Chapitre 31

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Je tourne la tête en direction de la sortie de secours et le panneau vert situé au-dessus s'allume soudainement. Les battants s'ouvrent avec violence dans un vacarme surpassant les cris qui proviennent de tous côtés.

Le cœur palpitant, je cherche Thibaud. Pas question de le laisser dans le brasier. Une personne me bouscule et en pestant, je monte sur le comptoir pour avoir une vision plus large sur l'assemblée. Après un court moment, je cible Thibaud et me jette dans la cohue à sa rencontre. A coup de coudes et de pieds, je me fraye un chemin jusqu'à lui et agrippe son poignet de toutes mes forces pour le tracter jusqu'à la sortie. Il me regarde un instant, les sourcils froncés, puis plisse les lèvres et s'accroche à mon bras.

Il faut à tout prix que nous réussissions à sortir avant qu'ils n'éteignent le feu et que les portes ne se referment. Des torrents d'eau commencent à tomber du plafond, le système de sécurité vient de se mettre en route. Une dizaine de personnes se sont déjà enfuies et il en reste une dizaine avant que nous puissions passer nous aussi. Je regarde derrière nous. Dimitri, le grand roux et d'autres hommes essaient d'étouffer les flammes que l'alcool rend plus persistantes. Une femme tombe devant moi et Thibaud trébuche sur elle. Je le relève et le pousse en avant. Du coin de l'œil je vois les deux videurs qui arrivent au pas de course pour empêcher les gens de se sauver. Plus que deux mètres et nous sommes sortis.

- Le feu est éteint ! J'entends vaguement dire Dimitri dont la voix ne réussit pas à couvrir le bruit de la foule en panique.
La main de Thibaud se détache subitement de la mienne, arrachée par le mouvement massif de personnes qui l'entraînent en arrière.

Le grand roux se précipite dans le sens inverse de la marée et se dirige vers le fond de la salle. Il peine un long moment pour parvenir à sa destination puis pousse une femme au sol, lui saute par dessus et atteint le mur du fond sur lequel se trouve une sorte de manette. Il glisse sa main à l'intérieur et la tire de toutes ses forces vers le bas. L'eau arrête de couler instantanément et les portes commencent à se fermer. J'écarte le couple qui se trouve devant moi et me jette dans l'ouverture que je maintiens ouverte du mieux que je peux. Mais mes bras ne suffisent pas. Je m'adosse à un côté après avoir posé le sac à dos sur mon ventre et je bloque l'autre avec mes jambes. Mes muscles tremblent sous l'effort. Thibaud est toujours à l'intérieur, enlacé par le couple que j'ai envoyé au sol et qui s'accroche à lui comme à une bouée de sauvetage. Je ne sais pas combien de temps je vais pouvoir tenir. Une goutte de sueur perle dans mon dos et ma tête se met à tourner. La vodka coupée au martini commence à faire son effet. Mes genoux se plient sous la force du mécanisme et les portes m'entaillent profondément le dos. Thibaud se débat violemment et se débarrasse enfin du couple. Il se précipite vers moi et avec de l'élan, se laisse glisser sous mon corps qui se trouve suspendu à un mètre du sol.

Arrivé à l'extérieur, il me tire en arrière et rattrape le sac avant qu'il ne tombe. Les portes se ferment alors sur le petit couple avec une force incroyable. Je me relève. Mes jambes tremblent et je vacille. Thibaud se met à courir et je le suis du mieux que je peux. Mais autour de moi, tout danse. Je m'appuie à un réverbère et bien qu'aveuglée par la lumière, me laisse aller contre. La longue silhouette de Thibaud fait demi-tour et se dirige vers moi.

- Allez, debout, me presse-t-il.

Je grogne. Là tout de suite, j'ai juste envie d'être dans mon lit.

- Comme tu veux, Dimitri l'a dit, si Sergei te rattrape il t'épousera, continue-t-il.

Je pense qu'il me nargue, mais je ne suis pas sûre.

