Changer d'air

Blue women

Quand elle sortit de la chambre, elle tomba sur un couloir haut mais étroit, aux murs recouverts de carreaux de mosaïque turquoises et blancs. Au sol, le même tapis de bois que dans la chambre feutrait le bruit des pas. Plus elle avancait, plus les lanternes d'or suspendues au plafond se faisaient rares et plus Ashley avait peur.
Elle endit des murmures - un rire cristallin étouffé puis quelques mots chuchotés, qui semblaient êtres sifflés par un reptile.
Une femme s'avanca vers elle. Longs cheuveux noirs de jais, qui ondulait jusuq'au bas de son dos, peau café au lait, vêtue d'un voile transparent qui couvrait ses épaules et ses interminables jambes, d'une robe très courte en dessous, ceinture d'or à la taille, diadèmes assortis sertis de perles autour de son crâne, lèvres cerises tordues en un rictus moqueur, regard envoûtant et joueur, mince mais imposante, l'air déterminée.
Elle était sublime.
Elle contourna Ashley en faisant retentir son rire mélodieux.
Troublée, Ashley avanca. Plus loin, elle croisa trois autres femmes.
Elles, au contraire, semblaient perdues.
La première avait des cheuveux acajous raides, qui plongeaient au dessus de ses épaules fines. Elle avait la peau blanche, portait une robe verte amande qui tombait en cascade à ses pieds nus, ses yeux gris verts exprimaient le dégoût. Un pendentif en argent scintillait sous son cou. Ashley lui aurait donné 15 ans. Elle serrait contre elle une femme un peu plus petite, encore plus maigre, plus jeune et plus perdue, qui lui était semblable. Même couleur de peau, même regard, même visage, mêmes lèvres fines, même couleur de cheuveux. Les siens etaient relevés en chignon, attachés par une chaîne en argent, sa robe était mauve, et son maquillage renforcait son côté fragile.
A côté d'elles, une blonde aux cheuveux en bataille avait les larmes aux yeux. Le regret et les remords la rongeait. Elle avait deux cicatrices à la joue, flottait dans un T-shirt sale et tellement grand qu'il lui arrivait aux genous. Il était déchiré par endroits et elle avait découpé une lanière du bas pour s'en faire une ceinture.
Contrairement aux trois autres filles, elle n'avait aucun bijoux, elle n'était pas maquillée, ses vêtements ne la mettaient pas en valeur et étaient usés.
Son regard était un mélange de haine et de violence, mais quand elle croisa Ashley, ses traits se radoucirent après qu'elle l'ait dévisagée. Ce regard, qu'elle lui avait lancé, c'était de la compassion. Et étonnement, elle paraissait plus bléssée ainsi.
Ashley se demandait comment elle s'était fait cette cicatrice. Ou plutôt, elle essayait de se persuader que cette cicatrice ne lui avait pas été infligée par Jhon.
Elle repensa à ce qu'il lui avait dit un peu plus tôt.
" on est seulement tout les deux "
Rien qu'en se rendant à la salle de bain, Ashley avait croisé quatres femmes. Et en repensant aux propos de Tom, elle commencait à s'imaginer les pires scénarios.

Au fond du couloir, il y avait deux portes. Ashley hésita. Elle toqua avant d'ouvrir la première.
Ce n'était pas une salle de bain. C'était un sorte de bureau. Sur le mur d'en face, il y avait une espèce de coffre en acier, fermé par plusieurs cadenas complexes. Quelqu'un avait écrit au marqueur:
"Mon pognon. Ma puissance. La raison pour laquelle mon palais est une prison pour vous."