LA LOUTRE ET LE RENARD [terminée]

[CHAPITRE 10] Les orphelins.

La lune, ronde et grise, formait un cercle parfait de lumière qui éclairait royalement la Forêt Interdite s'étendant à perte de vue, sous ses yeux émerveillés. De la lumière s'échappait des fenêtres de la cabane de pierre de Hagrid, en contrebas, et au loin, le scintillement du Lac Noir rendait l'atmosphère plus inquiétante. Plus lourde. Comme chargée d'électricité. Brûlante, en parfait contraste avec les températures glaciales de l'hiver qui s'étendait doucement sur le pays.

De la fumée s'échappa de la bouche de Hermione lorsqu'elle poussa un léger soupir, intensifiant le mouvement de ses mains sur ses bras, dans l'espoir de les réchauffer un peu. Bien sûr, elle aurait tout simplement pût retourner dans sa salle commune et profiter un instant des flammes dansant dans la cheminée, sa ronde était finie depuis longues minutes, mais sans vraiment savoir pourquoi, elle avait éprouvé le besoin de venir ici, un court instant. Comme pour se ressourcer, penser à autre chose qu'à la pile de devoirs qui s'accumulait, à Fred, qu'elle reverrait dans moins de trois semaines maintenant. Songer à autre chose qu'à Harry et les cours particuliers que Dumbledore lui donnait, les informations que le Survivant leur divulguait sur le sombre passé de Voldemort, connu alors comme Tom Jedusor, orphelin de père et de mère.

Cet instant de repos, de solitude, lui faisait beaucoup de bien. Les journées, de plus en plus chargées par le travail et l'apprentissage des sortilèges informulées, la fatiguaient de plus en plus, elle comme la plupart des élèves de son année. Et le temps pluvieux des derniers jours n'arrangeaient pas les choses. Les tensions étaient montées d'un cran à chaque table de la Grande Salle, accentuaient par les mauvaises nouvelles quotidiennes rapportées par la Gazette du Sorcier. Hermione ne comptait plus le nombre d'articles qu'elle avait lu relatant de la mort d'une famille de Nés-Moldus ou même de sorciers ayant tentés d'aider les non sorciers. La domination de Voldemort croissait de secondes en secondes. Un voile noir se formait au-dessus de leur tête, et le jour où il les aurait tous attrapés, serait celui de leur perte.

—Ce n'est même plus possible de se retrouver seul pour réfléchir.

La voix grave, tremblant sous l'effet de la colère, de Drago Malefoy résonna brusquement dans son dos, lui arrachant un sursaut de surprise qui entraîna son cœur dans une course folle. La main sur la poitrine, elle se retourna à demi vers le nouvel arrivant, à qui elle décocha un regard noir, qu'il lui rendit, un rictus au coin des lèvres qu'elle vit nettement grâce aux rayons de la lune qui frappaient la tour d'Astronomie.

—Tu n'as qu'à trouver un autre endroit, répliqua-t-elle sèchement.

—Cause toujours, répondit Malefoy. J'étais là le premier.

—Oh, vraiment ? ricana-t-elle.

Le Serpentard ne répondit pas et combla l'espace qui les séparait, pour venir se poser à ses côtés, contre la rambarde qui les empêchait de sombrer dans le vide. Et Hermione eut toutes les peines du monde à retenir son sursaut lorsque le bras gauche du garçon effleura le sien, ce dont il ne sembla pas prendre conscience, laissant son regard se perdre dans l'obscur horizon qui leur faisait face.

Un sentiment d'effroi prit possession d'elle, et elle se demanda dans quel état d'esprit se trouvait Drago, après ce qu'il s'était passé à Pré-au-Lard quelques jours plutôt. Après l'attaque dont Katie Bell, une septième année à Gryffondor avait été victime. Contraignant Mrs Pomfresh, impuissante face au mal qui faisait souffrir l'élève, à requérir l'aide de Sainte Mangouste, où se trouvait la lionne depuis. Comment faisait-il pour vivre avec cette culpabilité qui était sienne ?

Car, même si elle n'avait pas cherché à appuyer Harry lorsque celui-ci avait affirmé à McGonagall et Rogue que c'était Malefoy qui avait donné le collier à Katie, elle était tout de même persuadée qu'il en était le seul responsable.