- Tu conduis, lui dis-je en rouvrant les yeux. Je pose les clefs de ma moto dans sa main.

Il hoche la tête et se glisse sous mon bras.

- Fais attention avec ça, articulais-je tout bas en désignant le sac à dos.

- Pourquoi ? demande-t-il. Il y a quoi dedans ?

Je m'accroche à son épaule pour marcher et murmure à son oreille, le regard dans le vague.

- Explosif.

Il s'étrangle mais continue à nous faire avancer.

- A quoi pouvais-je m'attendre, marmonne-t-il dans sa barbe, nous étions dans un bar rempli de mafieux russes.

Je ris, le taux d'alcool que j'ai dans le sang rend ce qu'il raconte hilarant. Nous arrivons devant ma moto sans que je ne me rende compte du trajet.

Thibaud s'assoit et attend que je fasse de même, mais j'ai un problème. Ma Ducati à deux sièges côte à côte. Je ne sais pas lequel choisir. Et il y a deux Thibauds assis sur les deux sièges, je ne sais pas auquel me tenir. Les deux bougent avec une synchronisation parfaite. Peut-être a-t-il un jumeau dont il ne m'a pas parlé ? Je me gratte le menton et réfléchis. Si je m'assoie au milieu des deux, vais-je tomber par terre ? Mon dilemme et résolu lorsque les deux Thibauds tendent leurs quatre mains vers moi et me font m'assoir sur les deux sièges. Peut-être il y a-t-il aussi une deuxième Dior ?

Ils posent deux casques sur ma tête puis s'entourent de mes quatre bras et démarrent. Je suis projetée en l'arrière quand les Thibauds accélèrent. La sensation est exaltante. Tout à coup j'ai une idée parfaitement géniale. J'attrape les Thibauds par les épaules et me mets debout sur les repose-pieds. Je ris et lâche un :

- Youhoou !

Une vois résonne dans ma tête.

- Assied-toi ! Gronde-t-elle.

Comment ? Dieu vient-il de m'adresser la parole ?

Je m'assoie et répond :

- Dieu ?

J'entends un gloussement. Fichtre ! Je viens d'entendre le gloussement de Dieu !

- Mais non, abrutie ! C'est moi !

Je fronce les sourcils, déçue.

- Toi qui ? Et comment peux-tu parler dans ma tête si tu n'es pas Dieu ? Demandais-je à mon interlocuteur, perplexe.

- Moi, Thibaud.

Thibaud aurait-il des superpouvoirs ?

***

Je me blottis contre le dos de Thibaud et cherche les battements de son cœur. J'ai l'impression de flotter sur un petit nuage.

Un court rayon de lumière se fait dans mon cerveau.

Je n'ai toujours pas la tête de Sachka en trophée. Demain, quand le monde ne sera plus double, que Thibaud n'aura plus les capacités d'un X-Men, je partirai seule cette fois derrière mon russe. Je me débarrasserai de mon Blondinet veillant à ce qu'il ne puisse rien lui arriver et je reprendrai ma petite routine de meurtrière. Abby et moi irons terminer notre repas chez l'italien. Une fois par semaine, j'assisterai à une réunion assommante avec des agents en costume gris à la calvitie prononcée. Comme d'habitude, je m'évertuerai à m'habiller avec le plus d'extravagance possible pour m'assurer de ne leur ressembler en aucun point. Tout au long, j'enverrai des messages à Abby et vendredi, je dînerai chez les adorables gens que sont mes voisins. Je jouerai aux poupées avec leur fille tandis que Mary essaiera de faire comprendre à leur fils qu'il y a autre chose que le hard rock dans la vie.

Tout ça me semble extrêmement lointain.

Après tout, comme disait Victor Fleming... Demain est un autre jour.







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Voila, je finis sur une petite touche "philosophique" ce chapitre ! Dior divague C.O.M.P.L.E.T.E.M.E.N.T ! Rappelez-moi de ne plus la faire boire ;) !! Bon sinon, qu'en pensez vous ??

Kisses <3

Radicalement VôtreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant