Premier Secret

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-Jungkook ? Jeon Jungkook ?

Une voix insistante me tira de mon sommeil. La tête encore endormie, je m'aidai de mes bras pour me redresser lentement avant de voir une tonne de paires d'oeils braqués sur moi. Il ne me fallut que peu de temps pour me rendre compte que, comme tous les jours depuis cette fichue rentrée, je m'étais endormi en cours. La prof ne prit même pas la peine de me passer un savon, elle commençait à avoir l'habitude de mes soudaines envies de dormir.

-Bon écoute Jungkook, tu passeras me voir à la fin d'heure, je pense qu'on a plusieurs choses à se dire et à tirer au clair, me dit-elle, assez bas pour montrer son désespoir mais assez fort pour que tout le monde l'entende.

Je gloussai légèrement avant de souffler, je n'avais pas l'envie ni la tête à lui répondre alors j'acceptai mon sort sans broncher.

-Quelque chose ne va pas ? Me demanda Namjoon.

Namjoon était non seulement mon voisin de classe mais aussi mon meilleur ami, c'était le genre de mecs qui aimait beaucoup se faire remarquer, il était cash, drôle, mais ce n'avait jamais été quelqu'un de méchant malgré le fait que tout le monde puisse penser le contraire. Son regard se fit de plus en plus insistant et je savais qu'il attendait moi que je lui confie ce qui n'allait pas, mais j'en avais pas l'habitude. Namjoon et moi, on ne parlait jamais de nos problèmes, lui n'avait pas l'air d'en avoir et moi je ne voulais tout simplement rien dire. J'avais beau lui faire confiance, il savait que je n'aimais pas parler de ma vie.

-Non rien ne t'en fais pas...

Il pencha sa tête d'un air étonné et suspicieux.

-Ah ouais ? Tout va bien ? Pourtant je te rappelle que ça fait deux semaines que tu t'endors ou que tu somnoles en classe, tous les jours mec, tous les jours sans exception ! T'es insomniaque ?

Je fis mine de rire.

-Bien sûr que non abruti. Moi, insomniaque ? Je joue juste beaucoup trop aux jeux vidéos et comme je vois pas le temps passer bah..

En voyant son regard, je m'arrêtai net. Il ne me croyait pas et il avait bien raison, mais il lâcha tout de même l'affaire, se doutant que j'avais tout sauf envie de lui en parler.
Bien évidemment que je devenais insomniaque. Chez moi c'était l'enfer sur terre, un chaos pas possible.
Tout ce désastre avait commencé le jour-même de la rentrée. Je prenais le chemin de ma maison après la première journée de cours quand j'ai vu la voiture de ma mère partir avec elle pleurant à l'intérieur. Quand je fus enfin dans ma maison, mon père était assis sur le canapé. Mon frère n'était pas là et heureusement car il était très intelligent et aurait comprit immédiatement, il aurait sûrement tout envoyer dans le mur avant de fuir. Moi aussi j'ai rapidement comprit, mais contrairement à mon frère je n'avais pas les couilles de demander, alors je suis monté calmement dans ma chambre et je n'ai pas bougé. Depuis ce jour, mes parents ne s'adressaient quasiment plus la parole sauf le soir, quand ils croyaient que nous étions couchés. Et là...Là les hurlements se faisaient entendre, les reproches de ma mère, les mots durs de mon père...
Le deuxième soir avait été le plus difficile, ma mère hurlait et pleurait en disant que mon père l'avait trompé. Je supportais déjà difficilement cette rupture et ses cris mais il a fallu que j'entende une porte claquer pour que mon coeur se brise totalement. Mon frère venait de sortir de sa chambre et s'apprêtait à tout dévaster. Alors la première chose que j'ai fait fut de courir vers lui. Il a hurlé. Je l'ai prit dans les bras. Il s'est laissé tomber contre moi et je l'ai consolé durant de longues heures, tous les deux assis à côté des escaliers. J'étais resté silencieux, acceptant sa douleur et délaissant la mienne.
Mon frère n'adressait plus la parole à mes parents. Et chaque soirs, les insultes recommençaient et je ne pouvais plus trouver le sommeil. Je pensais sans cesse à mon frère. Et malgré les murs qui nous séparaient je l'entendais pleurer. Chaque putain de soir. Et j'étais totalement impuissant face à son désarroi. Je n'avais pas le courage ni la force de parler, ni même de l'écouter.
Voilà. Voilà la cause de mes insomnies à répétition, la cause de mes somnolences en classe.
Et je n'avais certainement pas envie d'en parler.
Je me posais bien trop de questions : est-ce que mon père trompait réellement ma mère ? Est-ce qu'ils allaient divorcer ? Est-ce que mon frère en savait autant, plus ou moins que moi ?
Mais toutes ces questions restaient en suspens à cause de ma faiblesse et de ma lâcheté.
J'avais honte, honte de ne pas être assez fort pour en parler.
Mais je ne pouvais pas.

« 𝚂𝙴𝙲𝚁𝙴𝚃𝚂. » ᵗᵃᵉᵏᵒᵒᵏOù les histoires vivent. Découvrez maintenant