10.

1.1K 109 14
                                    

Je courais. Il faisait noir, je ne voyais rien. Ce tunnel était sans fin. Mes pieds frappaient les flaques d'eau croupie en chœur avec marespiration de plus en plus laborieuse. Mes poumons étaient en feu mais je ne me serais arrêtée pour rien au monde. Il fallait que je continue, que je force.

Je ne céderai pas. Je ne faillirai pas. Il fallait que je continue à courir sans ralentir. Mon rythme était plus soutenu que j'en avais l'habitude mais je pouvais le faire. Je n'avais pas le choix. Il fallait que je le fasse. Si je faiblissais, j'en paierais le prix.

Ma volonté m'avait fait tenir jusque là. Ça devait continuer. Jusqu'à ce que je sois en sécurité. Jusqu'à ce que je l'ai semé. Il fallait que j'en trouve assez pour tenir le choc. Je pouvais le faire. Si j'y croyais suffisamment fort, mes jambes ne céderaient pas.

Je sortis enfin du tunnel et je débouchai en rase campagne. Je continuai à courir sur le bord de la route accidentée au milieu des pâtures. J'étais loin de tout, perdue au milieu de nulle part. Et derrière moi, cette silhouette qui me poursuivait sans fatiguer...

Mon pied tomba dans une flaque d'eau plus profonde que les autres et je perdis l'équilibre. Je tombai tête première dans la boue. Mes mains s'enfoncèrent dans le sol mou, me faisant patauger désespérément pour me relever. Je retombai plusieurs fois avant de parvenir à enfin me remettre sur mes deux jambes et à reprendre ma course folle sur le bord de la route.

Je titubai en regardant rapidement en arrière. Il devait s'être rapproché. Mais il n'y avait personne. Je me ralentis en me retournant mais je ne distinguai plus sa silhouette. Il n'y avait plus que la route vide, entourée par les champs. J'étais seule et isolée, pourtant à peine à quelques minutes de la ville.

Où avait-il pu disparaître ? Je l'avais vu. Je savais qu'il était encore là. Je le sentais dans le creux de mon estomac, dans l'alarme au fond de mon crâne qui hurlait « cours ! ». Il était toujours là mais je ne le voyais plus.

Et c'était encore pire.

Sans perdre plus de temps, je me remis à courir vers ma rue. Je ne devais pas prendre de risque. Qu'il soit encore là ou non, je devais retrouver la sécurité d'une allée passante.

Je me remis à courir, le souffle court, les jambes en feu, un point de côté des plus terribles me déchirant le flanc. Reprendre ma course jusqu'à la ville me parut être ce que j'avais fait de plus difficile depuis longtemps.

Je me traînai jusqu'à l'appartement, épuisée mais rassurée d'être enfin au milieu des bâtiments. Les gens me regardaient et murmuraient sur mon passage sans même chercher à me demander si j'allais bien, ce qu'il m'était arrivé ou même juste si je n'étais pas blessée. Non. Ils se contentèrent de me regarder passer et de murmurer.

Je poussai la porte et je m'effondrai dans l'entrée. Dans le canapé, William sursauta.

- Skylar !

Il bondit et me rejoignit à toute vitesse. Il me prit par le bras et m'aida à me lever. Il m'abreuva de questions que j'entendis à peine. Il me soutint par le bras jusque dans la salle de bains et il disparut le temps d'aller chercher des vêtements pour me changer. Il les posa à côté de moi et s'accroupit pour pouvoir me regarder dans les yeux sans me forcer à relever la tête.

- Tu n'es pas blessée ?

Je secouai la tête. Il prit le parti de vérifier malgré tout, soulevant mes bras, palpant mes jambes. Je le laissai faire, luttant contre les larmes qui me brûlaient les yeux. Je n'avais pas honte de pleurer devant William, plus depuis très longtemps. Toutefois, si je me laissai aller, je risquais de ne plus savoir m'arrêter.

Find MeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant