- Chapitre Sept -

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Isak... Isak... Isak...

Le visage de ce garçon avait enfin un nom.

Une fois les présentations faites, un silence de plomb s'était installé entre les deux garçons. Le plus petit avait arrêté de pleurer, par Dieu-sait quel miracle. Le plus grand avait cessé de respirer, comme si Even venait d'avoir le souffle coupé par cet inconnu, qui n'était plus si inconnu désormais.

Après quelques instants encore, l'étudiant avait enlacé ce dénommé Isak. Sur le moment, il s'était trouvé idiot. Tellement idiot. Mais il était trop tard. Pourtant, en y repensant, allongé sur son lit alors qu'il peinait à trouver le sommeil, il trouvait que c'était la meilleure initiative qu'il eût jamais prise. Il n'était pas vraiment ce genre de garçon qui faisait le premier pas, d'habitude. Mais, cette fois-ci, il l'avait fait. Il l'avait fait, putain. Et il en était fier. Even se disait même qu'il aurait dû le faire bien plus tôt. Il avait loupé l'occasion de connaître une personne très gentille.

Mais, maintenant, il le connaissait.

Il ne se souvenait de rien, pourtant. Pas même de leurs sujets de conversation, pas même de leurs aurevoirs. Il ne se souvenait que de son nom, de la manière dont il l'avait prononcé, du silence qui avait suivi. Comme si tout cela n'avait été qu'un rêve, un rêve si magnifique qu'il avait du mal à s'en rappeler.

Avait-il dormi cette nuit-là ? Il n'en savait rien. Mais, quand le soleil fut enfin levé, Even était de bonne humeur et bondit hors de son lit. Qui pouvait être heureux de se lever un dimanche matin ? Surtout pour aller travailler ? Si c'était un dimanche comme les autres, le grand blond serait encore affalé sous sa couette, profitant de la chaleur présente là-dessous. Or, ce dimanche-ci, ce n'était pas un dimanche comme les autres. Ce dimanche-ci, il allait revoir un garçon formidable du nom d'Isak. Et il pourrait peut-être même passer l'après-midi avec lui, après le travail ?

Ce fut ces pensées positives qui amenèrent Even jusqu'au parc, une demi-heure plus tôt que prévu. Il ne vit pas le garçon. Peut-être n'était-il pas encore arrivé ? Ou peut-être dormait-il encore ? D'ailleurs, où dormait-il ? Even avait dû lui demander la veille, mais impossible pour lui de s'en souvenir.

L'étudiant prit l'initiative de l'attendre. Il s'assit sur le banc, et il patienta. Une minute. Cinq minutes. Dix minutes. Vingt minutes. Vingt-sept minutes. Où était-il ? Allait-il même venir ?

Even finit par se relever, prêt à s'en aller.

« Even...? »

Il se retourna.

« Isak ! »

Un sourire prit place sur son visage.

Le dénommé Isak sourit légèrement, contaminé par la joie du plus grand.

« Even, tu vas arrêter d'être dans les nuages, à la fin ?! »

Even secoua la tête, comme pour chasser les pensées qui gravitaient autour du garçon à la casquette. Il vit son patron d'âge mur le regarder avec insistance en fronçant les sourcils.

« Je... Désolé, Monsieur. Ça n'arrivera plus.

— Tu as des problèmes, fiston ?

— Il y a ce garçon...

— Oh, je vois, ricana-t-il en détendant son visage.

— Vous voyez...?

— Les amourettes, à ton âge, c'est normal. Je suis aussi passé par là, aussi surprenant que ça puisse sembler.

— Je ne suis pas amoureux ! répliqua-t-il un peu trop brusquement au goût du propriétaire du café. Désolé, je... je ne suis pas amoureux, répéta-t-il plus calmement.

— Évidemment. En attendant, il vole toute l'attention de mon employé et j'aimerais le récupérer jusqu'à treize heures pétantes. Il pourra penser à lui plus tard. »

Un sourire timide s'empara du visage du jeune homme qui se remit au travail, écoutant par mégarde le cinquantenaire se murmurer à lui-même :

« Ce garçon va rester dans ses pensées pendant un long moment, on dirait... »

That Boy | EvakOù les histoires vivent. Découvrez maintenant