Chapitre 23

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Immobile dans mon lit depuis plusieurs minutes, je jetai un œil au réveil lumineux posé sur ma table de nuit. Je ne me sentais plus fatiguée alors que nous étions rentrées à peine trois heures auparavant, preuve de la récupération rapide des GEN. Dans le lit voisin, Amanda se retourna dans un soupir puis la pièce redevint silencieuse.

Je me levai et me préparai furtivement sans allumer la chambre. Mon amie avait l'opportunité de dormir puisqu'elle n'avait que des leçons au manoir ce matin-là, je jugeai donc inutile de la réveiller. Elle n'avait nul besoin de savoir que j'allais mettre mon plan à exécution – si je ne me dégonflais pas avant.

Je jetai mon sac de sport sur mon épaule et vérifiai une dernière fois que je n'avais rien oublié. J'eus un pincement au cœur à la vue du lit vide de Victoire qui avait découché. Rita, la sympathique amie de Tribal, l'avait vue quitter la Cascade avec un mec brun à gros nez, d'après sa description. J'étais partagée entre la volonté de recoller les morceaux une fois l'orage passé entre nous, et celle de ne plus jamais avoir à faire à elle. Victoire était la meilleure amie qui partageait ma vie depuis des années, mais suite à notre querelle de la vielle, ma confiance en elle s'était morcelée. Deux mois avaient-ils vraiment suffit à changer la fille que je connaissais ? En étais-je responsable ? Et si je n'avais pas agi comme je l'avais fait, la situation aurait-elle été différente ? Impossible de le savoir. Je me sentais très seule malgré l'amitié fidèle témoignée par Amanda et ma rencontre avec d'autres jeunes à la fête.

Je refermai la porte, la gorge nouée. Je fis un crochet par la minuscule cuisine dont chaque couloir de chambre était équipé. Elle était composée d'un îlot central, de deux murs couverts de placards bien garnis et, contre le troisième, de deux frigos et d'un évier. J'avalai des cakes au chocolat et une compote à boire en songeant que si j'avais su qu'il y avait autant de nourriture ici, je ne me serais pas embêtée à fouiller les stocks de la cuisine pour m'évader.

A cette heure matinale – il n'était que quatre heure et demi – je ne croisai pas un chat en sortant du manoir. Les rares lève-tôt vaquaient à leurs occupations en toute discrétion. Je pus donc me rendre au gymnase sans encombre et poussai la porte donnant sur le hall.

De la lumière provenait de la piscine et de deux petites salles de musculation dans l'aile gauche. Je pris à droite et parcouru lentement l'endroit. Tout au fond du couloir carrelé se trouvait la salle de judo et j'entrai, la bouche sèche.

Allan était là, en train de réaliser un équilibre complexe, mains au sol et jambes placées dans un angle spécifique. Il se laissa retomber souplement sur ses pieds et ramassa son t-shirt. Ne dormait-il jamais pour être déjà à l'effort ? J'avais pensé attendre ici et le surprendre à son arrivée, ce qui était plutôt raté.

Je fis un pas timide dans sa direction.

- Tu es venue. Tu as donc pris ta décision.

Les yeux clairs du GEN se chargèrent de contentement mêlé d'un soulagement que je ne compris pas. Cet individu restait une énigme à part entière, mais je me jurai d'en apprendre plus.

- Oui, chuchotai-je, accompagnant ma réponse d'un geste pour lui remettre sa boîte noire, celle qui contenait l'arme.

- Très bien, fit-il en se retournant pour la ranger dans ses affaires.

Un poids s'allégea de mes épaules en me délestant de l'arme, mais cela voulait aussi dire que si je bougeais une oreille de travers, Allan m'abattrait comme il en avait reçu l'ordre. Hop, un trou dans le jardin du directeur – si possible loin de toute fontaine décorée de cupidons – et l'on entendrait plus parler de moi. J'avalai ma salive avec difficulté.

GENESIS (1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant