— Non, c'est non !
— Ne fais pas ta puritaine ! Dis-toi que tu le fais pour la bonne cause !
— Et même ! Ça reste MES sourcils et aux dernières nouvelles, j'en fais ce que je veux et je refuse qu'on me les arrache avec je ne sais quel instrument de torture !
Vanessa campait sur ses positions. Déjà qu'avec sa nouvelle coiffure, elle se trouvait changé, elle avait peur de ne même plus se reconnaître si on la maquillait trop, à commencer par cette tendance à la mutilation sourcilière. Elle ne s'était jamais épilée les sourcils de sa vie et quand elle voyait ça sur les autres, ça lui semblait tellement peu naturel qu'elle refusait catégoriquement de faire pareil.
L'esthéticienne, dont le badge stipulait qu'elle se prénommait Marjorie, jeta un regard agacé à Vanessa à travers le miroir et un regard compatissant à Rebecca. Cette dernière lui intima de les laisser un moment seules. Enfin... seules, entourées d'au moins cinq autres clientes. Heureusement qu'elles étaient toutes occupées à papoter entre elles ou avec la personne chargée de s'occuper d'elles.
— Bon, et si tu me disais ce qui ne va pas ? entama Rebecca, les bras croisés sur sa poitrine.
— Qu'est-ce que tu ne comprends pas dans « je ne veux pas me faire arracher les sourcils ! » ?
— Déjà, on ne dit pas « arracher », mais « épiler » et je te l'ai dit, elle n'en enlèvera pas beaucoup, je te le promets.
— Beaucoup pour toi, c'est jusqu'à quel niveau ?
— Eh bien je dirais... comme les miens ?
— Tu rigoles ? Les tiens forment des arcs parfaits. Si on me fait la même chose j'aurai juste l'air d'un croisement entre un Chinois et une Camerounaise.
Rebecca pouffa malgré elle.
Vanessa ne comprenait pas elle-même pourquoi elle s'opposait autant à ce qu'on lui épile les sourcils. Bon ok, elle avait un chouia exagéré en disant que ça avait l'air un peu trop artificiel. Sur certaines personnes, c'était vraiment joli. Or justement, elle ne pensait pas faire partie de cette catégorie de personne sur lesquels ce serait « joli ». Et si ça loupait, ce serait irréversible. Mais il n'y avait pas que ça...
Rebecca retourna la chaise dans laquelle Vanessa était assise et prit une chaise juste à côté pour s'asseoir près d'elle.
— Je ne pense pas que ce soit vraiment les sourcils qui te dérangent. Tu as supporté la séance de shopping. Tu vas porter une robe magnifique, des chaussures superbes et tous les accessoires qui vont avec. Je sais que tu n'es pas du tout le genre de fille à faire ça habituellement alors je reconnais tes efforts. Mais si tu ne laisses pas Marjorie faire son travail, il n'y aura aucune harmonie et ce sera comme si on avait perdu notre temps.
Vanessa contempla ses ongles qu'on avait également pris soin de vernir d'une couleur sombre, la mine boudeuse. Que Rebecca lui fasse la morale parce qu'elle ne voulait pas qu'on touche à ses sourcils l'énervait un peu. Si elle ne pouvait même plus les contrôler, qu'est-ce qu'il lui restait ? C'était sans doute ça le véritable problème. Des bribes de souvenirs de ces dernières semaines lui revinrent et elle se rendit encore compte à quel point elle s'était complètement laissée porter par le courant. Même ses propres sourcils lui échappaient. Elle avait conscience que c'était stupide, mais c'était plus fort qu'elle.
— Ne crois pas que ces gens ne regarderont pas ce genre de détails, bien au contraire. Il faudra être irréprochable. Je suppose que tu ne souhaites pas qu'à la dernière minute, ils refusent de t'emmener et demandent à avoir quelqu'un d'autre, n'est-ce pas ? Dis-toi que tout ce que tu feras aujourd'hui, sera pour sauver l'humanité ! Tu aurais pu choisir de te taire et de croiser les bras en attendant que tout se passe mais tu as décidé d'agir et c'est parce que tu as pris cette décision que tu te retrouves à faire ça aujourd'hui. Alors, fais-moi juste confiance et laisse-toi faire, d'accord ?
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Distorsion T.1 [Derniers Chapitres Dépubliés]
ParanormalL'Université, ce grand moment de la vie où l'enfant sort enfin du cocon familial pour se frayer son propre chemin dans la société, ça, Vanessa l'avait désiré. Mais quitter son Cameroun natal pour la Belgique où elle ne connaissait personne, c'était...