Chapitre 5

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- Qu'est-ce que tu fabriques encore ?

Au son de cette voix plus qu'à cause des paroles, je relève la tête vivement. Sesshômaru-sama est là, le regard empreint de sidération. Il ne me laisse pas le temps de lui répondre, ou de même chercher à formuler une réponse correcte. Il me pousse pour me redresser sur mes genoux, m'arrachant un gémissement de douleur au passage. Sesshômaru passe alors son avant-bras sous mes fesses et me soulève. De honte et de bonheur – c'est un mélange assez particulier – mon visage prend feu.

- Sesshômaru-sama ?!

Mon cœur bat à cent à l'heure, et le pire, c'est que je sais qu'il l'entend. Je me répète inlassablement qu'il faut que je me calme alors que Sesshômaru se lève, me faisant décoller du sol comme si je ne pesais rien. La poitrine appuyée sur la fourrure qui recouvre son épaule j'aimerai protester mais mon dos se courbe légèrement, faisant irradier la partie brûlée de ma peau. Je grimace en empoignant les poils de sa queue. Ca a au moins le bon point de me déconcentrer.

Les enfants nous suivent sans un mot. Résignée, je me laisse portée en essayant de rester droite contre lui.

- Désolé de vous ennuyer depuis hier...

Seul le silence me répond. Evidemment...

- Mmh, finit-il par faire.

Ce n'est qu'une faible réaction. Mais contrairement à d'habitude, il réagit. Mon cœur se remet à galoper. Sesshômaru-sama n'est pas le genre d'homme à qui on peut imposer quoi que ce soit. S'il est venu me chercher c'est parce qu'il le fait de son plein gré. Cette pensée parvient presque à m'arracher n sourire mais je le réprime. M'habituer à sa gentillesse n'est pas une chose que je peux me permettre. Sitôt que ce sera fait, il s'en ira, et une douleur d'un tout autre genre prendra possession de mon esprit et mon cœur.

De retour chez Kaede-baba, il me dépose du mieux qu'il peut sur ma couche. Kaede-baba prend le relai pour changer les bandages qui en ont bien besoin. Il ne s'en va pas pour autant et s'assit en tailleur dans un coin, à l'abri des bambins qui jouent autour de lui. Seule Aïko s'approche de lui. Il la laisse faire. Je suis même étonnée de le voir la rattrapée alors que sa tête part en arrière quand elle essaye de grimper sur ses genoux. Il l'attrape alors par le col et la pose dans le creux de ses genoux. Tel un chaton, la petite se roule en boule et s'endort. Pendant toute la démarche, Sesshômaru-sama ne trahi aucune émotion.

Je détourne la tête pour discuter avec Kaede-baba qui applique de la pommade autour de ma cheville. J'adore Aïko, mais la voir avoir le privilège de se coller à lui me pince le cœur. Même gamine, je n'ai eu que très rarement cette chance. Et les trois quart du temps, quand je faisais fi de ses protestations, il me fusillait du regard. Rien qu'à cette pensée, le petit pincement devient une poigne autour de mon cœur. Fermant les yeux, je redresse légèrement les épaules et inspire calmement. Je visualise mon cœur sous forme de boite, je prends le temps qu'il me faut pour y enfermer tous mes sentiments actuels. Surtout ma jalousie envers une enfant innocente. Si je venais à lui retourner cette émotion atroce dans la figure, cela aurait certainement de lourdes conséquences. Lentement, je retrouve un minimum de calme intérieur. C'est un exercice que Sango-oneesan m'a appris au début de mon entrainement au combat.

« Il arrive que l'on perde de précieux camarades sur un champ de bataille ou lors d'une mission. En pleine action pourtant, il est important de rester concentré sur l'objectif principal. Si on se lasse distraire par des sentiments inutiles, on risque d'y perdre également la vie. On a tout le temps après pour pleurer nos morts. » C'est ce qu'elle m'a dit à ma première leçon.

Actuellement, je dois m'y plier (pour mon bien et celui des autres). Les larves sont encore dans les parages, ce n'est pas le moment de se laisser aller, des vies sont en danger.

Rin no monogatariOù les histoires vivent. Découvrez maintenant