L'heure de la fin du dernier cours sonne. La journée est passée étonnement vite et je n'ai pas eu le temps de convaincre Darren de ne rien dire. C'est vrai qu'il ne connait pas la réalité, et que le fait que je me cache doit lui faire une belle jambe. Mais, s'il parvient à déclarer que je m'appelle Punkie, et que mon proviseur prenne la peine d'écrire seulement mon prénom sur un moteur de recherche, je suis foutue. Mes études, ma vie, mon futur seront gâchés. Je n'ai donc pas pu lui expliquer tout ça, enfin je ne pouvais pas vraiment : il m'a évitée toute la journée, sans que je n'en connaisse la raison.
Je me dirige, fatiguée, vers ma chambre en réfléchissant. Pour qu'il garde le silence, le meilleure moyen serait de lui dévoiler le pourquoi du comment de cette double identité . C'est vrai que je pourrais très bien être Punkie dans le lycée, la preuve, Darren n'a pas enlevé son écarteur et il n'a pas mi de perruque pour cacher ses mèches violines. Bien que le voir avec une perruque sur la tête devrait être assez marrant. Mais mon père a malheureusement une certaine réputation dont je ne peux me démarquer et qui ne ferai qu'empirer les choses. Je ne sais pas vraiment pourquoi, mais je sens que je peux lui faire confiance. Peut-être est-ce lié à sa connaissance de prison ? Peut-être qu'il a eu un passé difficile et qu'il comprendra le mien ... Qu'est-ce qu'il me prend ? Je me surprends à vouloir qu'il ait une vie désastreuse.
Ce serai bien la première personne extérieure au village à tout savoir, du début à la fin. Me jugera-t-il ? Au pire des cas, il aura au moins une vraie raison pour me détester. Après tout je m'en moque. On dit bien Mieux vaut un ennemi que mille amis non ?
Je suis maintenant dans le bâtiment B, ma chambre étant la B106. Ce couloir est peint en jaune et marron, des couleurs qui se veulent chaudes, mais qui ne font que refroidir l'ambiance pesante de cet internat. Plusieurs motifs décoratifs y sont représentés, et quelques tableaux sont accrochés. Cela donne une allure de salle d'attente. Sur le mur de droite se trouvent les chambres féminines, et du côté gauche celles masculines. Chaque porte de chaque pièce est en bois sombre, presque noir, avec le numéro de la chambre gravé en blanc. J'aime beaucoup ce contraste.
Arrivée devant chez moi, je cherche mes clefs dans mon sac, en vain.
« Merde » juré-je, dépitée. Je m'adosse à ma porte et laisse tomber mes fesses sur le sol. Je mets ma tête dans mes mains et essaye de réfléchir à un moyen que je pourrais utiliser pour ouvrir cette fichue porte pour que je puisse enfin me reposer et penser tranquillement à ma journée. Je décide de rapidement baisser les bras et au moment ou je m'apprêtais à appeler Ty pour lui dire de venir me chercher, je reçois un trousseau de clefs sur le crâne. Mon trousseau de clefs, qui contient une minuscule poupée Barbie avec les mêmes caractéristiques que Punkie, enfin que moi quoi. Piercing, tatouages, vêtements, cheveux, rien n'est passé à travers le filet. Ty me l'avait offert il y a deux ans, voyant que je perdais sans cesse mes clefs, il pensait que c'était un moyen pour moi d'y penser. Je lève la tête et remarque que la personne qui a trouvé mon porte clef et qui me l'a lancé n'est qu'autre que Darren. Bien évidemment, il fallait que ce soit lui, ça n'aurait pas été marrant, sinon.
« Darren, je-» Commençais-je, ne savant pas trop comment commencer.
« Je ne veux pas de remerciements de ta part. Si tu dois me dire quelque chose, c'est la raison pour laquelle tu te caches. Sinon, tu ne m'adresses pas la parole. Si tu savais à quel point je méprise les personnes qui ne s'assument pas... Ah ! Et fais gaffe à tes clefs. Quelqu'un pourrait découvrir ton secret si important . Tu me fais de la peine, Gamine. » Il me quitte sur cette dernière phrase en appuyant le dernier mot avec un air de déception puis rejoint sa chambre qui se situe presque en face de la mienne, deux pièces sur la gauche nous séparant. Je soupire, en entendant sa porte claquer et me redresse, exténuée par tout cela. Je retire mes affaires de mon lit et m'allonge quelques minutes, en attendant d'avoir le courage pour une quelconque activité.
