la salle n.12

48: Voix

Léanne

Je me lève en criant le cri le plus strident que j'ai jamais fait en plaquant mes mains sur mes oreilles.

- Et c'est moi la folle ici, dit Clara, sans bouger ses yeux pers de l'écran.

Léanne. Léanne. Léanne, ta gueule. J'ai mal à la tête. Je vais tuer Leia pour m'avoir donné cette idée. C'EST AUDRÉE!

Je me calme un peu quand elle prononce son nom.

- Ne fais plus jamais ça, je dis en tremblant. J'ai cru que c'était Maurice.

- Je le connaissais, dit Clara. Vraiment le pire. Est-ce qu'il est finalement mort?

Je la regarde droit dans les yeux, pour après détourner du regard parce qu'ils font peur. Le noir est pas si pire mais le blanc, surtout avec le point qui te fixe...

- Qu'est-ce que t'en penses?

À qui tu parles? T'es où, aussi?

- Scuse, je suis avec Clara, une Anormale schizophrène qui a fait une tentative de kidnappage, n'a pas réussi, mais je l'ai quand même suivie pour une raison inconnue.

- Parce que j'inspire la confiance, me répond-t-elle. Aussi, juste comme ça, ma musique a beau être forte, je ne suis pas sourde. Et elles sont offensées.

Elles?

- Les trois voix qu'elle entend. Je te l'ai-tu dis qu'elle était folle?

- Et la folle a vos billets en sa possession. Elle espère recevoir des remerciements et non des insultes.

Des billets?

- Dé, regarde, je te donne la permission de fouiller dans ma tête pour te rattraper. J'arrive bientôt.

Je regarde Clara qui me tend les billets.

- Où est-ce que tu nous emmènes?

- Montréal. Et je ne vous emmène pas, vous aller prendre un taxi pour l'aéroport de Moss. Voici de l'argent pour le taxi, des papiers pour y résider et votre nouvelle maison, dit-elle en me donnant les papiers. Un appart spécialement fabriqué pour les Anormaux réfugiés, avec des trappes et armes cachés. Même si tu n'en as pas vraiment besoin. Créer et payer par un donateur anonyme, dit-elle en se pointant du doigt. Vous allez être les premiers résidents. Voici mon numéro si quelque chose se complique.

Elle me passe une carte d'affaires avec son numéro et le symbole du Ying-yang.

- Tu as une carte d'affaires, vraiment?

- Oui, pour deux raisons : ceci est une compagnie importante qui aide le monde et je suis beaucoup trop paresseuse pour l'écrire à chaque fois. Je reviens, cinq secondes, dit-elle en partant dans une autre salle.

Elle revient avec un sac en bandoulière de toile kaki, me prend les documents des mains et les mets dedans.

- C'est cadeau. Part, il va faire froid et tu ne vas pas survivre avec ta petite veste. Trouée en plus.

- Dernière question. Pourquoi tu fais ça?

- J'étais presque une Écervelée. Je me suis échappée à temps, mais pas nécessairement mon amie que j'apportais avec moi. Je ne l'ai jamais revue. Elle doit être morte. Alors j'aide ceux qui sont encore vivant.

Un moment de silence.

- Bon, c'est assez, tu peux partir.

Elle me pousse vers la porte et dès que je passe le seuil de la porte, elle la ferme dans mon dos en disant au revoir.

Elle est vraiment bizarre ton amie, me dit Audrée.

- Je sais, je réponds quand je réalise que, pour les gens normaux, je parle dans le vide.

Je rentre au motel une vingtaine de minutes plus tard, ouvrant la porte et tenant le sac kaki comme un trésor.

- Notre ticket pour le plus loin possible d'ici, dit Audrée en se levant de sa chaise.

Leia se lève du lit, en s'appuyant sur le rebord de la table de chevet cette fois-ci, ne voulant pas répéter le face-à-face avec le sol de la dernière fois.

- Est-ce que l'histoire d'Audrée est vraie? Il y a une Anormale, une ex-Recruteuse, qui aide n'importe quel Anormaux qui se retrouve ici. Soit la chance cogne à nos portes ou c'est un piège.

- Ça m'étonnerait. Je lui fais confiance.

C'est ce que je dis. Mais, quand même, quand on rentre dans le taxi le lendemain, durant tout le trajet, ça me tracasse de l'avoir fait confiance si vite.