14-Le réveil de la Bête.

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A l'annonce de la tragédie, le père de Gu Hai s'était déplacé personnellement. Ses services prirent en charge toutes les opérations liées à l'accident. Leur efficacité permit d'éviter une humiliation pour le lycée et ses faibles moyens. Le Directeur du lycée ne s'était pas montré, remplacé par un officiel du bureau du Commandant Général. Rien ne devait compromettre cette machine bien huilée.

Gu Wei Ting avait cherché son fils à son arrivée. Sans succès... Celui-ci était introuvable, même pour ses hommes. Il savait tout et voulait lui parler. Non ! Il voulait l'aimer, le serrer dans ses bras. Comme jamais. Il aurait aimé écouter son fils plus que sa fonction. J'ai tout gâché...

Le milieu de l'après-midi était passé. Yang Meng arriva au lycée, il avait beaucoup marché.

Il y avait encore du monde affairé ici et là. Un service pour aider les élèves traumatisés, anxieux, angoissés, avait été mis en place par le service d'État. Tout se faisait en silence. La vie trépidante du lycée avait quitté ses murs.

Yang Meng savait que le seul endroit où devait se trouver Gu Hai, était la salle de toutes les débauches. La salle où serait allé Yin Zi si un malheur avait frappé un de ses amis, surtout Gu Hai.

Il marcha en se recueillant, pensa à tous ces camarades. Ses pas étaient machinales.

Il venait de voir son ami presque mort, il était ébranlé, comme s'il perdait un frère. Non, Yin Zi n'est pas mort ! C'est Yin Zi, il a toujours été là, pour toi. Ne pleurs plus, tu dois être fort, une fois dans ta vie, tu dois être fort ! Il compte sur toi... Il pensa ces mots pour s'encourager, mais, aussi pour affronter la Bête qu'il avait vu se dresser tout à l'heure. Il avait déjà peur.

Depuis que Gu Hai avait faillit devenir fou, tous dans le lycée, comme Yang Meng, avaient peur. Plus personne n'osait en parler ouvertement. Peut-être qu'avec le temps... ?... Pour Yang Meng, tout ce qui venait d'arrivée était terrible, mais, aussi avait un côté extraordinaire. Quand il pensait au plongeon de Yin Zi, il y voyait toute l'humanité de son ami. Quand il pensait à Gu Hai et son cri de douleur, il y voyait la peine de son amour perdu. Mais comme avec ces deux là, depuis le début, c'est beau et terrible à la fois !

Il se promit d'être fort, quoi qu'il se passe dans cette pièce.

Il arriva et s'arrêta. Il entendait une forte respiration, celle de quelqu'un d'endormit. Il rassembla tout son courage, pensa à son Yin Zi et entra doucement.

Gu Hai était allongé au sol, au pied du canapé, enroulé dans la toile. Celle-ci se soulevait sur la poitrine puissante. La lumière du jour diminuait et l'orage grondait encore un peu. Quelques éclairs illuminaient la pièce, comme un flash. Tout cela avait une aura de surnaturel. On croirait une image du film, « La Belle et la Bête » de Jean Cocteau.

C'était un film que Yang Meng aimait, même s'il lui faisait peur parfois. Le côté surréaliste et la profondeur du noir et blanc. Il montre que dans toutes les choses les plus horribles, une étincelle d'amour pouvait jaillir et vous changer. Gu Hai lui faisait penser à cette homme devenu Bête, car il ne sut contrôler sa colère. La Belle était son Yin Zi venu sauver cette Bête qu'il voyait allongée, là, à la respiration bruyante. Allons, courage Yang Meng, pense à Yin Zi...

-C'est toi, Bébé ?... Gu Hai ne dormait plus. Quand il s'était réveillé, il avait ressenti une grande lassitude de tout, plus rien ne le motivait. Gu Hai le terrible était un légume, il n'avait plus de force et ne voulait plus vivre. On lui avait pris celui qui éclairait son univers et qui devait offrir au monde leur lumière. Il était seul. Il était mort. Son amour se battait pour sa vie, seul. Il ne pouvait rien faire.

Gu Hai - Bai Luo Yin -1- "Une vie."Où les histoires vivent. Découvrez maintenant