé, n'est-ce pas ? La panique essaie de s'insinuer en moi. Comment vais-je faire ? Suis-je capable de continuer seule ? Pourquoi ne l'ai-je pas entendu ? Est-il encore vivant ?

- De l'autre côté ! me répond-il enfin. Je suis passé de l'autre côté.

Je pousse un soupir à fendre l'âme et m'apprête à poser une main sur ma poitrine. Puis, me rappelant de la situation plutôt critique, je me reprends et avance jusqu'à l'extrémité du fichu bout de tôle. Je m'accroche à la dernière poignée, fixe solidement mon pied gauche et soulève le droit pour le passer du côté intérieur de la porte. En d'autres termes, je me retrouve en sandwich autour du pan métallique.

- Tiens toi en haut de la tôle.

Je lève la tête. Le haut de la porte est à plus d'un mètre au dessus de moi.

- Et si je te dis, que je n'atteins pas le haut de la tôle .

Il se racle la gorge, désarçonné.

- Ah

Comment ça «Ah» ?

- Bouge pas.

J'attends impatiemment, les nerfs en pelote, que le prince charmant vienne me sauver. Moins d'une minute plus tard, il se tient à côté de moi.

- Accroche-toi à moi.

Il prend un petit air pensif, avant d'ajouter :

- J'espérais avoir à te dire ça dans des conditions plus... Platoniques.

Je me racle la gorge et avec le peu de dignité qu'il me reste, lance railleusement :

- Eh bien, si j'arrive vivante à l'intérieur, je verrai ce que je peux faire.

Un sourire prédateur -contrastant fondamentalement- avec le sérieux des événements s'allume sur son visage.

- Je retiens, m'avertit-il.

Je m'accroche à lui et prie pour que nous ne glissions pas. Le conteneur a cessé de grimper dans les airs. Il semblerait que nous nous dirigions en direction d'un énorme paquebot. Concentrée sur le fait que mes pieds suivent ceux de Thibaud, je remarque à peine que nous arrivons sur la terre ferme.

Enfin, ferme... Façon de parler.

Je reste un instant immobile, lessivée et couverte d'une pellicule de sueur. 

- Il faut qu'on ferme cette porte, annonçais-je en plein processus mental pour reprendre du "poil de la bête".

- T'as un balais ou un truc dans le genre ? Demande Thibaud en contemplant le trou béat avec sa langueur habituelle.

Je me dirige vers la salle de bain précautionneusement.  Thibaud ferme la porte derrière nous et m'observe tandis que je m'agenouille au sol, décolle la moquette et cherche l'ouverture de la trappe que j'ai personnellement installée après avoir surélevé la salle de bain. 

L'octanitrocubane est dans la baignoire, intact, constatais-je au passage.

Mes doigts trouvent la fente de la trappe et s'immiscent à l'intérieur pour soulever le pan de bois.

- Aide-moi à sortir la caisse, je demande à Thibaud.

Je glisse ma main dans une des deux poignées et Thibaud saisit l'autre. Nous parvenons tant bien que mal à -plus ou moins- extraire la boite. 

A moitié extorquée de sa cachette, je place mes mains dessous, immédiatement imitée par Thibaud et nous la soulevons (en essayant de ne pas tomber dans son trou initial). Nous la tirons sur la gauche avant de la poser et de s'affaler au sol. 

Je m'assoie en tailleur et me penche pour récupérer le pied de biche qui se trouve au fond de la cavité. Je tâtonne un instant -en espérant ne pas tomber sur une araignée de la taille de Spiderman- et l'atteins enfin. Je l'insère dans l'ouverture du caisson et l'éventre d'un mouvement vers le bas. 

Thibaud écarte le drap qui recouvre la marchandise, se penche dessus et pousse un cri effaré.

- Tu préparais la III Guerre Mondiale ou quoi ?

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Hello hello !! Je reposte un peu en ce moment. Dites moi ce que vous en pensez :)

Kisses <3


Radicalement VôtreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant