Ils nous tombèrent dessus avant l'aube, et ce au sens propre du terme car un corps lourd s'écrasant sur le mien me tira du demi-sommeil dans lequel je flottais. J'ouvris brusquement les yeux et me débattis aussitôt en poussant un cri à cheval entre un bêlement et caquètement de poule effrayée.
Une femme aux cheveux courts dressés sur son crâne avec du gel me plaquait sauvagement au sol, le nez presque contre le mien. J'arquai le dos et tentai de libérer mes bras pour me débarrasser d'elle. Des bruits de lutte, quelque part sur ma droite, m'indiquèrent que mes amis se trouvaient eux-aussi en position délicate mais je ne les voyais pas. Mon adversaire était plus petite que moi mais bien plus forte et entraînée. Malgré tout, je ne me laissai pas faire.
Je remontai les jambes et balançai d'un coup mes pieds dans son ventre. La GEN, légèrement déstabilisée, relâcha sa prise sur moi et je dégageai mes bras. Je roulai sur le côté et me remis à la verticale en une fraction de seconde, genoux fléchis et prête à l'affronter. Elle se rua sur moi avec la vitesse d'un serpent attaquant sa proie et nous roulâmes dans la poussière. Mes doigts cherchèrent le couteau dérobé dans la cuisine et que j'avais glissé dans une poche de pantalon. Je le brandis devant moi.
- Vas-y, m'encouragea la GEN, un sourire déformé sur le visage. Essaye seulement de me toucher !
- Allez, Miranda, abrège !
La voix de Rick, le chef de la sécurité. Il ne manquait plus que lui. Le cœur battant la chamade, je me jetai sur mon adversaire et visai son épaule avec mon arme de fortune. Elle attrapa mon bas gauche et le tordit si fort que quelque chose craqua. J'étouffai mon cri et la rouai de coups de pieds. Je l'atteignis à l'aine, puis dans l'abdomen et elle faiblit. Peut-être qu'avec un peu de temps, je l'aurais vaincue, ou peut-être me faisais-je des illusions.
Mais un second agent se décida alors à aider Miranda et me saisit le cou par derrière. Il me força à lâcher le couteau. La rage au ventre, je fus contrainte de m'agenouiller devant la GEN aux cheveux hérissés. Je n'avais pas tenu bien longtemps.
L'agent me fit me retourner. Guilhem gisait inconscient dans les bras de Rick lui-même, le nez et la bouche en sang. Marc était maintenu par deux hommes et menacé d'un flingue par un troisième. C'était fini.
- C'est bon les gars, sourit le chef de la sécurité en hochant sa tête tatouée. On ramène les oiseaux dans leur cage.
Ils éclatèrent tous de rire et nous nous mîmes en marche. La colère était brûlante en moi, et je m'en voulais terriblement. Si j'avais opté pour un autre itinéraire, nous aurions pu y arriver. J'avais la sensation de me retrouver des semaines plus tôt quand nous avions été capturés avec Marc et Victoire, et cet échec me cuisait. Je fixai mon regard droit devant moi, refoulant mes émotions de mon mieux.
***
Allan Vallet cogna dans le sac de frappe si fort que celui-ci se détacha de la chaîne reliée au plafond et alla se perdre à l'autre bout de la salle. Il secoua la tête et ne prit pas la peine d'aller le ramasser. Il se contenta de se rendre au vestiaire et de s'essuyer le visage et la nuque avec sa serviette. En passant devant le miroir, il y jeta un bref coup d'œil. L'homme qui lui rendit son regard était assez grand, mais surtout large d'épaules. Il avait les cheveux châtains coupés courts et une barbe de trois jours plus ou moins bien entretenue. Quant à ses yeux, ils étaient d'un bleu-gris incroyable, presque glacé.
Allan se détourna. Ce qu'il voyait, lui, c'était surtout une flamme résignée au fond de son propre regard. Après dix-sept années passées entre les murs de l'Institut, quel espoir avait-il de s'en échapper un jour ?
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GENESIS (1)
FantasyExtrait du journal de Luna Deveille, 30 Mai, 23h12, Institut Bollart Les GEN sont des êtres humains génétiquement modifiés pour devenir des armes surpuissantes et capables de dominer la race des hommes. Ils sont partout, vivent peut-être près de che...