Chapitre 15

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Toute la suite fut un peu floue. Comme si mon esprit avait lui-même zappé certains passages. C'est donc pour ça que je me retrouve légèrement dubitatif lorsque Zelmah m'informe que l'on est arrivé en plein centre-ville de la capitale. Qu'est-ce que je fous ici ? Il faut pourtant trois heures de voiture pour aller jusqu'à la Grande Ville... Qu'est-ce que j'ai fait pendant tout ce temps ? La fillette à mes côtés ne se formalisa pas de mon manque de réaction total, et empoigna ma main, nous entrainant à l'intérieur d'un building aux allures gigantesques.

Le grand et spacieux hall qui s'offrit à nous me fit presque halluciner. Tout était somptueux, du carrelage imitant l'effet du marbre, aux murs boisés, sculptés avec minutie et précision. Chaque détail avait été parfaitement calculé pour donner à cet endroit un charme luxueux et inégalable. Si bien que je me refusais de toucher quoi que ce soit.

La deuxième chose qui me frappa fut l'absence totale de personne, si ce n'est une jeune femme au sourire Colgate, assise derrière le comptoir de la réception. Quoi que... Vu l'heure tardive cela n'a pas grand chose d'étonnant.

-          Qu'est-ce que l'on fait ici ? Osais-je demander, parcourant encore une fois la pièce des yeux.

-          Je te l'ai pourtant expliqué. Soupira Zelmah.

-          Hein ?

Elle soupira à nouveau, se plaignant de ma tendance à beaucoup trop me perdre dans mes pensées.

-          Ce bâtiment appartient à l'Ordre, et nous allons nous entretenir avec le Conseil. Comme promis, tu sauras la vérité sur cette femme qui dit s'appeler « Ann ».

Ordre ? Conseil ? Si mes souvenirs sont bons, il s'agit d'un regroupement de vampires... Dont les toutes premières sangsues... Et je vais les rencontrer. Magnifique. Dans quoi me suis-je encore embarqué ? Mais la curiosité est telle que je ne peux m'empêcher de trépigner. Zelmah ne me laissa pas le temps de poser d'autres questions. Elle saisit vigoureusement ma main, et me traîna à sa suite dans un dédale de couloirs. J'avais la forte impression que tout se ressemblait, que chaque nouvelle intersection me mènerait à l'ancienne. Cet état de malaise empira lorsque l'on se stoppa face à une lourde porte en métal. La rouille et l'usure présente dessus contrastaient fortement avec l'apparence si riche de l'endroit.

Zelmah toqua énergiquement contre la surface plane et commença à se ronger frénétiquement l'ongle du pouce.

-          Quoi qu'il arrive. Commença-t-elle.  Ne me tiens pas tête, ne parle que si tu y es autorisé, et surtout... Surtout, ne le regarde jamais dans les yeux, il a horreur de ça. Le dernier qui s'est risqué à le faire a fini éventré.

Ma nervosité monta en flèche face à cet annonce... Mon regard se porta automatiquement sur mes pieds et j'étais certain qu'il ne s'en détacherait pas. Elle n'avait pas précisé de qui elle parlait, mais je me doutais bien qu'il s'agissait de l'originel... Je m'attendais presque à voir apparaitre un être avide de chair, sadique, aussi répugnant et monstrueux de l'intérieur comme de l'extérieur.

Le crissement de la porte contre le sol me tira de mes pensées. Un homme nous faisait face. Il était grand sans trop l'être, son visage était fermé, vide de toutes émotions. Plusieurs rides étiraient les coins de ses yeux et les contours de sa bouche. Ses cheveux gris étaient ramenés en un chignon dressé sur le haut de son crâne. Il avait l'air un peu bourru, rustre, voire extrêmement associable. Ses petits yeux se plissèrent lorsque nos regards se croisèrent, me faisant paniquer stupidement. Il adressa alors un hochement de tête d'une façon plus ou moins affective à Zelmah, bougonnant une phrase d'accueil d'une joie peu convaincante.

JarodOù les histoires vivent. Découvrez maintenant