12. Ma troupe et moi partons dans deux jours.

2.6K 285 73
                                    

Je lâchai ma pomme, qui tomba au sol. J'essuyai ma bouche en me retournant, les yeux écarquillés. C'était bien le capitaine, qui se tenait appuyé contre la cheminée. Mon cœur se serra. Je ne parvenais pas à rester énervée contre lui, car il était bien trop attirant et troublant... Il vint se placer devant moi, se penchant un court instant pour ramasser ma pomme. Il la frotta avec sa manche de chemise, et me la tendit :

« - Tenez, vous deviez avoir faim. »

Je pris le fruit, n'osant croiser son regard. Le sien, en revanche, glissa sur mon corps, me provoquant une multitude de petits frissons. J'adorais la façon qu'il avait de me regarder. Il eut soudain un sourire amusé :

« - Vous avez du jus, ici. »

Il pointa mon col de chemise. Je crus revivre la scène qui s'était déroulée il y avait au moins deux semaines, lorsqu'il m'avait surprise en train de manger les fruits de la tarte. Je me sentis rougir, et l'observai silencieusement s'asseoir à mes côtés, sur la table. Son corps était tout prêt du mien, me faisant avoir trop chaud.

Il me fixa, m'emprisonnant dans ses prunelles grises, puis finit par murmurer :

« - Je ne pensais pas que votre père vous parlerait de ma proposition. »

Je détournai le regard, embarrassée. J'avais dû lui paraître si puérile lorsque je m'étais énervée contre lui, dans le couloir. Je soufflai :

« - Pardonnez-moi.

- A propos de quoi donc, Jeanne ?

- De... De ce que je vous ai dit, toute à l'heure.

- Oh, je vois. »

Son regard devint amusé. Il haussa les épaules :

« - Je vous comprend, vous étiez furieuse.

- Mais j'ai été très... Désagréable.

- Peut-être. »

Sa voix douce glissait sur moi, éveillant une étrange sensation dans mon ventre.

Il tourna le visage pour regarder devant lui, et déclara doucement :

« - De toute façon, je ne compte pas vous importuner plus longtemps, Jeanne. »

Une vague de panique me frappa :

« - Comment ça ? »

Il pencha légèrement la tête de côté pour me regarder :

« - Ma troupe et moi partons dans deux jours. »

J'ouvris la bouche, avant de la refermer, ne sachant que dire. Un étrange sentiment de peine et de déception serra mon cœur. Je baissai les yeux pour regarder mes genoux. J'aurais dû me réjouir de son départ, mais à la vérité... C'était si dur ! Je ressentais un immense abandon. Le seul homme qui s'était intéressé à moi, et qui m'intéressait, allait partir.

Sans réfléchir, je murmurai :

« - Mais... Et votre demande ? »

Doucement, il prit mon menton entre ses doigts pour tourner mon visage vers lui :

« - Jeanne... Je ne compte certainement pas vous épouser de force. Je ne suis pas à ce point un monstre. »

A cet instant, je mourrai d'envie de répondre que j'avais réagi stupidement, que je n'étais plus aussi opposée à l'idée de me marier avec lui, mais... Je n'en eus pas le courage. J'étais bien trop lâche pour m'avouer mes sentiments.

Raison ou sentiments ? ✅Où les histoires vivent. Découvrez maintenant