Après le repas, qui au passage laissait à désirer, je retourne dans ma pièce et enlève ma perruque, en faisant attention à ne perdre aucune pince ni aucune barrette, n'ayant pas de stock dans l'enceinte du pensionnat. Je me regarde dans le miroir et me démaquille rapidement, ne supportant plus le mascara qui avait fini par me brûler les yeux. J'enlève le fond de teint que j'avais appliqué et j'aperçois mes deux trous à l'arcade ainsi que mes longs cheveux roses bouclés qui tombent en cascade jusqu'au bas de mon dos. En me changeant et en enfilant mon pantalon puis mon débardeur de pyjama, je frôle mon tatouage des doigts, me souvenant du jour où je l'avais fait. Toutes ces choses qui sont censées me décrire mais que je cache sans cesse. Ce que Ty et mon père ne savent pas, c'est que mon paternel n'est pas l'unique raison pour laquelle je me crée une deuxième identité, et je crois que j'ai besoin d'en parler. Un inconnu serait peut-être la solution, tout compte fait. Seulement, si cela venait à se savoir, et que ceci parvient aux oreilles de mon père, il voudra sans aucun doute que l'on déménage. Ce qui voudrait dire qu'il faudrait intégrer une nouvelle école et s'habituer à être de nouveau dévisagée. Encore mentir sur ma vie. Sans compter que je devrais revenir car mon père ne changera pas de prison, et que je devrais sans doute continuer à lui rendre visite malgré la distance.
Quelques temps de réflexion plus tard, je suis décidée. Je me lève maladroitement en me cognant sur le coin de la table de nuit. Après avoir grogné, je me dirige vers le logement de Darren. Je tape trois coups sur la porte à l'aide de mon majeur droit, comme à mon habitude. Une trentaine de secondes plus tard, il ouvre la porte qui nous séparait, les yeux clos, puis baille en prononçant un raisonnant :
« C'est pour quoi ? »
Je viens de le réveiller, sa voix rauque et son attitude me le montrent. Il porte seulement un short de sport bleu et gris, comme ceux que porte Ty. Un mélange de boucles marrons et violines lui tombent sur le visage, et lui collent le front. Ses lèvres et ses pommettes sont roses et gonflées dues à son réveil récent. Il a une chaîne en argent autour du cou, dans laquelle est entremêlée une fine bague, trop petite pour ses doigts légèrement boursouflés. Il se frotte les yeux à l'aide de ces paumes et me regarde étrangement. Ses pupilles s'ouvrent grandement quand il remarque que je suis face à lui. Il me fixe avec inquiétude alors que je me demande ce qui lui passe par la tête.
« Qu'est-ce qu'il y a ? Ca ne va pas ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ? » Enchaîne-t-il.
« Hein ? Je vais bien pourquoi ? » Répondé-je, sans comprendre ce qui lui arrive soudainement.
« Il est juste minuit, Gamine. »
Minuit. Déjà, minuit. Je devrais prendre mes décisions plus rapidement dorénavant. Mais pour mon entière décharge, cette décision avait besoin de temps pour être prise.
« Piper, qu'est-ce qu'il ne va pas au point de m'empêcher de dormir ?
-Je ne m'appelles pas Piper. Je m'appelles Punkie.
-Oh ! Rosie s'affirme et s'assume maintenant ! C'est un grand pas dans l'histoire de l'humanité ! » Exagère-t-il.
« Arrête ça toute de suite Darren. Tu veux tout savoir ou tu veux retourner dormir ? » Répondé-je sarcastiquement, énervée par son caractère.
Il me répond simplement en se décalant de la porte et en me laissant entrer dans son antre.
« Par ici la vérité. » Prononça-t-il, un sourire aux lèvres et les yeux entrouverts. Il veut la vérité ? Il ne va pas être déçu du voyage.
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DOUBLE JE {Wattys2016/JustWriteIt}
Teen FictionEssayer de la décrire serait tout bonnement impossible. Cette jeune fille âgée d'à peine seize ans voit sa vie résumée à deux personnalités complètement différentes. Elle adore ca. Elle adore ce concept, être « Double Je ». Tome 2: "Dallas-Brewster"...