Chapitre 30

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Mes chaussures claquaient sur le carrelage du couloir que je traversais, les cheveux encore mouillés de la douche battant dans mon dos.

J'étais presque sereine, mes émotions mises à l'écart par mon cerveau GEN programmé pour y résister. Je lui avais donné du grain à moudre avec l'affaire à laquelle je m'intéressais et je trouvais cette capacité de détachement dans de telles circonstances à la limite de l'inquiétant. A présent, je songeais à quel point il était ridicule d'en vouloir à Samuel pour sa relation avec Nacera. Il était juste l'un de mes meilleurs amis, au même titre que Tribal, et rien de plus, donc je n'avais rien à exiger de lui. Certes, elle était détestable, mais tant qu'il ne m'imposait pas la compagnie de cette fille, cela me convenait. Je me jurai de mettre les choses à plat quand je le verrais.

Je tournai à l'angle du couloir et descendis prestement un escalier. Je préférais ne pas emprunter l'ascenseur, pour davantage de discrétion. Personne ne devait savoir que j'allais parler à Rita. J'ignorais précisément où elle était détenue, mais il n'y avait pas tellement d'options possibles hormis l'étage des quartiers de Geb et celui où j'avais moi-même été enfermée. J'optai pour ce second choix et poussai la porte du palier.

Aussitôt, des voix me parvinrent et je ralentis. Je jetai un coup d'œil rapide et fronçai les sourcils. Je m'avançai dans la lumière blafarde du néon.

- Geb ? Qu'est-ce que tu fais ici ?

En bas de jogging gris clair et t-shirt rouge, mon ami GEN sourit et se précipita vers moi. Il m'écrasa contre son torse.

- Luna ! Comment vas-tu ? Tu tiens le coup ?

- Tu es venu la voir ? tempêtai-je, sans prêter attention à ses questions.

Je me dégageai rapidement de son étreinte, et, en deux foulées, fus devant la cellule de Rita. J'échangeai un regard avec la prisonnière. La traîtresse. La meurtrière.

Le feu de mes sentiments brièvement apaisé inonda mes veines.

- Tu viens me rendre une petite visite de courtoisie, Luna ? fit Rita avec un sourire sans joie. C'est trop aimable de ta part.

- Toi, tu la ferme, grinçai-je. Et toi, qu'est-ce que tu faisais ici ? Elle est dangereuse, Geb !

Une expression de gamin pris en faute se peignit sur son visage mais il se reprit très vite. Ces dernières semaines, Geb avait beaucoup progressé et mûri, si bien que j'avais parfois la certitude de converser avec un adulte tout à fait sain d'esprit. Ce fut d'ailleurs sur un ton posé qu'il me répondit :

- Ne sois pas stupide, elle est enfermée. Que veux-tu qu'elles nous fasse, hein ? Rita est mon amie, je travaillais avec elle à l'atelier depuis que mes médecins m'ont autorisé à sortir. J'ai tout à fait le droit de venir la voir.

- Tu comptais lui tirer les vers du nez ? ironisai-je.

- Et toi ?

Nous nous affrontâmes un instant. Il avait raison, j'étais venue en apprendre plus sur la fusillade. Je capitulai et me tournai vers Rita.

Assise sur la planche qui lui servait de lit, sans couverture, elle avait été démise de ses habituelles chaînes et bracelets cloutés. Elle cachait de son mieux sa peur mais elle était tout de même lisible dans ses yeux et dans les tremblements de ses mains.

- Pour qui est-ce que tu travailles ? attaquai-je. Qui a ordonné tout ça ?

- Et toi, pour qui tu te prends ? se moqua-t-elle. Rick va se servir de méthodes bien plus convaincantes pour me faire parler, et ce dès qu'il aura réglé certains problèmes. Tu crois vraiment que me poser la question va suffire ?

GENESIS (1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant