19.

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Je continuai de trembler longtemps après que nous nous soyons tous réfugiés dans le salon et que William m'ait enroulée dans un plaid donné par Nyles. Le lustre diffusait une lumière chaude et rassurante qui ne parvint pas à me réconforter. J'observai Camden qui allait et venait devant les fenêtres, la batte pendant au bout de son bras, sa main tirant sur ses cheveux.

J'avais du mal à croire qu'il avait été là. Il, elle, ça... Ça n'avait plus d'importance. Quoi ou qui que ce soit, ça s'était tenu de l'autre côté de la route. Et comme lorsque c'était apparu durant mon jogging, ça avait disparu avec une facilité et rapidité inhumaine. Presque surnaturelle.

Tout s'était passé si vite que ça me paraissait irréel, comme un cauchemar dont je viendrais de me réveiller et dont je ne me souviendrais pas totalement. Mon seul réconfort résidait dans le fait que je n'étais pas la seule à l'avoir vu, cette fois.

Je ne croyais pas au surnaturel, aux fantômes, aux démons ni rien de ce genre. Je n'y avais jamais cru et je ne comptais pas commencer. Il devait forcément y avoir une explication rationnelle et Will allait la trouver. Parce que Will la trouvait toujours. Il savait toujours comment expliquer les phénomènes les plus étranges.

Toutefois, lorsque je me tournai vers lui, il avait cet air qui me tordait l'estomac et me faisait penser que plus rien n'allait, que le bateau prenait l'eau. Il n'avait pas besoin de dire quoi que ce soit. Je savais que, cette fois, je n'obtiendrais pas de dissertation cartésienne et terre à terre sur ce qu'il venait de se passer.

Nyles serrait Sierra dans ses bras, la berçant, patientant pour que quelqu'un lui explique enfin ce qu'il se passait. Devon avait l'air de celui qui est à deux doigts de vomir sur le tapis. Sa peau avait l'air cireuse et grise, comme s'il était malade, atteint par une grippe sévère qu'il n'avait cherché à soigner.

Ce fut William qui trouva le courage de briser le silence. Sa main se figea au milieu de mon dos alors qu'il se raclait la gorge. Je gardai le regard fixé sur Camden, sur la batte qu'il traînait sur le carrelage. Est-ce qu'elle serait réellement utile contre cette chose... personne ?

Je ne tenais pas à penser que ça put être autre chose qu'une personne faite de chair et de sang. Je ne parvenais pas à y croire. Le paranormal, très peu pour moi. J'adorais lire les histoires, regarder les vidéos (truquées) sur internet, les documentaires, les films... Ce n'était pas pour autant que je croyais à tout ça. Au contraire. Chaque histoire de fantôme, d'esprit ou, mieux, de démons, de poltergeist... Chacune d'entre elles était une nouvelle brique qui construisait la Grande Muraille entre moi et la croyance au paranormal et au surnaturel. Parce que je croyais encore moins aux aliens que je ne croyais aux fantômes.

- Sky... Est-ce que c'était... ?

Il ne termina pas sa question mais je sus sans mal à quoi il faisait référence. À ce jour où j'avais débarqué à l'appartement couverte de boue, l'air terrifié d'une biche ayant à peine échappé au chasseur sur le visage.

Je hochai simplement la tête. Je n'avais rien à dire de plus.

- Que s'est-il passé ? céda finalement Nyles, trouvant du courage dans le fait que Will avait rompu le silence en premier. Je n'ai rien vu...

- Il y avait quelqu'un, articula Camden.

La brusque interruption de ses mouvements me fit relever la tête. Il s'était figé à la manière de quelqu'un qui venait de croiser le regard maudit de Méduse. Ses yeux bruns se fichèrent dans les miens, aussi effrayés que je l'étais. Il ne chercha pas à se cacher derrière une quelconque fierté masculine. Il me laissa voir combien ce qu'il s'était passé le terrifiait. Étrangement, ça me fit du bien. Je me sentis... en phase. Comprise. Lui comprenait ce qu'il se passait réellement avec ce stalker et je n'avais plus à craindre d'être prise pour une folle.

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