★ Chapitre 56 ★

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Je manque de m'étouffer avec ma propre salive.

- Laura ? Non maman c'est impossible que ce soit elle, tu dois te tromper, ce n'est pas possible.

Mon visage est complètement déformé par le dégoût qui me prend à la gorge. Ma sœur n'a pas pu me trahir comme cela. Surtout au moment où l'on venait enfin de se retrouver ! J'ai envie de pleurer mais je me retiens. À la place, je mets mon plat de pâtes dans le micro-ondes et tourne le dos à ma mère. J'ai les deux bras tendus sur le plan de travail et j'essaie en vain de réguler ma respiration qui s'est accélérée.

- Je me demande comment tu as pu devenir comme ça, Elsa, commence ma mère. Tu me déçois beaucoup ! Surtout après tout ce que j'ai fait pour toi...

Je me tourne brusquement, le sang de mon bras ensanglanté battant à tout rompre dans mes veines. Mes yeux sont grands ouverts et je suis complètement ahurie.

- Tu as toujours été là pour moi ? Tiens c'est une première ça ! Félicitation ! Mais maman, arrête de te voiler la face derrière la mère parfaite. Tu n'as jamais été là pour moi, jamais ! Toujours en voyage, toujours chez des amis, toujours dans une autre ville, un autre pays. C'est Maddie qui nous a élevé maman, qui m'a élevé, ce n'est pas toi !

Je remarque qu'elle n'avait pas envisagé cette réaction de ma part, mais tant pis. Au moins, je l'ai dit, j'en avais besoin. Mais j'ai alors l'impression qu'elle ignore ma question car elle me répond :

- Comment tu as pu devenir comme ça ? C'est ça que je ne comprends pas...

Je hausse les épaules et sors mon plat chaud du micro-ondes.

- Ne cherche pas à savoir maman, c'est trop tard de toute façon. Le mal a déjà été fait...

Et après un dernier regard, je quitte le rez-de-chaussée pour retourner dans ma chambre. Je mange lentement, en pleurant, repensant à l'existence minable que je suis en train de mener. C'est tellement triste d'être dans un tel état à presque dix-huit ans. C'est triste...

Lorsque je finis mon plat, je le pose sur mon bureau et enfile encore une fois mes écouteurs qui sont mon seul moyen d'évasion et pleure en silence. Mais je repense surtout à mon père. Je ne pense qu'à lui pendant un temps infini. Je me remémore tous les bons souvenirs de sa compagnie et mes pleurs redoublent d'intensité. Les mains plaquées sur mes yeux, je n'ai qu'une seule pensée à ce moment-là : mourir. Je ne veux plus faire partie de ce monde, je n'en ai plus la force.

Mais avant que mes pensées les plus noires ne continuent de m'envahir, les bras de Morphée m'emportent dans un sommeil profond et semé de cauchemars.

***
Le réveil est dur, très dur. Je tape rageusement sur l'objet qui me réveille inlassablement tous les matins et grogne comme tout les jours de la semaine. Les vacances de Noël sont terminées. Je ne suis ni heureuse, ni triste. Je m'en fiche à vrai dire. Je veux juste aller noyer mon chagrin dans les cours et la routine scolaire.

Je me lève doucement, en m'étirant et me dirige d'un pas lent vers ma salle de bain. J'ai pour habitude de prendre ma douche la veille pour pouvoir dormir plus. Question de pratique seulement. Mais ce matin, quand je vois mon reflet dans le miroir, je remarque la gravité de la situation sans pour autant chercher à la changer. Mes joues ce sont creusées pendant ces vacances et j'ai perdu près de cinq kilos. J'en suis plutôt contente à vrai dire. Mais ce sont des cernes violines qui ornent mon visage à présent. Je ne dors plus beaucoup la nuit, je préfère pleurer et me mutiler. Je suis dans un cercle vicieux. Le même que celui dans lequel j'étais tombé moins de deux ans plus tôt. C'est compliqué...

Après m'être habillée d'un slim noir et d'un gros pull en laine bleu foncé, je passe une vingtaine de minutes à camoufler mon visage fatigué et ravagé par la tristesse sous des couches de maquillages. Je prépare ensuite mon sac de cours et enfile une paire de lunettes. En fait, ce sont des lunettes qui me servent uniquement pour lire mais aujourd'hui, je me sens obligée de les mettre pour cacher au mieux ces horribles cernes. Je descends ensuite au rez-de-chaussée et y découvre un Julian attablé dans la cuisine.

- Salut Elsa ! me salut-il d'un geste de la main.

Il boit ensuite une gorgée de café tout en me fixant, attendant une réponse. Je soupire en levant les yeux au ciel et lui répond malgré moi un bref «Bonjour». Je m'empare ensuite d'une pomme que je mets dans mon sac et enfile une paire de basket ainsi que ma parka avant de sortir de la maison sous le regard de mon ex.

Une fois à l'extérieur, le froid s'empare des moindre recoins de mon corps et je frissonne légèrement. Je ressers un peu plus ma veste contre moi et avance dans les rues de mon quartier pour me rendre au lycée. J'ai un peu plus d'un quart d'heures de marches jusqu'au lycée. Ça fait quatre ans que je fais ce trajet et il me paraît à chaque fois un peu plus différent. Enfin...

- Elsa ! Oh mais ça fait longtemps ! s'exclame quelqu'un dans mon dos.

J'espérais au fond de moi ne pas avoir à le croiser avant quelques jours encore mais apparement non. Le destin en a décidé autrement. Je me tourne alors pour faire face à mon ami.

- Tiens, Cameron ! Comment vas-tu ?

Je feins être heureuse de le revoir et il attend d'arriver à mon niveau pour me répondre, serrant lui aussi sa doudoune contre lui.

- Ça irait mieux si tu m'expliquais pour quelle raison tu n'as répondu à aucun de mes appels ni aucun de mes messages depuis Noël.

Je détourne les yeux. J'ai dû mal à mentir à Cameron et il le sait. Mais je n'ai pas pour autant envie de lui parler de mes problèmes.

- C'est compliqué... Arrête d'essayer de comprendre.

Je me referme automatiquement sur moi-même, c'est un réflexe.

- D'essayer de comprendre quoi ? s'exclame-t-il en faisant des gestes avec ses bras au moment où nous sortons de la résidence. Même Shawn, que je n'apprécie pas forcément, est venu me parler pendant les vacances à ton sujet ! On s'inquiète tous mais tu n'as pas l'air de t'en rendre compte.

Shawn ?! Dites moi que je rêve ? Ils ne peuvent pas se dire que j'ai le droit d'avoir une vie personnelle un peu ?

Au lieu de lui répondre, je sors une cigarette et l'allume vite pour pouvoir la fumer. Nous continuons à marcher dans le froid de l'hiver dans un silence de glace. Je sais que Cameron en a marre mais ça m'est égal. Je n'ai pas envie de parler de toute façon.

- Elsa ? commence Cameron pour briser le silence. J'ai quelque chose à t'avouer.

Sa voix n'est pas comme d'habitude. Elle est timide et maladroite, comme un enfant. Je lui jette un coup d'œil en coin et je le vois regarder au loin.

- Je t'écoute, je dis entre deux bouffées de cigarettes.

- Je... Écoute, en fait, ça fait depuis des mois que ça dure mais je l'ai su dès le premier jour où je t'ai vu et voilà je... C'était vraiment compliqué au début. Je ne comprenais plus rien de ce qui se passait, de ce que je ressentais. Mais je pense que ca nous ferait du bien à tous les deux si je te le disais maintenant...

Oh non ! Ne me dites pas que c'est ce que je pense ? Non... Pas maintenant, pas maintenant !

- Je t'aime, Elsa...

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Désolée pour le gros retard mais en ce moment je n'ai plus le temps d'écrire et mon ordinateur a planté (racontage de vie 😂) !

Bref bref j'espère vraiment que ce chapitre vous a plu ^^

Bye bye 😘

Douleur Héroïque // MagconOù les histoires vivent. Découvrez maintenant