Chapitre 3

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Mon souffle s'évaporait en buée blanche. Je n'entendais plus d'aboiements ou de cris derrière moi, et je m'autorisai un arrêt bref, appuyée contre un tronc. Les avais-je semés ? Je ne savais même plus depuis combien de temps je fuyais. Je reprenais un peu espoir, et pivotai pour continuer ma route en marchant. Je devais réfléchir à un plan, faire quelque chose pour Victoire et Marc.

Mes espoirs retombèrent comme un soufflé sorti trop tôt du four, à la vue du gros berger allemand qui me barrait la route, le regard braqué sur moi. Il m'avait contourné et je ne m'étais doutée de rien. Mais était-il seul ? Où étaient ses maîtres ?

- Gentil, chuchotai-je bêtement. Ne bouge pas.

C'est pathétique de croire qu'on va arrêter un chien dressé à l'attaque en lui susurrant des mots doux.

Je regardai à droite et à gauche à la recherche d'une issue. Je n'avais encore pris aucune décision quand l'animal bondit, toutes dents dehors. Je me jetai à terre, dans un plaquage digne d'un rugbyman surentraîné et me saisis d'une branche que je lui envoyai dans les babines. Il couina, et j'en profitai pour me relever et courir droit devant. Le sol se déroba sous mes pieds.

Ma chute fut stoppée net par un sol couvert de cailloux pointus et mouillés. Si mon postérieur avait pu crier, il l'aurait certainement fait. Je recommençai à respirer en observant mon environnement. Le chien ne m'avait pas suivie, mais je n'avais pas la sensation d'être tombée de haut. Je devais bouger.

- Tu croyais t'échapper ? rit une voix dans l'ombre, quelque part devant moi.

L'homme qui entra dans mon champ de vision devait au moins mesurer un mètre quatre-vingt-dix, avec des épaules si larges que je doutais qu'il puisse franchir une porte sans passer en crabe. Son crâne rasé était orné de tatouages de dragons et – détail essentiel - il pointait une arme sur moi.

- Lève-toi. J'en ai marre de courir. Si tu fais mine de tenter quelque chose, je te bute.

Je me sentais soudain vide. Plus de peur, plus d'incompréhension, plus rien. Comme si une partie de moi avait compris dès le début que je ne m'en sortirais pas. J'obtempérai comme un automate et le rejoignis.

- Avance devant moi, gronda l'homme.

Il plaqua le canon du revolver sur ma nuque et me poussa. Mes jambes se mirent en marche sans que je le leur ai demandé. Où allait-il me conduire, à présent ?

- Ta copine rousse nous a mâché le boulot. Elle criait comme un cochon qu'on égorge. Je m'étonnerais toujours de la stupidité des humains.

Ses propos me filèrent une décharge d'énergie et je tentai de comprendre. La stupidité des humains ? Cela suggérait-il qu'il n'en était pas un ? Deux solutions, donc : soit j'étais actuellement en compagnie d'un évadé d'asile psychiatrique persuadé d'être une créature surnaturelle, soit j'étais enlevée par les extraterrestres. Et je ne savais même pas quelle possibilité était la moins pire.

Je plissai les yeux pour voir devant moi, alors que mon ravisseur marchait d'un pas vif sans chercher son chemin. Nous arrivâmes rapidement près des deux voitures noires et d'une camionnette surveillées par trois femmes. Deux autres hommes tenaient un garçon qui ruait et hurlait tant qu'il pouvait pour les empêcher de le maîtriser. Mon cœur bondit dans ma poitrine.

- Marc !

- Ta gueule, cracha l'homme derrière moi. Monte là-dedans.

Il me jeta littéralement à l'intérieur de la camionnette et Marc subit le même sort. Il s'écrasa sur le plancher. Je vis qu'il avait un œil poché et des bleus sur les bras. Ces sales types l'avaient sérieusement malmené.

GENESIS (1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant