Chapitre 14 - La danse des fantômes

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Si le mort est un vivant qu'on ne voit plus, le vivant est un mort qu'on ne voit pas encore.

Tout ce qui compte sepasse dans l'invisible.

Maurice Maeterlinck


Je me réveillai en sursaut, reprenant brusquement contact avec la réalité. L'ancienne salle-à-manger était à présent plongée dans la pénombre la plus totale. Un bruit m'avait extirpé de ma profonde léthargie. En y réfléchissant, cela ressemblait plutôt au son d'une voix, une voix masculine.

- Sarah, appela une voix lointaine suivie de quelques pas s'écrasant sur le sol, juste au-dessus de ma tête.

Mon sang ne fit qu'un tour en reconnaissant la voix d'Alistair. J'eus du mal à me lever, mon corps se trouvait complètement raidi par le froid tandis que mes muscles endoloris semblaient avoir du mal à suivre mes mouvements. Je me fis violence pour m'extirper de mon assise particulièrement inconfortable et me précipitai vers les escaliers en criant pour manifester ma présence. Je grimpai les marches aussi vite que mes jambes en coton me le permettaient et une fois arrivée au deuxième étage, je me mis à tambouriner à la porte de service, priant de toutes mes forces pour que tout ce tumulte soit suffisant pour qu'Alistair m'entende.

Je dus continuer pendant quelques minutes encore qui me parurent une éternité avant d'entendre de lourds pas se rapprocher de moi de l'autre côté du mur.

- Sarah ? appela de nouveau la voix rassurante d'Alistair.

- Je suis là, martelai-je à nouveau. Je suis enfermée, aidez-moi.

Je perçus du remue-ménage et je compris rapidement qu'Alistair venait de trouver le pied de biche que j'avais abandonné beaucoup plus tôt dans la journée. Il peinait à ouvrir cette maudite porte qui apparemment se trouvait complètement bloquée. Mais, au bout d'un moment, vint la délivrance. La porte s'ouvrit brusquement et attirée comme un aimant hors de ma prison, je vacillai en passant la porte. Mon sauveur me rattrapa de justesse, refermant ses bras robustes autour de moi.

- Que s'est-il passé ? s'enquit-il d'une voix inquiète.

Sans que je puisse l'expliquer, des larmes trouvèrent leur chemin le long de mes joues pour venir se nicher dans mes cheveux. Je ne répondis pas tout de suite, appréciant le contact de son corps chaud contre le mien secoué de tremblements incontrôlables. Plusieurs minutes durent s'écouler et bientôt le silence nous enveloppa de son étreinte rassurante comme s'il venait de retrouver de vieux amis.

Je finis par recouvrer mes esprits et peu à peu, je me détachai d'Alistair, faisant disparaître mes larmes, honteuse.

- Allez-vous m'expliquer ce qu'il s'est passé ? réitéra-t-il.

- Je suis descendue dans le sous-sol autrefois réservé aux domestiques. Je n'y avais jamais mis les pieds, à vrai dire, je ne savais même pas qu'il existait avant ce matin. J'explorais les chambres quand j'ai entendu du bruit, parvins-je à expliquer entre deux respirations hachées

Je fis une pause, prenant le temps de réordonner mes idées avant de poursuivre :

- Je suis sortie voir ce que c'était et au bout du couloir, il y avait... un homme, articulai-je en sentant tout à coup les battements de mon cœur s'accélérer. Il m'a fixée pendant un moment et il est parti en direction des escaliers. J'ai tenté de le rattraper, mais c'était déjà trop tard, il m'avait enfermée. Je crois qu'il a dit que... je ne sortirais pas.

Cap SouvenirsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant