Chapitre 18

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Deux semaines plus tard, les aérovols arrivent enfin, avec tout ce que le Roi nous avait promis : des animaux pour l'élevage, des graines et plants pour les cultures, de quoi rebâtir le village, des outils en tout genre. Ils sont vraiment impressionnants et semblent sortir d'un autre monde : tout en courbes, les engins se sont posés sans bruit, malgré leur taille immense (80 mètres de longueur, au moins) et semblent pouvoir contenir une quantité de matériaux phénoménale. Le chef ne tarde pas à nous répartir en groupes : mes amis et moi sommes affectés au remplissage des réserves d'eau, que nous allons chercher à la source à quelques kilomètres du village. Ce début d'organisation revigore tout le monde ; on a enfin l'impression d'être un peuple à part entière.

Quant à moi, je fais partie de l'enthousiasme général. Une seule chose vient assombrir le tableau : si l'entente entre moi et mes quatre amis n'a jamais été aussi bonne, il n'en est pas de même pour Edward et Solange, qui se disputent de plus en plus. Je ne m'en fais pas pour autant : dans un couple, il y a et y aura toujours des différends, c'est normal.

Hier, j'ai été nommée par le chef en tant que sous-chef, apparemment car c'était à moi que nous devions tout ce que nous avons. J'en rougis encore... Certains ont même crié de me nommer chef ! J'ai bien-sûr refusé, me sentant bien trop jeune pour cela. Je ne sais pas encore très bien ce que ce nouveau poste implique, le chef m'a juste dit que j'étais dispensée de ma tâche (remplir les réserves d'eau du village). J'ai bien évidemment refusé, soutien envers mes amis oblige...

Il semble ne pas y avoir de saisons, ici, tant il fait toujours chaud. Lorsque je traverse la porte du dortoir, la brusque fraîcheur qui m'envahit me tire de mes pensées. Je savoure cet instant tout en contemplant le dortoir vide. Il faut dire que vide, il l'est très rarement. Nous avons construit en tout cinq dortoirs temporaires, légèrement à l'écart, pour héberger tout le monde en attendant que le village soit rebâti. Je m'assieds à même le sol, dos au mur, afin de m'accorder quelques minutes de répit, avant d'entendre quelqu'un entrer.

– Nat ?

Je reconnaitrais sa voix entre mille.

– Cat ? Mais... Tu m'as suivie ?

– Oui... Je voulais avoir une conversation rien que toi et moi.

Je n'aime pas quand Catherine adopte ce ton, c'est toujours mauvais signe. Je commence alors à m'inquiéter :

– Rien de grave ?

– Nan ! Simplement... Je m'inquiète sur un point, depuis un certain temps.

Je la laisse parler, imaginant tout et n'importe quoi : avec Catherine, tout est possible.

– Eh bien, tu vois... J'ai peur de vivre seule.

– Quoi ? Mais voyons, Cat... Tu nous as, nous !

– Je ne parle pas de ça. Tu comprends, Solange a Edward, toi ce n'est plus qu'une question de temps avec Adrian, et moi...

« Ce n'est plus qu'une question de temps avec Adrian » ? Il faudra que je pense à lui demander ce qui lui fait penser ça lorsque le moment sera plus propice... Malgré tout, je ne peux m'empêcher de sourire.

– Pourquoi tu souris comme ça ? Tu vois pas que c'est sérieux ce dont je te parle ?

– Heu, oui... Désolée. Mais je ne comprends pas pourquoi tu t'inquiètes. Nous sommes plus de mille dans ce village et il y a plein d'autres garçons de notre âge.

– Tu ne comprends rien, Nat ! Rien de rien ! Je m'en fous de ces autres mecs ! Ce sont des machines à tuer, rien de plus !

– Mais alors, qui...

Matricule 301Où les histoires vivent. Découvrez maintenant